RN : les mineurs non accompagnés (MNA) et les enfants d’étrangers exclus de la protection de l’enfance

Le Rassemblement National (RN), sous couvert de protéger les « enfants français », menace en réalité  le système de protection de l’enfance dans notre pays. Son programme, empreint de discrimination, risque de laisser de nombreux enfants vulnérables sans protection adéquate. Ce sont les mineurs non accompagnés (MNA) qui sont essentiellement visés.

La politique de « préférence nationale » du RN est au cœur de sa politique de protection de l’enfance. En priorisant les enfants français au détriment des enfants issus de l’immigration, ce parti crée une hiérarchie dangereuse. Cette approche discriminatoire va à l’encontre des principes fondamentaux des droits de l’enfant, qui stipulent que tous les enfants doivent être protégés, indépendamment de leur origine ou de leur statut.

Des mineurs non accompagnés considérés comme des délinquants

La situation des mineurs non accompagnés est particulièrement préoccupante dans les projets du RN. Le parti propose le « renvoi systématique des mineurs non accompagnés vers leur pays d’origine » Cette mesure est en contradiction flagrante avec les principes de protection de l’enfance et les obligations internationales de la France. Elle ignore la réalité complexe de ces jeunes, souvent en situation de grande vulnérabilité et ayant fui des conditions de vie dangereuses dans leurs pays d’origine.

Il faut rappeler que jusqu’ici la France se refuse, à juste titre, d’expulser des mineurs. Notre pays considère que tout enfant et adolescent non accompagné présent sur son territoire, français ou étranger, est en situation de danger et à ce titre doit faire l’objet des mesures de protection qui s’imposent (art. 375 et suivant du code civil).

Ce sera très différent avec Marine Le Pen. Celle-ci estime qu’ils sont dans leur globalité des délinquants qui coutent cher à l’État « en raison de la «criminalité du quotidien» qu’ils génèrent et de leur « coût financier exorbitant » dit-elle. Au même titre que le droit d’asile, les mineurs non accompagnés représentent pour le RN une forme d’immigration illégale à combattre.

La réalité est bien différente. D’abord sur le nombre de mineurs non accompagnés : selon l’Observatoire national de la protection de l’enfance (ONPE), en 2022, sur les 310.577 mineurs pris en charge par les services de l’Aide Sociale à l’Enfance, il y avait seulement  22.515 MNA dans cet effectif.

Quant à la délinquance, celle-ci est mal chiffrée. Elle concernerait les jeunes non protégés qui n’ont pas été reconnus mineurs et sont laissés à la rue sans moyens de subsistance. Il faut savoir qu’un peu plus de 50 % des jeunes ne sont pas considérés comme mineurs à l’issue du processus d’évaluation de leur âge.

Enfin, la Cour des comptes a estimé dans un rapport du 8 octobre 2020 qu’il n’existe pas, aujourd’hui, d’étude rigoureuse sur ces sujets.  Rapporter la situation des MNA à celle de l’immigration et de la demande d’asile n’est pas établie. Cela permet de dire tout et son contraire, notamment au sujet de la délinquance.

Même les mineurs protégés seront expulsables.

La situation actuelle des MNA en France est déjà alarmante, avec de nombreux jeunes non reconnus en recours se retrouvant dans des situations précaires. Le programme du RN ne fera qu’aggraver cette situation, en niant le besoin de protection de ces jeunes vulnérables. S’il est mis en œuvre, il les privera de l’accès aux services essentiels de protection de l’enfance.

En effet, avec le RN, les mineurs non accompagnés ne pourront plus bénéficier de prise en charge de l’ASE. Cette situation  poussera ces jeunes à une délinquance de survie :  trafics, prostitution, etc. Ainsi ils pourront encore plus facilement être  pointés du doigt comme des délinquants qu’il faut absolument expulser.

S’appuyant sur un fait divers sordide attribué à un mineur non accompagné (qui avait déclaré avoir 25 ans), Marine Le Pen en avait profité en 2020 pour indiquer que les « véritables mineurs isolés n’ont pas à rester sur notre territoire, mais doivent en lien avec l’Unicef et les ONG spécialisées sur ces questions, être rapatriés dans leur pays d’origine afin d’y être protégés et de retrouver leur foyer ». Cette instrumentalisation de l’UNICEF pourrait prêter à sourire si cela n’était pas aussi grave. Cela laisse supposer que les mineurs ont des familles protectrices et un foyer qui les attendent. Or la définition même d’un MNA c’est qu’il n’a pas de parents qui peuvent être identifiés ou retrouvés. Cela, Marine Le Pen le sait très bien.

Fuyant la guerre, les violences ou les discriminations pour trouver un avenir meilleur, ces enfants et adolescents mettent leur vie en danger lors de parcours migratoires très périlleux. La plupart des mineurs non accompagnés (MNA) sont victimes de violences physiques et psychologiques, d’abus sexuels et de trafics d’êtres humains dans leur pays d’origine et au cours de leur parcours migratoire. Certains souffrent de graves troubles psychologiques à cause des maltraitances qu’ils ont subi. Les renvoyer ainsi dans leurs pays consiste à les livrer  à ceux qu’ils ont tenté de fuir.

