Bonjour et bienvenue à cette revue de presse ! Aujourd’hui, nous abordons des sujets qui nous montrent encore une fois ce qui ne va pas dans notre société. Découvrez la face cachée de la rue avec un rapport sénatorial sur les femmes sans abri, souvent invisibilisées et victimes de violences. Nous explorerons également la mission impossible du 115, confronté à une demande croissante et des ressources insuffisantes. Enfin, nous examinerons la hausse continue du nombre d’allocataires des minima sociaux dans le pays à l’heure où les politiques fustigent les bénéficiaires des aides sociales. Vous allez aussi découvrir aussi de multiples liens dans le champ de la protection de l’enfance puis plus largement dans celui de l’action sociale. Bonne lecture !
« Femmes sans abri, la face cachée de la rue »
C’est un rapport sénatorial qui pourrait passer sous les radars. Il nous montre dans quelle détresse se trouvent les femmes sans abri, invisibilisées dans la rue et souvent victimes de violences. Elles sont 3000 avec autant d’enfants à dormir dans la rue chaque jour. Elles font face à des situations dramatiques Ce rapport a été rédigé par les sénatrices Agnès Evren, Marie-Laure Phinéra-Horth, Olivia Richard et Laurence Rossignol, au nom de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. Est-ce un hasard si aucun sénateur homme ne s’est saisi du sujet ?
On apprend dans ce rapport que le nombre de personnes sans domicile a doublé en dix ans, pour atteindre 330.000 en 2024, dont environ 120.000 femmes. Si la majorité est hébergée dans des lieux financés par l’État, certains hébergements d’urgence ne sont octroyés que pour quelques nuits et chaque semaine il faut quitter le lieu, repasser par la rue, parfois pendant plusieurs jours, avant de retrouver un nouvel abri. Ces femmes sont souvent victimes de violences physiques et sexuelles, tant dans leur parcours migratoire que dans leur vie quotidienne dans la rue. Le rapport met également en avant la diversité des profils de ces femmes, qui peuvent être des mères isolées, des migrantes ou souffrant de troubles psychiatriques sévères.
Parmi les principales recommandations du rapport figurent la nécessité d’améliorer l’offre d’hébergement pour répondre aux besoins spécifiques des femmes et familles sans abri. Il est proposé de créer 10.000 places d’hébergement supplémentaires et d’améliorer la qualité des structures existantes pour garantir un accueil digne et sécurisé. Le rapport insiste aussi sur l’importance de faciliter l’accès au logement social pour les femmes seules et les mères isolées, ainsi que sur le renforcement des dispositifs spécialisés d’accès direct au logement. Bref le rapport propose des évidences qui rappellent la responsabilité de l’État sur ce sujet.
Enfin, le rapport recommande de garantir un meilleur accès aux droits fondamentaux pour ces femmes, notamment en matière de santé et de protection contre les violences. Il est suggéré de renforcer la formation des travailleurs sociaux et d’améliorer la coordination entre les différents acteurs impliqués dans l’accompagnement des femmes sans domicile. Former les travailleurs sociaux ? Pour appeler le 115 qui ne répond plus et fixe des priorités sur l’âge des enfants susceptibles d’être hébergés ? Vraiment ? L’article suivant nous rappelle aussi une triste réalité sur ce sujet… (lire le rapport sénatorial) (lire sa synthèse)
Personnes à la rue : Mission de plus en plus impossible pour les associations qui portent le 115
Les structures en charge de l’accueil des personnes sans abri en France, notamment la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) et la Croix-Rouge française, ont récemment engagé une démarche face à la crise qui frappe les Services Intégrés d’Accueil et d’Orientation (SIAO) et le 115. Dans une lettre adressée à Valérie Létard, ministre du Logement et de la Rénovation urbaine, les présidents des deux organisations, Pascal Brice et Philippe Da Costa, expriment leur profonde inquiétude quant à l’avenir de ces services essentiels.
La lettre souligne la situation extrêmement dégradée des SIAO, qui peinent à remplir leur mission face à une demande croissante et des ressources insuffisantes. Les auteurs insistent sur le fait que les SIAO doivent pouvoir opérer dans un cadre qui respecte les principes d’inconditionnalité et d’équité. Or, les restrictions budgétaires actuelles et les critères d’accès de plus en plus stricts imposés par l’État remettent en question ces fondements. Les associations dénoncent une hiérarchisation des vulnérabilités qui va à l’encontre du droit fondamental à un accueil inconditionnel.
Dans leur lettre, les présidents de la FAS et de la Croix Rouge parlent aussi de l’épuisement des professionnels du secteur, notamment de ceux du 115. Ils sont confrontés à un afflux constant de demandes non satisfaites. Ils appellent à une révision urgente du cadre d’action pour permettre aux SIAO de fonctionner efficacement et de manière indépendante. Cette autonomie est cruciale pour rétablir un lien de confiance avec l’État et garantir que chaque personne dans le besoin puisse accéder à une solution d’hébergement adaptée.
