Vers une égalité réelle entre les femmes et les hommes ? Un combat toujours d’actualité

La situation des femmes dans notre pays, bien que marquée par des avancées significatives, reste empreinte d’inégalités profondes. Le rapport intitulé « Vers l’égalité réelle entre les femmes et les hommes en 10 chiffres-clés » publié le 4 mars dernier par le ministère chargé de l’Égalité entre les femmes et les hommes, nous propose une radiographie saisissante de ces disparités. À travers des données actualisées, ce document donne à voir les obstacles persistants et les efforts nécessaires pour atteindre une égalité véritable. Ce n’est pas gagné loin de là !

Les violences sexistes et sexuelles : un fléau persistant

Les violences sexistes et sexuelles demeurent l’un des aspects les plus graves de l’inégalité de genre en France. Chaque année, des centaines de milliers de femmes sont victimes de violences physiques ou sexuelles, souvent perpétrées par leurs conjoints ou ex-conjoints. 114.079 victimes de violences sexuelles ont été enregistrées par les services de sécurité en France en 2023. Ces chiffres sont bien en deçà la réalité, car combien de femmes ne portent pas plainte ? Elles sont légion. Ces chiffres traduisent une autre réalité : dans 91 % des cas, les agresseurs sont connus des victimes. On sait aussi désormais que les femmes qui vivent avec un ou plusieurs handicaps sont plus fréquemment exposées aux violences sexuelles que les autres femmes.

Est-ce un effet des campagnes de sensibilisation ? Les féminicides sont officiellement à la baisse. Selon le rapport, 96 femmes ont été tuées par leur partenaire ou ex-partenaire en 2023 (contre 23 hommes tués cette même année).

Le collectif « Noustoutes » a de son côté dénombré 139 femmes tuées en 2024.  Soit 3 de plus qu’en 2023 (136). Comment expliquer cette différence des chiffres entre ceux des services de l’État et ceux du collectif ? Malgré la sensibilisation croissante autour de ces crimes, le mot « féminicide » n’existe toujours pas dans le Code pénal français, ce qui limite la reconnaissance légale de ces actes spécifiques.

Le rapport souligne aussi qu’une femme sur deux en France a déjà subi une violence sexuelle au cours de sa vie. Ces données révèlent la nécessité d’intensifier les politiques publiques pour protéger les femmes et traiter fermement les auteurs.

Les inégalités économiques : un plafond de verre tenace

L’écart salarial entre les hommes et les femmes reste un symbole d’injustice économique. Les femmes gagnent en moyenne 23,5 % de moins que leurs homologues masculins tous temps de travail confondus. Même à temps plein et pour des postes équivalents, elles perçoivent encore 4 % de moins que les hommes[6]. Cette disparité s’ajoute à la surreprésentation des femmes dans des emplois précaires ou à temps partiel : les femmes travaillent 3 fois plus souvent à temps partiel que les hommes. Le temps partiel est particulièrement fréquent parmi les mères. Là aussi ce n’est pas une surprise.

Les chiffres montrent également une faible mixité dans les postes à responsabilité. Parmi les entreprises du CAC 40, seules quelques femmes occupent des fonctions dirigeantes. Cette sous-représentation s’étend aux sphères politiques où la proportion de maires femmes reste marginale. Ces données montrent qu’un plafond de verre existe bien. Il freine l’autonomie économique des femmes.

Et ne pensez pas que tout va bien dans la fonction publique censée être à la pointe de l’égalité salariale. Même si c’est mieux que dans le privé, les femmes perçoivent une rémunération en moyenne 10,5 % inférieure à celle des hommes. Comme dans le secteur privé, elles sont sous-représentées parmi les plus hautes rémunérations.

Santé des femmes : des prise en charge insuffisantes

Le rapport met aussi en exergue les inégalités spécifiques liées à la santé. Des pathologies comme l’endométriose ou la précarité menstruelle restent insuffisamment prises en compte par le système médical . Ces problématiques affectent particulièrement les femmes précaires et vulnérables, notamment celles vivant dans des zones rurales ou ultramarines.

