Ça y est, c’est reparti pour une nouvelle période de confinement peut être un peu plus « soft » mais tout autant contraignante quand on est sans emploi, seul et sans réel réseau amical ou familial. La 1ère version du confinement de mars à mai 2020 nous avait surpris. Il avait fallu s’adapter et « bricoler » chacun de son côté en cherchant des solutions en réponse à des problèmes nouveaux. Il y a eu celles et ceux qui ont continué de travailler soit sur place soit en « distanciel », un nouveau terme que nous n’utilisions pas par le passé mais qui est vite entré dans les mœurs.
Aujourd’hui nous sommes un peu plus aguerri(e)s sans doute car nous savons devant quelles difficultés nous nous trouvons. L’humain agit avec expérience. Cela nous a par exemple valu la foule des grands jours vendredi et samedi dernier dans les magasins de bricolage (moins dans les jardineries, car l’hiver approche). Au delà des faits anecdotiques, Nous apprenons toujours des expériences passées. Or aujourd’hui, c’est la vie au « travail confiné » qui reprend son cours.
A quoi sommes nous confrontés ?
En matière de travail social, nous avons à apprendre de nos erreurs et regarder ce à quoi nous sommes confrontés. Jean Marie Bataille est pédagogue, enseignant et chercheur en animation socioculturelle. Dans un article il avait rappelé brièvement dans quelle situation se trouvaient les travailleurs sociaux lors du premier confinement.
Certaines institutions étaient dans le déni demandant à leurs salariés de venir accueillir le public, d’autres, au contraire, avaient tout fermé et demandaient à leurs agents de rester chez eux. Il y avait aussi eu cette troisième voix. celle des travailleurs sociaux inquièts du sort de leur public, souvent fragile, qui allait être coupé de tout pour un temps indéterminé.
Face la peur ou même l’inquiétude, les humains que nous sommes n’avons pas une multitude de réponses. Nous avons si l’on peut dire trois attitudes possibles : La première s’appelle le déni. Nous considérons alors que le problème posé n’en n’est pas un (regardez et écoutez un certains Donald Trump et sa vision de la pandémie). Autre possibilité : une incapacité à agir, en laissant filer les évènements. Nous sommes alors en quelques sorte paralysés et attendons que l’on décide pour nous. Enfin il y a une troisième attitude : il s’agit de faire face et d’agir en conséquence. C’est bien évidemment cette voie qui parait la plus efficace même si dans le brouhaha des décisions hiérarchiques nous sommes une nouvelle fois contraints à subir et à exécuter des ordres plutôt que de prendre des initiatives.
Prendre des initiatives et se faire entendre
Jean-Marie Bataille nous a aussi rappelé ce à quoi nous sommes confrontés professionnellement. De ce côté là rien de nouveau diront certains, beaucoup a été écrit sur ce sujet mais il est bon rappeler quelques réalités.
1- Certains professionnels se sont retrouvés isolés, sans véritablement pouvoir échanger avec leurs pairs. Seule la relation avec la hiérarchie avait valeur de positionnement. Les équipes se sont de fait trouvées fragmentées sans pouvoir mettre en œuvre ce que j’appelle une intelligence collective qui permet de mieux répondre à l’imprévu et permet d’explorer des réponses en fonction des situations nouvelles qui obligent à s’adapter. En effet on ne peut agir de la même façon lorsque l’on est face à une personne âgée désorientée, un jeunes qui s’énerve et tourne en rond ou encore une femme stressée par la violence qui se développe au sein de son foyer.
Nous sommes confrontés à des situations multiples, imprévues dont les issues sont incertaines. Or la force du travail social quand on le compare à des protocoles et des procédures, est justement qu’il sait trouver des réponses qui intègrent des données non prévues initialement.
Si l’on s’en tient à ces éléments il est nécessaire que pour ce second confinement les équipes de travail puissent rester en lien et coopérer comme elles le font en période normale. Comment ? Si on ne peut se réunir en présentiel nous savons aujourd’hui participer à des réunions en ligne qui permettent de traiter tel ou tel sujet. Ce n’est plus un problème même si nous savons qu’il faut aussi savoir prendre des précautions. Demandons la possibilité de nous réunir en ligne pour pouvoir mieux répondre à la demande sociale qui s’exprime sur le terrain.
2- Le 2ème problème est celui du maintien du lien avec les personnes accompagnées. Il nous faut absolument garder le contact en leur proposant des appels réguliers pour échanger ne serait-ce que quelques minutes et cela aussi souvent qu’elles peuvent le souhaiter. Ce n’est pas parce que nous sommes en télétravail que l’on ne peut cultiver ce lien si important pour permettre à chacun d’avancer. Déjà de nombreux travailleurs sociaux dont des assistantes sociales et conseillères en ESF des Départements et des CCAS ont pratiqué de la sorte, mais, il ne faut pas se le cacher, d’autres sont restés chez eux en attendant d’être appelés. Il ne s’est alors rien passé et les personnes accompagnées se sont retrouvées « dans la nature » sans contact aucun ce qui a été très regrettable pour ne pas dire plus.
Il nous faut accepter la nécessité d’aller vers les personnes même si nous avons le sentiment qu’elles ne demandent rien. Elles sauront dire alors si elles estiment que notre appel ou notre démarche est utile ou inutile. Il s’agit de faire vivre ce pourquoi nous sommes des travailleurs sociaux engagé(e)s faire vivre le « care »: c’est une réalité toute simple. Elle s’appuie sur le fait que des gens s’occupent d’autres gens, s’en soucient et veillent ainsi au fonctionnement ordinaire du monde. L’éthique du care affirme l’importance des soins et de l’attention portés aux autres, en particulier à ceux dont la vie et le bien-être dépendent d’une attention particulière. Et nous sommes bien placé(e) sur ce sujet quand on mesure combien les personnes accompagnées sont fragiles lors des changements et bouleversements sociaux.
3- Il nous faut aussi désormais savoir vivre et assumer ce confinement dans les lieux de soin et d’hébergement qui nécessitent la présence de travailleurs sociaux. Là aussi de nombreux professionnels peuvent parler d’expérience. Dans les maisons d’enfant à caractère social, dans les CHRS et autres lieux de vie, il nous faut renouer avec un présentiel nécessaire tout en expliquant encore une fois les gestes barrières la nécessité de se parler en étant à distance. Pour cela il nous faut trouver les moyens d’être testé pour continuer à pouvoir travailler sereinement.
Enfin il nous faut inventer des activités nouvelles en stimulant le faire ensemble et la recherche de solutions à des problèmes précis survenus justement à cause du confinement. Là aussi le travail d’équipe et de réflexivité est nécessaire. On ne peut pas passer à côté de ces temps d’échanges professionnels qui aujourd’hui doivent aussi associer les personnes hébergées.
« Apprendre du confinement »
La période confinement qui débute sera différente de celles que nous avons vécu il y a quelques mois. Vous y êtes mieux préparé. Et si ce n’est le cas, je vous invite à (re)découvrir les ateliers du confinement tels que les avaient proposé la Fédération des Acteurs de la Solidarité, et l’Association Nationale des Assistants de service social.
Les visionner aujourd’hui à la lumière de cette saison 2 du confinement sera utile pour tous…
Une réponse
Bonjour
Je rejoins certains au sujet que les usagers ne comprennent pas souvent qu’ en respectant les gestes barrières : on se protège mais on les protège aussi.