Il m’avait été possible lors d’une rencontre avec plusieurs personnes d’un collectif d’allocataire du RSA d’échanger sur l’image qu’elles ont d’elles mêmes, des services sociaux et des associations auprès desquelles elles font appel. Voici un extrait de leur témoignage. Je profite de l’occasion pour les remercier de la confiance qu’elles m’avaient accordé. Les paroles recueillies sont entre «guillemets »
«Quand on est allocataire du RSA, on a une mauvaise image vis à vis des autres ». « c’est vrai qu’on ne se sent pas à l’aise » « automatiquement on est jugé et il faut tout le temps expliquer sa situation ». Cette mauvaise image semble « intériorisée » quoi que fasse l’intervenant social. Être dépendant du RSA est quelque chose qui ne se dit pas. « moi, les voisins dans le bourg, ils ne savent rien » Tant qu’on ne connaît pas vos ressources, vous êtes respecté. Si on sait que vous touchez le RSA, l’attitude change, rapidement on ne vous connaît plus, vous n’intéressez plus personne. « Je préfère aller au loin » dira une allocataire. « On est mal vu partout ». « J’en connais qui touchent le RSA, ils ne disent rien, ils se cachent » …/…
La violence subie par les attitudes et les mots peuvent aussi venir des plus proches et c’est d’autant plus douloureux : «moi, ce sont mes enfants qui me l’ont dit : Si tu as le RSA, c’est grâce à nos impôts. Leur message c’était : tu es bien capable d’aller travailler». Considérer que ceux qui touchent le RSA profitent du système est une idée bien ancrée. Cette incompréhension divise les familles. Dans cette situation, ce sont les enfants qui le reprochent à leur mère. Dans d’autres situations cela pourrait être l’inverse ou encore provoquer des disputes au sein d’une même fratrie.
Cette forte incompréhension se retrouve dans d’autres situations notamment lorsque les personnes sollicitent un logement social. « Quand j’ai dit que je préférais aller habiter dans un quartier particulier, l’élue m’a dit « mais enfin, estimez vous heureux qu’on vous propose quelque chose ! » « Elle ne m’a jamais regardé dans les yeux pendant tout le rendez vous » …/…
Les allocataires ne savaient pas que les professionnels lorsqu’ils parlent d’eux utilisent le terme « d’usagers ». La réaction est immédiate : « ça nous diminue encore plus » « mais on n’est pas usés !» comme si on était bon à jeter, « utiliser ce mot ça insiste sur le fait qu’on est dépendant » dira une personne. Je donne alors comme exemple le terme « usager » de la SNCF ou des services publics. Mais cela ne convainc pas. « Si je vais prendre le train, je l’ai choisi et je le paye. Nous, on n’a pas choisi d’être au RSA» Ce terme est même considéré comme le signe d’une situation socialement réprouvable « ça fait un peu comme si on voulait en profiter » précisera un membre du groupe. Au final le terme est rejeté. Il est préféré le terme d’ «allocataires » comme pour la CAF, « Nous sommes des humains » et au final sur proposition, c’est le terme de « personne » qui est retenu . Il est considéré comme étant celui qui est le plus correct et le plus simple à utiliser…
note : j’avais publié ce témoignage en 2015, il me semble encore d’actualité…
Photo: stephane « Stéphanie… » Prise le 15 novembre 2013 Certains droits réservés
Une réponse
je crois qu on a écrit un livre la dessus. » Changer le regard !