C’est vrai, pour une part : les minimas sociaux deviennent « incompréhensibles » quand on souhaite en connaitre le montant exact selon la situation des allocataires de prestations sociales. Cela fait dire à l’institut Montaigne que le système actuel est illisible et qu’il serait plus efficace avec le numérique : « le système de protection sociale peut apparaître comme un fardeau, source de complexité administrative et de découragement pour les assurés. Il cite deux exemples, quatre ménages éligibles sur dix pour le RSA socle ne demandent pas son versement, ils sont trois sur dix pour les allocations familiales. Le système ne remplit pas son rôle social pour des raisons de mauvais fonctionnement interne. L’Institut Montaigne, (réputé libéral pour ne pas dire plus), se situe pourtant dans l’optique du service aux usagers et souligne que le numérique est un outil et non une fin en soi ».
Cela fait dire au journal Le Figaro que Des élus veulent tester une fusion des minima sociaux : « L’Institut Montaigne ainsi que treize présidents de département, à majorité de gauche, défendent une refondation des minima sociaux, par une «allocation unique de Sécurité sociale» ou un « revenu de base » précise ce journal qui rapproche et mélange allègrement 2 idées qui ne sont pas de même nature. Ce n’est pas l’institut Montaigne qui porte l’idée des élus des Départements tous marqués à gauche mais l’Institut des Politiques Publiques : ce n’est pas la même chose.
Nous avons pourtant d’un coté, plutôt à droite, l’Institut Montaigne qui est pour un regroupement de la gestion des prestations. Il propose de profiter du développement du numérique pour simplifier le système de protection sociale et verser une allocation unique en faisant au passage des économies substantielles. On peut voir ce que cela provoque en Angleterre avec la mise en place de logiciels automatisés qui s’appuie sur la technologie Blockchain : « Les demandeurs utilisent une application sur leur téléphone et reçoivent leurs paiements de prestations. Avec leur consentement, leurs transactions sont enregistrées sur un registre. » Cela fonctionnerait aussi bien pour les remboursements de soins que pour le versement des prestations sociales. Cela n’est pas sans conséquences. De grands groupes sont sur les rangs pour développer ce type de technologie.
De l’autre la vision des élus départementaux de gauche sous l’égide de la Fondation Jean-Jaurès, proche du PS, défendent une expérimentation d’une «allocation unique de Sécurité sociale» dans leur territoire en 2019. Ainsi Ouest France pose la question : « Un revenu de base à 545 € bientôt expérimenté en Ille et Vilaine ?« . En effet « les présidents de 13 départements (1) estiment que « le revenu de base » peut pallier les « limites » du Revenu de solidarité active (RSA), versé aux personnes sans ressources, qui n’a « pas résolu les problèmes de pauvreté ». Une simulation par l’Institut des politiques publiques sera lancée dans les prochaines semaines. Le montant retenu n’a pas été arrêté mais devrait être « au moins égal au montant actuel du RSA », soit 545 euros, a précisé Antoine Bozio, président de cet institut ».
Toutes les explications sur ce projet d’expérimentation sont données sur le site de ce Conseil Départemental : » Ce jeudi 29 mars, 13 Départements se sont réunis à la Fondation Jean-Jaurès à Paris pour approfondir la réflexion sur leur volonté d’expérimenter le revenu de base sur leurs territoires. Pour recueillir l’opinion des citoyens sur le sujet, les Départements engagent des modes de consultation variés, comme le recours à des panels citoyens. Ils lancent une enquête sur internet à l’adresse http://monavissurlerevenudebase.fr à renseigner jusqu’au 31 mai 2018. Cette enquête vise à faire participer les citoyens sur des points clés qui conditionneront l’expérimentation, tout en présentant pour chaque item les enjeux du revenu de base. Les internautes sont invités à se positionner, par exemple, sur la pertinence d’ouvrir ce dispositif aux jeunes qui n’ont pas aujourd’hui droit au RSA et dont le taux de pauvreté avoisine les 24%, sur le montant de ce revenu, sur les allocations à fondre dans le dispositif ou sur les conditions d’accès (obligation de recherche d’emploi, notamment). Les enseignements tirés de ce questionnaire permettront aux Départements volontaires de mieux cerner les attentes de leurs concitoyens. Ces retours les aideront à définir le modèle de revenu de base à expérimenter. Les résultats de l’enquête seront présentés lors d’un grand colloque à Bordeaux le 7 juin 2018. Une fois le cadre d’expérimentation posé, les Départements volontaires et la Fondation Jean-Jaurès pourront soumettre aux parlementaires une proposition de loi pour pouvoir lancer le test grandeur nature.
Enfin terminons ce tour d’horizon avec un sujet très proche : celui de la fusion des prestations familiales. Dans une tribune publiée sur son blog Médiapart, Yves Faucoup dénonce une « hypocrisie de la Droite » qui défend le système du quotient familial en matière de prestations familiales. En fait nous précise-t-il ce quotient profite aux catégories sociales « supérieures » ou si vous préférez les classes aisées. Qui défend ce quotient ? « Ce qui est cocasse, » écrit-il, « c’est que parmi les défenseurs de ce quotient familial, on rencontre des opposants farouches à l’assistanat, ne se privant pas d’humilier en permanence dans leurs déclarations tonitruantes ceux qui sont condamnés à vivre de l’assistance. Or certains d’entre eux bénéficient ainsi des pouvoirs publics, d’une aide bien supérieure à celle que perçoit un individu sans emploi ».
Yves Faucoup rappelle que Ce système du quotient familial est injuste, il accroît les inégalités. C’est une niche fiscale qui ne dit pas son nom. « La justice sociale voudrait qu’il soit supprimé, et les sommes ainsi récupérées reversées dans le pot commun des allocations familiales qui seraient ainsi grandement augmentées. Et versées, dès le premier enfant, à tous sans réduction, en fonction des revenus ». L’ancien directeur d’action sociale qui connait son sujet conclut son article avec une série de propositions que nombre d’entre-nous trouverons de bon sens.
Mais le bon sens en matière de justice sociale est-il encore d’actualité ? C’est la question pour laquelle je n’ai pas trouvé de réponse.
(1) ces 13 départements sont l’Ardèche, l’Ariège, l’Aude, la Dordogne, le Gers, la Haute-Garonne, l’Ille-et-Vilaine, les Landes, le Lot-et-Garonne, la Meurthe-et-Moselle, la Nièvre, et la Seine-Saint-Denis
Photo : Euros by TaxRebate.org.uk