Comprendre les processus de radicalisation : Une formation pour les travailleurs sociaux

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Alors que l’assemblée plénière du Haut Conseil du Travail Social  vient de voter un projet d’avis  « Le travail social confronté aux dérives radicales » (j’y reviendrai),l’ARIFTS, le Centre de formation des travailleurs sociaux des Pays de la Loire propose une formation nommée : « Comprendre les processus de radicalisation : posture, positionnement et limites des professionnels ».  Le promoteur de ce projet formateur à l’ARIFTS  a beaucoup œuvré pour construire ce programme. Il a par exemple rencontré les représentants du CIPDR Le Comité Interministériel de Prévention de la Délinquance et de la radicalisation pour présenter ce plan de formation qui a reçu un accueil positif.

J’ai pu lui poser 3 questions, il nous en dit un peu plus…

Comment est née cette formation ?

Cette formation est née suite à une rencontre avec l’ex-directeur du « Centre de réinsertion et de citoyenneté » (CPIC) de Pontourny situé à Beaumont-en-Véron (37). Ce centre avait pour mission l’accueil de jeunes de 18-30 ans en début de processus de radicalisation (nouveau terme employé au lieu d’en voie de radicalisation). Sous l’impulsion du préfet Pierre N’Gahane, secrétaire général du comité interministériel de prévention de la délinquance et du Premier ministre de l’époque, Manuel Valls, ce centre a ouvert ses portes en septembre 2016 avec une capacité de 25 places encadrées par environ 30 professionnels (éducateurs spécialisés, maîtresses de maison, psychologues, etc.)

Lors de l’entretien, l’ancien directeur du CPIC nous a fait part des difficultés rencontrées par les professionnels pour accompagner un public aux caractéristiques particulières. En effet, les menaces, la crainte de l’attentat, les risques de violences pulsionnelles, des représailles djihadistes liées à la fanatisation ont fortement troublé l’équipe au point de générer d’importants impacts psychologiques chez certains salariés : 12 sur 30 ont démissionné dés les trois premiers mois d’ouverture, deux personnes sont passées par un soutien en psychiatrie.

Comment  avez-vous construit cette formation ? Avec qui ?

Il a été nécessaire de restreindre l’équipe autour de personnes compétentes et expertes à la fois sur le sujet et sur la mise en forme du projet. Le service a fait appel bien évidemment à l’ancien directeur du CPIC, ainsi qu’à un ancien chef de service de cette structure,  d’un formateur du site nantais de l’ARIFTS, spécialiste des questions portant sur la laïcité et le fait religieux. L’équipe s’est renforcée avec la présence d’une assistante de formation dont la mission était à la fois d’optimiser le temps dans la construction des documents nécessaires à la présentation du dossier, mais surtout de porter un regard « candide » sur cette thématique au combien difficile à cerner pour un public non averti.

Les interactions constructives, la liberté de parole, la conflictualité et la place du doute se sont avérées efficaces dans la production à la fois de la réflexion, mais surtout de la concrétisation en modules de formation, référentiels et argumentaire. La présence ponctuelle de deux partenaires spécialistes de l’accompagnement des personnes en voie de radicalisation a donné l’occasion d’affiner le projet sur le contenu et les intervenants nécessaires.

Que peut-elle apporter au travailleur social qui la suit ?

Les travailleurs sociaux sont confrontés à de réelles difficultés (le fait religieux, le refus des principes républicains, les menaces des personnes fanatisées en direction des professionnels, etc.). Face à ces nouvelles problématiques qui, à l’évidence, ne sont pas abordées au cours de leur formation, ils peinent à trouver la posture ajustée afin d’accompagner ces jeunes et familles en voie de radicalisation. Au vu du contexte, Il nous est apparu indispensable d’apporter aux professionnels et notamment les travailleurs sociaux un espace de formation susceptible de les aider à répondre à ces nouveaux enjeux.

Cette formation certifiante non diplômante se décline en 4 modules de 140 heures. Une première session s’étendra du 5 novembre 2018 au 8 février 2019.

le premier module est une approche générale du processus de l’embrigadement . Les compétences recherchées  visent à identifier les mécanismes et processus généraux de l’embrigadement,   à comprendre les différents registres de l’embrigadement qui existent et enfin comprendre en quoi le djihadisme est un processus d’embrigadement spécifique.

Le second module traite du  djihadisme comme forme de radicalisation violente. 8 points distincts sont abordés avec notamment savoir définir le processus de radicalisation violent, discerner islam et islamisme, comprendre l’histoire et la pensée de l’islam en identifiant ses différents courants de  pensée, connaitre  le contexte d’implantation de l’islamisme en France. Repérer les conditions de réception du discours islamiste et comprendre le travail des « rabatteurs » et enfin identifier les critères de basculement vers le djihadisme

Le troisième module aborde ce qui compose l’univers du djihadiste : Il doit permettre d’évaluer les modifications identitaires, d’analyser et comprendre l’influence des acteurs situés en périphérie et enfin tenter d’appréhender le mode de vie des personnes radicalisées.

Enfin le quatrième et dernier module traite du rôles et des positionnements des professionnels face au djihadisme.  Il vise à permettre au stagiaire de savoir identifier les différents dispositifs publics qui existent,  savoir accompagner et soutenir les familles et l’entourage en amont, pendant et en aval mais aussi savoir se protéger d’une éventuelle agression pour cela il lui faut savoir adapter sa posture éducative face à un public djihadiste en ajustant son travail de distanciation et en déconstruisant sa posture.

Il y a beaucoup de choses à dire sur toutes ces questions…

Oui bien sûr, cette formation est ouverte à tous les professionnels des secteurs confrontés à la problématique de la radicalisation djihadiste. Les candidats font toutefois l’objet d’une sélection sur dossier puis d’un entretien. Si vous souhaitez des précisions, pour tout contact nous mettons une adresse mail à disposition : cpr[@]arifts.fr  ( enlever les crochets [ et ] pour envoyer votre message)

Vous pouvez ici télécharger la plaquette de cette formation

 

Note : bien qu’étant administrateur de l’ARIFTS, ce qui m’a permis de connaitre en détail l’existence de cette formation, je n’a aucun intérêt personnel ni pécunier dans ce projet. Je me permets de le préciser afin d’éviter toute éventuelle interrogation sur ce sujet…

 

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