Enfants placés abusivement: « J’ai dû décrocher une fillette de sa mère », raconte une professionnelle
Bon, c’est du BFM-TV (avec RMC), mais c’est écouté par un large public. La chaine d’Infos donne la parole à Émilie, ancienne assistante sociale à l’Aide sociale à l’enfance de Haute-Savoie. Elle raconte avoir dû placer parfois abusivement certains enfants. Elle évoque aussi un métier sous-payé et un trop grand nombre de dossiers à gérer, ne permettant pas d’étudier correctement toutes les situations familiales.
Cette assistante sociale décrit un service composé de jeunes travailleurs sociaux âgés d’une vingtaine d’années, mal payés, sous pression d’une institution débordée, qui n’a pas le temps de traiter les dossiers. Un système qui conduit parfois à placer abusivement des enfants. « On a beaucoup de dossiers, on voit peu les situations, on est là pour placer, ce n’est pas assez poussé, on place à la volée. J’ai déjà vu des rapports exagérés pour arriver à des fins de placements », raconte Émilie qui en rajoute sans doute honnêtement sur sa propre situation. « Moi-même, je pense avoir fait du tort dans certaines situations. Je pense que si j’avais eu le recul à ce moment-là, le temps de me poser et pas 50.000 dossiers à rédiger derrière, peut-être que je me serais dit qu’avant de placer, il fallait investiguer un peu plus », dit-elle
RMC a sollicité le président du Département de Haute-Savoie, dont dépendait Émilie. Son président a répondu par écrit en une phrase : « Si quelqu’un a des faits à signaler, qu’il me les adresse ou les adresse au procureur de la République ». Car n’oublions pas que les décisions de placement relèvent de décisions de justice avec la possibilité pour les parents de se défendre et de prendre un avocat notamment.
Cette façon de donner du grain à moudre à « l’ASE bashing » peut heurter. En tout cas ce témoignage interroge beaucoup surtout quand l’assistante sociale dit « on est là pour placer » et que l’on « place à la volée ». C’est tout à fait nouveau et je demande à voir. Car c’est justement l’inverse qui est demandé. Certes, les conditions de travail sont mauvaises et dégradées, mais combien d’enfants protégés, voire même sauvés de familles maltraitantes ? Un fait ne vaut pas la généralité. À vouloir tout réduire, certains témoignages sont ensuite instrumentalisés. En tout cas, c’est bon pour l’audience et ceci explique aussi cela. (lire l’article de BFMTV)
lire aussi :
- « La protection de l’enfance s’enfonce dans la crise » | Le Média Social
- Référent de l’aide sociale à l’enfance | Département de Seine-et-Marne
Il était une fois le travail social. (Introduction)
Jonathan Chalier Rédacteur en chef adjoint de la revue Esprit, chargé de cours de philosophie à l’École polytechnique, nous présente le dernier numéro de la revue de ce mois d’octobre. Il est intitulé « Il était une fois le travail social ». Il nous rappelle d’abord le contexte qui avait précédé 2 numéros précédents sur ce même sujet : le numéro historique de la revue Esprit d’avril-mai 1972, « Pourquoi le travail social ? » dont le contenu, à mon avis discutable, était plutôt une critique politique du travail social. Nous étions considérés à l’époque comme des « représentant des normes, celles de la bourgeoisie. Point barre. Les professionnels étaient surtout critiqués pour leur fonction idéologique dite de « contrôle social ».
Puis est venu le numéro de mars-avril 1998, réalisé après l’apparition d’une situation de chômage de masse, qui avait modifié cette vision en posant la question « À quoi sert le travail social ? ». Ce qui était alors constaté était l’émergence des nouveaux métiers du social que sont la médiation dans les quartiers urbains et l’insertion. Un nouvel impératif était posé pour « sortir d’une crise du travail social » (déjà là). Il fallait ainsi allouer aux travailleurs sociaux un rôle de structuration d’une conscience collective. Ils pouvaient aussi assumer d’être pour une part des « portes paroles de « ceux d’en bas ». « Aux visions classiques de l’assistance et de la tutelle, se substituaient les notions de projets et de contrats. (Dont on sait aujourd’hui combien ils ont été galvaudés).
Aujourd’hui, le travail social est bien là, présent, mais toujours autant en crise, sinon plus. « La remise en cause néolibérale de la solidarité sociale prend désormais une forme nationale-populiste. » On le voit avec la condamnation de l’assistanat et la volonté d’exclure les étrangers de la protection sociale. Pourtant, « le travail social prend désormais mieux en considération la participation des usagers aux décisions qui les concernent ». (Comme si ce n’était pas le cas hier). Il me semble qu’il y a une confusion entre les politiques d’action sociales et le réel travail social, forcément divers et contradictoire dans ses pratiques. Mais là, il faudrait plus de temps et de place pour développer mon propos. Ce nouveau numéro de la revue Esprit a le mérite d’ouvrir un débat, même si une nouvelle fois certains « sachant » disqualifient nos pratiques, ou du moins les interrogent de façon très particulière. (lire l’article de la revue Esprit) (acheter le numéro « il était une fois le travail social »)
Justine, 1.630 € par mois : « Les métiers du social ne sont pas reconnus à leur juste valeur »
Le magazine en ligne Madmoizelle.com donne la parole à une assistante sociale – Justine – âgée de 28 ans qui travaille dans une association. Elle perçoit environ 1.450 € par mois, auxquels s’ajoute 180 € mensuels de prime Ségur. Elle loue un appartement de 25 m² à Lyon, à la Croix Rousse. Elle pose une question pour le moins pertinente : « Pourquoi la prime Ségur n’est-elle pas une augmentation de salaire ? « c’est une prime et non une augmentation de salaire : elle peut nous être enlevée » dit-elle.
Pour gérer ses revenus, Justine se fixe une limite « à la louche » : elle s’impose de ne pas dépenser plus de 150 € par semaine pour toutes les dépenses courantes. Depuis l’obtention de la prime, elle n’est plus à découvert à la fin du mois. Mais rappelle-t-elle, « Vu le niveau de responsabilités et de compétences nécessaires, je m’estime assez mal payée, surtout que mon métier est quand même difficile. De manière générale, je trouve que les métiers du social ne sont pas reconnus à leur juste valeur. 1 400 €, ce n’est vraiment pas beaucoup. »
Son quotidien professionnel a grandement façonné son rapport à l’argent. Elle s’en explique : « j’ai vu beaucoup de personnes se retrouver dans des situations financières compliquées, et ça m’a vaccinée. Et puis, comme je travaille beaucoup les questions de budget avec les personnes que j’accompagne, je dois être cohérente pour moi-même ! » La journaliste Aïda Djoupa entre aussi dans le détail de ses dépenses. Tout est compté, voire rationalisé, mais elle se permet des extras essentiels pour elle pour décompresser de son travail. (lire l’article de Madmoizelle.com)
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Vous êtes allé(e) au bout de cette revue de presse ? Bravo et merci ! Merci aussi à Michelle Flandre qui m’a aidé à la réaliser.
Photo de Andrea Piacquadio Pexels