Ce manque d’humanité sous couvert de bienveillance est saisissant. Qu’en est-il pour autant en matière d’aide à l’enfance ?

« Le RN au pouvoir ne serait pas l’ami de nos enfants »

Une tribune du Collectif « construire ensemble la politique de l’enfance » publiée par le site les pros de la petite enfance nous éclaire à ce sujet. Elle s’appuie sur des exemples concrets.

Le RN a refusé de prendre des mesures en faveur des foyers modestes et de leurs enfants. Lors de la précédente législature, il n’a pas voté la gratuité de la cantine, ni l’augmentation du budget des hôpitaux ou des universités. Il a refusé de revaloriser les APL, d’augmenter le SMIC, de geler les loyers, de rétablir le moindre impôt touchant la fortune ou les super-profits, de baisser la TVA sur les transports en commun…

Selon le collectif, le RN ne prête pas une attention particulière au bien-être des enfants. Le Parti de Marine Le Pen envisage de diminuer les subventions dans divers domaines. Par exemple, les réseaux d’éducation prioritaire (REP), qui travaillent à favoriser l’égalité des chances pour tous les enfants. Et là, cela ne concerne pas que les enfants d’origine étrangère. Mais ce sont bien eux qui sont systématiquement visés. Ils sont les boucs-émissaires d’une France qui va mal.

Les enfants dont les parents ne sont pas de nationalité française verraient leurs droits restreints par la politique de « préférence nationale ». Par exemple, ils ne pourraient plus partager le déjeuner avec leurs camarades français à la cantine, car ils seraient exclus des subventions actuellement accordées aux communes. Peu importe si leurs parents ne peuvent pas payer le prix réel du repas et que ces enfants n’ont plus accès à une alimentation variée et de qualité… De nombreuses familles avec enfants pourraient aussi se retrouver à la rue, expulsées de leurs logements sociaux et sans les moyens de louer dans le privé.

Toutes ces mesures violeraient la Convention internationale des droits de l’enfant, que la France a ratifiée, tout comme 196 autres pays. Cette convention garantit à tous les enfants « toutes les mesures appropriées pour que l’enfant soit effectivement protégé contre toutes formes de discrimination ou de sanction motivées par la situation juridique [notamment la nationalité] de ses parents ». Ainsi, refuser l’accès à la cantine ou au logement à un enfant en raison de la nationalité étrangère de ses parents, au nom de la préférence nationale, serait non seulement inhumain, mais également illégal au regard des traités internationaux adoptés par la France et la grande majorité des États du monde pour protéger les mineurs.

Et que dire de la suppression annoncée du droit du sol, qui régit la nationalité en France depuis plusieurs siècles et dans de nombreux autres pays ? Est-ce une volonté d’empêcher des enfants nés ici et dont l’avenir est en France de devenir français, comme tant d’autres qui, avec tous, ont construit la France d’hier et d’aujourd’hui ?

Les actions du RN dans les communes qu’il gère donnent un aperçu inquiétant de ce que pourrait devenir la protection de l’enfance à l’échelle nationale. Ce parti a déjà montré son désintérêt (pour ne pas dire plus) pour les politiques sociales et éducatives dans les municipalités qu’il gère. On y observe une réduction des budgets alloués aux structures d’accueil de la petite enfance, une diminution des subventions aux associations œuvrant pour l’enfance, et une politisation des contenus éducatifs.

Sans surprise, le RN prône également un durcissement de la justice des mineurs.  Comme Valérie Pécresse, Marine Le Pen demande l’abaissement de la majorité pénale à 16 ans. Cette approche punitive, risque bien d’aggraver les problèmes de délinquance juvénile au lieu de les résoudre. Elle va à l’encontre des recommandations des professionnels de l’enfance qui préconisent des mesures de prévention et d’accompagnement.

En conclusion, le programme du RN en matière de protection de l’enfance s’apparente à une transformation du système actuel. En privilégiant une approche discriminatoire et punitive, ce parti menace de laisser de nombreux enfants sans protection adéquate, en particulier les mineurs non accompagnés. C’est inhumain.

Les exemples des municipalités RN montrent déjà les conséquences néfastes de ces politiques sur le terrain. Il est essentiel de s’opposer à cette vision qui va à l’encontre des droits fondamentaux des enfants et de leur intérêt supérieur, des principes pourtant au cœur de toute politique de protection de l’enfance digne de ce nom.

Sources :

 

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Photo de Drazen Zigic sur Freepik

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2 Responses

  1. Vous avez l’air outré monsieur par ce qu’entreprend le RN. Moi, ce qui me choque, c’est l’ASE dans son ensemble. On a l’impression d’être dans un autre pays où les éducateurs, les juges pour enfants, les assistantes sociales peuvent tout faire. Ma France n’est pas comme ça! Je veux que les enfants Français soient protégés de la protection de l’enfance et de la délinquance.

  2. Où est la politique de prévention en France ? et est ce que les politiques s’intéressent à l’enfance (qui n’existe qu’une fois élève), quid de la petite enfance, des crèches, des accueils individuels et collectifs, quid de l’accompagnement des familles…

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