Protection de l’enfance : un rapport de l’IGAS pointe les défaillances en France
« C’est un rapport inquiétant pour le secteur de la protection de l’enfance qui vient d’être rendu public » explique le journaliste Dylan Veerasamy sur le site de TF1. L’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) estime que les difficultés rencontrées dans le secteur pourraient mener à l’augmentation des décès chez les enfants faisant l’objet d’une mesure de protection.
Selon l’IGAS, les acteurs de la protection de l’enfance travailleraient « en mode dégradé ». Il est fait état de « difficultés de recrutement » et « d’une recrudescence des signalements après les confinements ». Le rapport parle aussi d’une « inadéquation » entre les « besoins croissants » en protection de l’enfance et « l’offre insuffisante » pour y répondre. C’est exactement ce que dénoncent les collectifs de travailleurs sociaux et les syndicats
Le manque d’action des conseils départementaux est également reproché par l’IGAS dans ce rapport. Cela fera sans doute réagir l’Association des Départements de France. L’IGAS estime que les interventions à domicile dans les familles avec une mesure d’assistance éducative en milieu ouvert (AEMO) ne sont pas correctement gérées par les conseils départementaux. Ils délègueraient de façon trop importante ces interventions « à l’appréciation des associations en lien direct avec les magistrats ». (Ce qui à mon sens est tout aussi efficace au titre de la protection). (lire l’article de TF1)
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La France condamnée par la CEDH pour les agressions sexuelles subies par une enfant placée
Cette information est assez consternante. La Cour européenne des Droits de l’Homme (CEDH) a condamné le 3 novembre la France pour les viols et agressions sexuelles subies par une enfant placée en famille d’accueil. La dépêche AFP publiée par l’Obs précise que la jeune fille avait été confiée par l’Aide Sociale à l’Enfance du Tarn-et-Garonne à une famille de membres des Témoins de Jéhovah. Elle a subi des viols et agressions sexuelles sur une période de treize ans, entre 1976 et 1988. Le père de la famille d’accueil avait reconnu une partie des faits dénoncés.
Certes, les faits ne datent pas d’hier, mais ils révèlent des pratiques liées à un manque de protection et de contrôle des services de protection de l’époque. Dans son jugement, la Cour estime que les autorités françaises « n’ont pas mis en œuvre les mesures préventives de détection des risques de mauvais traitements prévues par les textes ». Il est précisé que « seulement six visites ont été effectuées » auprès de la famille sur l’ensemble de la période des 12 années de placement. En outre, Aucun document n’atteste d’un suivi auprès des établissements scolaires fréquentés par l’enfant ».
Le combat judiciaire engagé par la victime aura duré 23 ans. La France a été condamnée à lui verser 55.000 euros au titre du dommage moral. (une bien faible indemnisation au regard des faits). Les juges européens ont aussi indiqué que les responsables de l’ASE n’avaient pas « mis en œuvre les mesures nécessaires » pour faire respecter la « clause de neutralité religieuse » que la famille d’accueil devait observer. La famille faisait participer l’enfant à ses activités religieuses, alors même que la famille d’origine de l’enfant était initialement de confession musulmane. En conséquence, La CEDH a condamné la France pour violation des articles 3 (interdiction des traitements inhumains ou dégradants), 9 (liberté de religion) et 13 (droit à un recours effectif) de la convention de sauvegarde des droits de l’homme. (lire l’article de l’AFP publié par l’Obs)
- Lire aussi : La France condamnée par la justice européenne après des abus sexuels subis par une enfant placée en famille d’accueil | France Info (cet article est bien plus complet que celui de l’AFP)
Les assistés de la France d’en haut
Ne manquez pas ce point de vue rédigé à deux mains par Noam Leandri et Louis Maurin, de l’Observatoire des inégalités. Que nous disent-ils ? D’abord que la France est un pays d’assistés, et que c’est une bonne chose. Ils précisent aussitôt que les plus riches profitent largement de notre modèle social ainsi que de soutiens privés. C’est pourquoi la leçon d’assistanat qu’ils donnent aux plus modestes est moralement inacceptable et politiquement dangereuse.
Alors que les minima sociaux font vivre 6,9 millions de personnes ( soit 10 % de la population ), nos concitoyens les plus riches bénéficient d’importantes aides ciblées. C’est le cas par exemple des très nombreuses réductions d’impôts (aussi appelées « niches fiscales »). Elles ont coûté en 2021 la bagatelle de 86 milliards d’euros à la collectivité en pertes de recettes. Le recours aux femmes de ménage et autres personnels à domicile par exemple est largement subventionné. En 2021, à elle seule, cette niche fiscale correspond à 3,8 milliards d’euros de recettes à l’État ! L’équivalent de ce que coûterait un minimum social à destination des jeunes de 18 à 24 ans qui en demeurent exclus aujourd’hui.
Plus vous gagnez, plus un enfant réduit votre impôt. 30 milliards d’euros sont ainsi distribués et la moitié des gains est concentrée sur le quart des ménages les plus aisés. L’avantage se monte à 1.567 euros annuels par enfant à partir de 5 000 euros de revenus mensuels pour un couple, l’équivalent de trois mois de RSA. En revanche, une famille d’allocataires des minima sociaux, non imposable par définition, ne verra jamais la couleur d’un tel avantage.
En plus des niches fiscales, une grande partie des services publics financés par la collectivité bénéficient davantage aux riches qu’aux pauvres. L’exemple de l’école est révélateur : compte tenu des inégalités sociales qui existent dans l’enseignement supérieur, l’État dépense bien davantage pour les enfants de cadres supérieurs, qui font beaucoup plus souvent des longues études, que pour ceux d’ouvriers. Selon les estimations à partir des données du ministère de l’Éducation, un jeune qui quitte l’école à 16 ans aura coûté environ 100.000 euros à la collectivité, celui qui va jusqu’au bac pro, environ 130.000 euros. Mais un élève d’une grande école coûte au minimum 200.000 euros. Ceux qui passent par l’ENA sont des élèves, quasiment tous issus des familles les plus aisées du pays, sont même payés pour étudier.
Cet article vous apporte des arguments qui démontrent que ceux qui sont au finalement le plus assistés sont les plus aisés. Un argumentaire à contre-courant des théories de l’assistanat qui visent à stigmatiser les plus pauvres. L’histoire montre aussi que les « profiteurs » sont répartis dans tous les milieux de la société. (lire cette article bien argumenté de l’observatoire des inégalités)
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Vous êtes allé(e) au bout de cette revue de presse ? Bravo et merci ! Merci aussi à Michelle Flandre qui m’a aidé à la réaliser.
2 réponses
Précisions par rapport à l’article « RSA : des agents dédiés à l’accompagnement des allocataires agressés par un « groupuscule politique » | La Dépêche »
La presse a visiblement repris la version policière sans prêter attention à l’action du collectif (et en affabulant sur une prétendue « agression »)…
https://lundi.am/Travail-obligatoire-et-gratuit-pour-les-allocataires-du-RSA
Bonjour Didier, lecteur très régulier de ton blog, je viens de lire le numéro d’aujourdhui (07/11/2022). Excellente facture, horrible réalité. Qu’on se le dise ! Amitiés fortes, SK