Élections législatives : Ouf ! allons nous vers une nouvelle ère du compromis en politique ?

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Les élections législatives avec ce second tour des élections ont profondément modifié la perception des compromis politiques. Le résultat du vote des Français qui donne une majorité relative au Nouveau Front Populaire a créé une situation inédite. Aucun parti n’a obtenu de majorité absolue à l’Assemblée nationale. Cette configuration impose la nécessité d’une approche de la gouvernance, basée sur le dialogue et la négociation entre différentes forces politiques. Nos élus en sont-ils capables ? Les compromis sont-ils possibles sans que chacun considère qu’il s’agit de compromission ?

Avant d’aller plus loin sur ce sujet, comment vous dire aussi le soulagement de millions d’électeurs (dont le mien) ? Le vote des Français n’a pas permis au Rassemblement National d’appliquer son programme particulièrement inquiétant et inhumain.

Ceci dit, la période qui s’ouvre est loin d’être idyllique. Elle est même pleine d’incertitudes. Le journaliste Hugo Clément résume parfaitement le résultat de ce scrutin :

1- La gauche unie crée la surprise, en arrivant en tête en nombre de sièges.
2- Au sein de ce bloc de gauche, le rapport de force se rééquilibre en faveur du PS et d’EELV (96 députés à eux deux), au détriment de LFI (71 députés), qui ne représente plus la majorité des députés de gauche.
3- Le RN, moins haut qu’annoncé, progresse très fortement à l’Assemblée, en devenant le premier parti en nombre de sièges (126 députés), pour la première fois de son histoire. À noter que le RN et ses alliés réunissent plus de 10 millions de voix au second tour, loin devant le Nouveau Front Populaire (7 millions de voix) et le camp présidentiel (6,3 millions de voix).
4- Le camp présidentiel résiste mieux que prévu, mais recule très fortement, avec 159 députés (- 80 par rapport à l’Assemblée précédente).
5- Aucun bloc politique n’est en position de gouverner seul, ni en mesure d’appliquer son programme. Nous entrons dans l’inconnu.

Des compromis sont-ils possibles ?

Nous assistons à un changement de paradigme politique : L’absence de majorité claire devrait forcer les partis à reconsidérer leur approche du pouvoir. Dans notre modèle traditionnel de la 5ᵉ République, le parti présidentiel obtenait automatiquement une majorité à l’Assemblée. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Il lui faut composer avec d’autres forces devenues majoritaires. Ici le Nouveau Front Populaire.

Cette situation se rapproche davantage des systèmes politiques d’autres pays européens. De multiples gouvernements parviennent à voter des lois grâce à des coalitions. Dans certains pays à culture de compromis, cette pratique est fréquente. Les Pays-Bas, l’Allemagne, la Belgique, les pays scandinaves et le Luxembourg ont cette pratique que nous n’avons pas dans notre pays.

Il y a à mon sens urgence à pratiquer l’art du compromis : Face à cette nouvelle réalité, les hommes et femmes politiques doivent développer une culture de l’écoute, du dialogue entre républicains respectueux de la Constitution (ce que n’est pas le Rassemblement National qui souhaite la changer et s’attaque directement aux Droits de l’Homme).  Le dialogue est une pratique peu présente dans la tradition politique du pays. Il se fracasse souvent sur les logiques de parti.

La notion de compromis reste généralement mal perçue. Elle est associée à tort à une forme de compromission. Pourtant, le compromis représente un art essentiel de la démocratie, permettant de trouver des solutions communes malgré les divergences.

Un compromis se définit comme un accord obtenu par des concessions mutuelles entre différentes parties. Il implique que chacun accepte de renoncer à une partie de ses exigences pour parvenir à une entente. Loin d’être un signe de faiblesse, le compromis demande au contraire du courage politique pour dépasser les clivages au nom de l’intérêt général.

La culture politique française, marquée par une tradition jacobine et révolutionnaire, peine encore à valoriser cette pratique. Contrairement à d’autres pays européens habitués aux gouvernements de coalition, la France reste attachée à une vision plus conflictuelle et clivante de la politique.

Les conditions de la réussite

Toutes les formations politiques républicaines font face à une question d’importance : est-il possible d’engager un changement de mentalité et l’apprentissage de nouvelles méthodes de travail et de négociation. Différentes en tout cas de celles qui ont jusqu’ici prévalu où celui qui a la majorité gouverne seul contre tous. La gauche l’a montré en étant capable de s’unir malgré des divergences. Elle a su se mettre d’accord sur un programme.

Le compromis est un processus exigeant et de longue haleine : L’expérience d’autres pays, comme l’Allemagne, montre que sa construction durable nécessite du temps et des efforts considérables.

