Simone Veil nous a quitté hier. Cette grande dame a marqué plusieurs de nos collègues, j’en veux pour preuve le témoignage de Christian Chassériaud et celui de Yves Faucoup qui ont fait part sur les réseaux sociaux de leur souvenirs de rencontre avec celle qui fut ministre des affaires sociales.
Christian Chassériaud se souvient : « en 1993, Simone Veil qui était ministre des Affaires Sociales, de la Santé et de la Ville m’avait demandé un rapport sur les personnes en grande difficulté en France. Je lui ai remis ce rapport en novembre 1993 – « la grande exclusion sociale en France – Questions liées à l’insertion des publics en grande difficulté sociale« . Les quelques moments que j’ai passé avec Simone Veil pour ce rapport sont des moments que je qualifierai de « moments forts ». Ce rapport consistait à réfléchir à des solutions en direction des hommes et des femmes de la rue, en grande difficulté et vivant au quotidien l’exclusion sociale ».
« J’ai trouvé auprès de Simone Veil une ministre d’État extrêmement attentive au devenir social des plus pauvres, des plus démunis, des plus fragiles. J’ai ressenti chez elle un très grand respect de ces personnes souvent rejetées par les administrations et par la société. Tout particulièrement, elle était très attentive à la réalité de vie des femmes de la rue. Elle voulait que l’État ne laisse pas tomber ces populations souvent marginalisées ».
« Pour moi, elle a été une grande ministre des affaires sociales, attentive à toutes les formes de souffrance sociale. C’était une grande dame qui a transformé la condition de beaucoup de femmes avec la loi sur l’IVG. Elle avait un sens du service de l’État. Je sais qu’elle a utilisé des propositions du rapport sur la « grande exclusion sociale » pour les intégrer dans les politiques sociales de l’État.. Merci, Simone Veil, pour cette grande attention dont vous avez fait part concernant le sort de nos concitoyens les plus exclus et les plus pauvres ». Christian Chassériaud.
Yves Faucoup a lui aussi réagi face à cette disparition. Sa réaction mérite que l’on en prenne connaissance : « Tout le monde va récupérer Simone Veil » écrit-il « On évoque son combat pour l’interruption volontaire de grossesse : en réalité, on se garde de dire qu’en tant que magistrate, elle était prévue par Giscard pour être ministre de la Justice. Mais un leader centriste, nommé Jean Lecanuet, fit son caca nerveux et exigea d’avoir, lui, ce ministère glorieux. Donc, cette femme se retrouva à la tête d’un ministère, à l’époque, de seconde zone, celui de la santé et du social, qui n’était pas son domaine de compétence. Et lorsque Giscard voulut autoriser l’IVG, il demanda à Lecanuet de préparer la loi en tant que ministre de la Justice, mais ce dernier refusa, il ne voulait pas salir son image. Alors Simone Veil s’y coltina. Aujourd’hui, tout le monde connaît Simone Veil, personne ne se souvient de Lecanuet ».
« On rappelle sa déportation, avec des confusions comme cette militante féministe de Toulouse qui, sur France Inter disait aujourd’hui (hier) à 13 h, qu’elle avait été résistante et déportée pour cette raison. Non, elle a été déportée à 15 ans (à Auschwitz-Birkenau) non pour ce qu’elle avait fait, mais pour ce qu’elle était : juive ».
« Évidemment, si je l’admire pour son combat pour l’IVG et pour sa posture décalée par rapport à tant d’hommes politiques, je ne partage pas une partie de ses choix, en particulier d’avoir soutenu Nicolas Sarkozy. Mais je peux témoigner pour l’avoir rencontrée dans les années 70 : elle était ministre de la Santé, et moi à la tête d’une délégation syndicale (CFDT) qui la rencontrait (à Vesoul, en Haute-Saône) à propos de l’hôpital public. Au terme de cet entretien qui dura peut-être une heure, nous fûmes estomaqués par sa connaissance du dossier : elle avait des documents devant elle, qu’elle ne consultait pas, mais manifestement elle savait précisément ce qu’ils contenaient. Lorsque j’entendais ensuite qu’au ministère c’était une bosseuse, exigeante, je n’avais pas de mal à le croire. C’est bien une grande dame qui nous a quitté. »
Je trouve que ces 2 témoignages, chacun à sa manière nous confirme combien Simone Veil fut une belle personne. Humaine, attentive aux autres et notamment les plus fragiles. Quoi que l’on pense de la politique qu’elle a pu mener par le passé, c’est bien cette mémoire là que j’ai envie d’honorer.
Avec tous mes remerciements à Christian et à Yves pour leurs témoignages.