Le plan interministériel « Toutes et Tous Égaux » vise à améliorer la santé des femmes à chaque étape de leur vie et à garantir leur droit à disposer librement de leur corps. Cependant, ces ambitions se heurtent souvent à un manque de moyens financiers. En effet, le budget du ministère dédié aux droits des femmes reste dérisoire : moins de 100 millions d’euros en 2025, soit seulement 0,02 % du budget général de l’État.

La santé mentale des femmes, en particulier des jeunes femmes, est plus dégradée que celle des hommes. Le nombre d’hospitalisations pour geste « auto-infligé » connaît une hausse très importante chez les jeunes filles

Éducation et culture : déconstruire les stéréotypes dès l’enfance

Les stéréotypes sexistes continuent d’imprégner la société française. Ils influencent dès le plus jeune âge les choix scolaires et professionnels. Le rapport souligne que promouvoir une culture de l’égalité est essentiel pour libérer filles et garçons des représentations genrées qui limitent leurs aspirations. Je vous invite à ce sujet à découvrir l’excellent documentaire diffusé actuellement sur Arte en deux épisodes. Il s’intitule « les femmes riches ne courent pas les rues ». C’est particulièrement éclairant et bien documenté.

Les stéréotypes concernent aussi tous les sujets liés à la vie affective et sexuelle. Cette lutte contre les représentations est plébiscitée par neuf Français sur dix comme une mesure prioritaire contre le sexisme. Cependant, cette éducation reste insuffisamment intégrée dans le système scolaire. L’instauration systématique de cours sur ces thématiques pourrait constituer une avancée majeure pour déconstruire durablement ces biais.

Une lente progression malgré tout dit le rapport

Malgré ces difficultés considérables, il serait injuste d’ignorer les progrès réalisés. L’index d’égalité professionnelle montre que certaines entreprises atteignent désormais des scores élevés en matière d’équité salariale et promotionnelle. De même, la mobilisation citoyenne autour du féminisme gagne en intensité avec des campagnes comme « NousToutes » qui dénoncent systématiquement les violences faites aux femmes.

Cependant, cette progression reste lente face à l’urgence sociale. Les chiffres montrent clairement que la lutte pour l’égalité réelle entre les sexes est loin d’être achevée. Il y a lieu de craindre une forte poussée des revendications masculinistes depuis l’accession au pouvoir de Trump aux États-Unis. Pourquoi ? Sa vision illibérale aurait proscrit même la production d’un tel rapport dans ce pays. En France, certains mouvements sont prêts à utiliser les mêmes excès de langage qu’au pays de l’Oncle Sam.

Agir sans attendre

La publication du rapport, malgré certains défauts que je ne commente pas ici, est aussi un appel clair à poursuivre le combat pour une société plus juste entre les femmes et les hommes. Les données qu’il contient ne doivent pas seulement servir à dénoncer ; elles doivent inspirer des  actions volontaires et résolues. Les pouvoirs publics ont le devoir d’investir massivement dans cette grande cause afin qu’elle ne soit pas qu’un slogan politique.

En tant que citoyens également, nous avons tous un rôle à jouer pour déconstruire nos propres biais sexistes. Cela commence par une prise de conscience partagée entre les femmes et les hommes et la mise en œuvre de pratiques visant à éviter que ces inégalités perdurent. Il nous faut soutenir activement celles qui subissent encore trop souvent ces injustices. L’égalité ne se décrète pas ; elle se construit chaque jour par nos choix collectifs et individuels.

Source

• Chiffres-clés : Vers l’égalité réelle entre les femmes et les hommes – Édition 2024 | ministère chargé de l’Égalité entre les femmes et les hommes
• Télécharger le rapport

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Photo : capture d’écran documentaire Arte « les femmes riches ne courent pas les rues«