Un article du Guardian confirme la situation financière désastreuse des services sociaux anglo-saxons. Les enfants et les jeunes vulnérables ne reçoivent plus d’aide tant qu’il n’y a pas de crise majeure au sein de la famille. Cette réalité ne est pas une surprise pour les travailleurs sociaux de ces services. La « Charity Action for Children » a révélé que jusqu’à 140.000 enfants signalés dans les services sociaux en raison d’abus ou de négligence passent désormais à travers les mailles du système de protection en Angleterre.
Les mesures d’austérité ont entraîné des réductions drastiques des mesures de prévention des enfants et la diminution et l’arrêt d’un certain nombre de services. Cela se produit alors que le nombre les rapports suite aux signalements des enfants ont augmenté de plus de 60% au cours des cinq dernières années. Cela a un fort impact sur les professionnel en charge des évaluations et des accompagnement. En fait Neuf appels sur 10 à la cellule centrale de recueil des informations préoccupantes sont désormais considérés comme suffisamment graves pour se référer à la police ou aux services sociaux.
Pourquoi en est-il ainsi ? les journalistes du Guardian ont demandé à deux travailleurs sociaux de décrire ce qu’ils vivent sur le terrain.
Les enfants vulnérables glissent dans les mailles du filet précise ce travailleur social qui souhaite rester anonyme : « Il est inquiétant de constater combien le paysage des services sociaux a pu changer. Je vois maintenant des situations qui par le passé auraient été signalés par des services de prévention mais qui ne le sont plus. Ces services ne sont plus en capacité d’agir à cause des réductions de financement qu’ils subissent. Les professionnels se heurtent à d’énormes charges de travail. Cela signifie que les enfants vulnérables qui auraient dû être considéré comme justifiant un simple soutien éducatif ne le sont plus. Ils ne sont pris en charge qu’une fois que les choses se sont aggravées. Pire, parfois il n’y a aucun relais de protection.
Certaines des situations que j’accompagne auraient dues déjà être orientées à Sure Start (un service d’aide précoce), mais aujourd’hui, elles sont simplement signalées auprès des écoles et des médecins généralistes pour voir s’ils peuvent mettre en place une équipe autour de l’enfant. Personne ne souhaite déléguer aux enseignants et médecins ce travail, mais les coupes budgétaires ont affecté l’ensemble des réseaux professionnels. Nous sommes sous une telle pression que cela en devient ridicule, avec des prises en charge toujours croissantes couplées à l’élimination de nos propres réseaux de soutien. De plus, nous passons un temps inutile devant les ordinateurs car nous utilisons des systèmes informatiques périmés.
Graham Hennis, travailleur social indépendant, nord-ouest de l’Angleterre ajoute : « Je fais partie d’une équipe spécialisée d’aide précoce appelée Assertive Outreach qui a travaillé avec des adolescents à risque ayant des problèmes de santé mentale qui ne s’engagent pas ou ne respectent pas le système traditionnel d’éducation ni les services qui sont ouverts à tous les jeunes. Ils risquaient souvent de devenir sans abri et d’être confrontés à de multiples difficultés, par exemple en cas de problèmes avec la police ou avec les toxicomanies ».
« Nous avons aidé ces jeunes à se remettre en marche ce qui les empêchait d’être renvoyés. Mais l’équipe a été dissoute car elle coûte trop cher. Nous avons été absorbés par les services traditionnels et nous avons à répondre à toute situation, tout en continuant de poursuivre notre travail spécialisé ».
« Notre nombre d’accompagnements a grimpé d’une moyenne de 18 à 30, ce qui a signifié notre temps en face avec ces adolescents, passant de 70% de notre travail à moins de 50%. Nous avons été engorgés par le nombre de situations et les montagnes de paperasserie qui les accompagnent ».
« Je travaille toujours dans le nord-ouest et les problèmes auxquels mes collègues et moi faisons face ont empiré. Les mesures d’austérité telles que la taxe sur les chambres ont obligé les personnes qui se trouvaient, ou à proximité, à se déplacer plus loin. Par désespoir, ils se tournent vers des boissons et des drogues pour fuir ces pressions. »
« Nous savons que ce qui se passe et ce que cela produit mais les suppressions de financements, les problèmes liés au personnel inexpérimenté et la perte de services d’aide précoce signifient que nous ne pouvons pas empêcher que les situations se dégradent sans aucune intervention de l’État ce qui n’était pas le cas auparavant ».
Les associations professionnelles ont beau protester rien n’y fait à l’heure actuelle. Ainsi la BASW a récemment organisé une marche de protestation contre les mesures d’austérité.
Allons nous nous trouver rapidement dans la même situation en France ? Ne sommes nous pas déjà en train de subir des restrictions fortes sans vraiment les considérer comme telles ? Les services sociaux sont-ils en train de se dégrader à cause des réorganisations qui cachent des restrictions budgétaires. Il est fort possible que dans certains Départements ce soit déjà le cas même si nous ne somme pas dans ce niveau de difficulté. Si vous avez des témoignages à apporter, n’hésitez pas à partager vos commentaires à la suite de cet article.