Les 8 dimensions de la pauvreté : tout est lié, rien n’est figé.

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Vous connaissez sans doute les 3 dimensions de la pauvreté initialement définies par le sociologue Serge Paugam et son équipe de recherche. ( pauvreté intégrée, de marginalité, et celle issue d’un processus de disqualification). Une autre étude publiée en octobre 2019 présente d’autres aspects non contradictoires qui complètent cette analyse.

ATD Quart Monde, le Secours Catholique – Caritas France, l’Association des Centres Socio-Culturels des 3 cités de Poitiers et une enseignante – chercheuse de l’Institut Catholique de Paris sont à l’origine de ce travail sur les différentes dimensions de la pauvreté en France.

Cette recherche impliquant les personnes pauvres elles-mêmes, (c’est important, voire essentiel) définit huit dimensions de la pauvreté.

Tout est lié, rien n’est figé

Ce programme avait 3 objectifs déclarés. Il s’agissait de contribuer à

  • mieux comprendre la pauvreté en s’appuyant sur le savoir de ceux qui la vivent ;
  • mieux mesurer la pauvreté avec des indicateurs complémentaires aux indicateurs actuels qui sont centrés sur les aspects monétaires et matériels ;
  • à permettre de mettre en place de meilleures politiques publiques pour l’éradication de la pauvreté.

L’équipe de recherche a permis de croiser des savoirs. Elle était composée de  4 personnes ayant l’expérience de la pauvreté (apportant leur savoir du vécu) ; de 4 professionnels praticiens d’associations ou de structures d’accompagnement individuel et collectif (savoir d’action) ; et enfin de 4 personnes travaillant dans le domaine de la recherche sur la pauvreté, de disciplines différentes (savoir d’étude).

Vous pouvez télécharger les résultats de cette étude ici ou sur le site d’ATD Quart Monde

C’est une approche systémique qui a été favorisée, car en effet, la pauvreté est un phénomène individuel et sociétal complexe. Cette approche systémique (bien connues des travailleurs sociaux) consiste à prendre en compte simultanément l’ensemble des dimensions de la pauvreté  sans se focaliser sur une seule dimension (comme la dimension économique). Il s’agit aussi de considérer que les dimensions de la pauvreté sont liées entre elles, ou, si vous préférez, qu’elles ont une influence les unes sur les autres. C’est important à comprendre pour un travailleur social lorsqu’il intervient auprès d’une personne pauvre.

Cette étude nous confirme la nécessité d’une prise en compte globale (et non sectorielle) de la situation des personnes. En effet, 8 aspects ont été recensés par l’équipe de recherche. Ils sont liés les uns aux autres et ne peuvent ni ne devraient être analysés séparément.

Les 8 dimensions de la pauvreté

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(doc ATD Quart Monde)

Il y a (sans ordre de hiérarche) :

  • Les privations matérielles et de droits :  ce sont celles qui provoquent des ressources financières insuffisantes, de mauvaises conditions matérielles, et se traduisent par un accès difficile ou non-accès aux droits.
  • L’isolement :  avec la rupture de relations avec les proches : famille, amis et voisins. Sans ces relations les solidarités naturelles n’existent plus ou presque
  • La maltraitance sociale : elle correspond à la manière dont la société regarde et traite les personnes en situation de pauvreté. Par exemple, lorsqu’ils sont accusés d’être à la charge de la société, les allocataires du RSA sont victimes d’une maltraitance qui les enferme dans des clichés.
  • La maltraitance institutionnelle :  c’est la manière dont l’État et les institutions regardent, jugent et traitent les personnes en situation de pauvreté. Les décisions qui les concernent ne tiennent souvent pas compte de leurs réalités.
  • Les peurs et les souffrances : ce sont des émotions négatives provoquées par la pauvreté, mais aussi les maltraitances précédemment citées. C’est aussi ce que ressentent les personnes qui ont souvent honte de leurs situations et craignent par exemple que leurs enfants soient placés ou qu’ils soient surveillés.
  • La dégradation de la santé physique et mentale :  lorsque l’on est malade ou que l’on souffre de troubles psychiques ou psychiatriques, on multiplie le risque de devenir pauvre. Puis quand on est pauvre maladie et les effets négatifs portent aussi  sur la santé physique et mentale
  • Les contraintes de temps et d’espace : cela concerne  la manière de s’approprier son passé, son présent, son avenir et de s’y situer, mais aussi  et manière de s’approprier son lieu de vie et de s’y situer.
  • Compétences acquises et non reconnues : vivre dans la pauvreté conduit à développer des  savoirs et des compétences  pour survivre et résister à l’adversité. Or, ces savoirs sont ignorés comme s’ils n’existaient pas.

L’étude met aussi en avant  certains aspects positifs : Ainsi, les personnes en situation de pauvreté développent des compétences (détermination, résilience, persévérance…) en cherchant des solutions à leur situation. Il faut être solide pour subir des conditions de vie souvent très dégradées.

Si l’on respecte cette logique, on ne peut continuer à intervenir sur une seule dimension de la pauvreté (par exemple l’accès au droit tel le logement) sans tenir compte des autres dimensions. Or aujourd’hui les politiques publiques sont très sectorielles et ne relient pas entre elles les différents aspects tels qu’ils sont définis dans cette étude. Le travailleur social, tentera lui d’en tenir compte ce qui sera, s’il le fait une approche bien plus efficace et pertinente que ce qui se pratique aujourd’hui

photo : Pixabay lannyboy89

 

Texte initialement publié le 22 octobre 2019

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