Cela implique des négociations approfondies. Cela implique aussi que les responsables politiques se parlent et aient à minima une relation de confiance, ce qui est loin d’être évident. Cela conduit à élaborer de contrats de coalition détaillés.

Au-delà les problèmes de personnes, c’est une condition pour une stabilité gouvernementale. Cette nouvelle configuration pose la question de la capacité de notre système politique à s’adapter à une gouvernance plus « collaborative ». Les partis doivent trouver un équilibre entre la défense de leurs positions et la nécessité de trouver des accords pour faire avancer les dossiers importants.

En travail social, les professionnels savent gérer l’art du compromis. Ils savent que dans de nombreuses situations, il n’y a aucune solution satisfaisante, mais des solutions possibles avec des avantages et des inconvénients.

Qu’est-ce qu’un bon compromis  ?

Un bon compromis est un accord qui permet à toutes les parties impliquées de trouver une satisfaction partielle de leurs intérêts et de leurs besoins, tout en maintenant leurs valeurs fondamentales intactes. Il ne s’agit pas simplement de céder ou de faire des concessions, mais de parvenir à une solution équilibrée et équitable qui respecte les positions et les préoccupations de chacun.

Un bon compromis est loin d’être une simple capitulation ou un renoncement. Il se révèle être un exercice subtil d’équilibriste politique. Il repose avant tout sur un socle de respect mutuel et d’écoute active. Les parties prenantes doivent être capables de se comprendre, de reconnaître la légitimité des positions adverses, même lorsqu’elles divergent profondément des leurs.

C’est dans cet espace de dialogue ouvert que peuvent émerger des solutions innovantes, dépassant les postures figées. L’équité et l’équilibre sont au cœur de tout compromis digne de ce nom. Il ne s’agit pas de faire triompher un camp sur l’autre, mais de trouver un terrain d’entente où chacun peut se retrouver.

Les concessions doivent être partagées, les efforts mutuels. Un compromis qui laisserait un goût amer à l’une des parties serait voué à l’échec, alimentant rancœurs et frustrations futures.

Cependant, un bon compromis ne signifie pas l’abandon de ses valeurs fondamentales. Au contraire, il doit permettre de les préserver tout en trouvant des points de convergence. C’est là tout l’art de la négociation politique : savoir jusqu’où aller dans les concessions sans franchir ses lignes rouges éthiques ou idéologiques.

Un compromis qui forcerait une partie à renier ses principes essentiels ne serait plus un compromis, mais une compromission. La transparence et la clarté sont également des éléments clés d’un accord réussi. Les termes du compromis doivent être explicites, compréhensibles par tous.

Rien ne mine plus la confiance qu’un accord aux contours flous, laissant place aux interprétations divergentes. C’est par la clarté des engagements pris que se construit la confiance nécessaire à toute collaboration politique durable. Un bon compromis ne se contente pas de résoudre une situation de blocage à court terme.

Il doit être pensé dans la durée, capable de résister aux aléas et aux évolutions du contexte politique. C’est un édifice solide, bâti sur des fondations communes, plutôt qu’un fragile château de cartes susceptible de s’effondrer au moindre coup de vent. Enfin, et c’est peut-être là le critère le plus important, un bon compromis doit servir l’intérêt général.

Il transcende les intérêts particuliers ou partisans pour viser le bien commun. C’est ce qui lui confère sa légitimité et son acceptabilité auprès des citoyens, souvent las des querelles politiciennes stériles. C’est pourquoi on ne peut que souhaiter à nos élus de parvenir à trouver des compromis pour gouverner sans tomber dans la compromission. Pour tout dire, la marge est étroite et c’est une voie peu facile.

Les semaines à venir vont nous montrer ce qu’il peut en être à ce sujet. Cela risque de rebattre les cartes. Les attentes sont importantes, la responsabilité est immense.

Qu’en pensez-vous ?

En conclusion, les élections législatives ont ouvert une nouvelle ère politique marquée par la nécessité de dialogue et de compromis entre les différentes forces politiques. Cette situation, bien que complexe, offre une opportunité de renouveler notre démocratie et de la rendre plus participative.

Les compromis sont non seulement possibles, mais aussi souhaitables. Ils garantissent une gouvernance plus stable et efficace au service de l’intérêt général. Peut-être est-il est temps d’engager un changement de mentalité et de pratiquer l’art du compromis, en valorisant l’écoute et le respect mutuel.

Et vous, qu’en pensez-vous ? Êtes-vous prêts à encourager nos élus à trouver des solutions communes et à dépasser les clivages partisans ? Ou préférez-vous un rapport de force qui ne se négocie pas ? ou autre chose encore ?  La démocratie est l’affaire de tous, et chacun a un rôle à jouer pour la faire progresser.

 


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