Les présidents de la FAS et de la Croix-Rouge se disent prêts à collaborer avec la ministre pour trouver des solutions durables. Ils espèrent ainsi rétablir un environnement propice à la poursuite de leur mission de solidarité. Cette lettre incarne un appel pressant à l’action, soulignant l’urgence de répondre aux défis auxquels sont confrontés les services d’accueil dans notre pays. (lire le communiqué de la FAS) (lire la lettre ouverte à Vaérie Létard)
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Le nombre d’allocataires des minima sociaux poursuit sa hausse en 2023
Un article du journal Le Monde nous apprend que le nombre d’allocataires de minima sociaux en France a continué d’augmenter en 2023, atteignant 4,36 millions de personnes. Cette hausse, bien que modeste par rapport aux années précédentes, s’inscrit dans une tendance à la hausse amorcée après le pic de la crise sanitaire en 2020. En 2022, le nombre d’allocataires avait déjà progressé de 0,4 %, suivi d’une augmentation de 0,5 % en 2023. Ces chiffres ont été publiés dans le panorama annuel du service statistique des ministères sociaux fourni par la DREES. Il souligne l’importance croissante des aides sociales dans le contexte économique actuel. Alors que les politiques ne cessent de pourfendre les « bénéficiaires » des aides sociales, c’est ballot. Cela montre une croissance de la précarité, ou plutôt de la pauvreté que certains ne veulent pas voir.
Un des faits marquants de l’année 2023 est la réforme du calcul de l’allocation aux adultes handicapés (AAH). Il ne prend désormais en compte que les revenus du demandeur, excluant ceux du conjoint. Cette réforme a permis à 22.300 personnes supplémentaires en couple de bénéficier de cette aide, portant le nombre total d’allocataires à 1,35 million. La croissance des bénéficiaires de l’AAH a ainsi atteint un niveau record avec une augmentation de 4,5 %, la plus forte depuis douze ans.
Par ailleurs, le rapport de la Drees indique que le nombre de personnes recevant le minimum vieillesse a également augmenté de 4,6 % en 2023, atteignant 723.000 personnes. Cette augmentation s’explique par les plans de revalorisation mis en place depuis 2018. Cependant, une tendance inverse est observée pour le revenu de solidarité active (RSA), dont le nombre d’allocataires a diminué de 2 % pour atteindre 1,85 million fin 2023.
En incluant les conjoints et les enfants à charge, ce sont au total 6,9 millions de personnes qui étaient couvertes par les minima sociaux fin 2022. Cela représente environ une personne sur dix en France métropolitaine et trois sur dix dans les départements et régions d’outre-mer. En termes financiers, les dépenses liées aux minima sociaux ont atteint 30,6 milliards d’euros en 2022, soit une augmentation de 2 % par rapport à l’année précédente. Cependant, ajusté pour l’inflation, ce montant représente une baisse réelle de 3,1 %. (Lire l’article de l’AFP pour le Monde)
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- Minima sociaux et prestations : quels sont les grandes tendances ? | ASH
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Accompagnement, se mettre au diapason
Le magazine « papier » d’octobre des ASH vient de sortir. Il y a beaucoup à lire. Une enquête nous montre que les travailleurs sociaux savent souvent adapter leurs pratiques. Ce sujet est une façon de rendre visible divers aspects de l’accompagnement social, en explorant des thématiques qui intéresseront les professionnels du secteur. L’un des articles phares, « Comment mieux écouter la parole des usagers », met en avant l’importance de prêter une oreille attentive aux personnes accompagnées. Les éducateurs, sont parfois perçus comme distants par les personnes qu’ils rencontrent. Ils doivent surmonter des malentendus et certains stéréotypes pour établir un véritable dialogue. Cette approche nécessite de reconnaître et de réduire certaines injustices épistémiques, où les préjugés empêchent une écoute authentique. En Ile-de-France, la Fondation Falret illustre cette démarche en valorisant chaque parole dans le cadre de l’accompagnement des personnes souffrant de troubles psychiques.
Un autre article, « Croiser les savoirs pour (vraiment) lutter contre la précarité », souligne l’impact transformateur du croisement des savoirs entre professionnels, universitaires et personnes concernées. C’est un sujet bien connu avec cette méthode initiée par ATD Quart Monde. Dans les Pyrénées-Orientales, cette approche a modifié durablement les pratiques pédagogiques et professionnelles. Elle encourage un dialogue dans lequel chaque partie apprend des autres, favorisant ainsi une coconstruction des solutions face à la précarité.
Enfin, j’ai noté aussi cet interview d’Abdessalem Yahyaoui, formateur et psychologue clinicien. Il dispense des consultations d’ethnopsychologie, notamment dans le cadre de la protection de l’enfance. « Les professionnels, des passeurs et non des casseurs » dit-il. Évidemment ! (Certaines formules qui enfoncent de portes ouvertes peuvent être agaçantes). Il n’empêche que ce formateur aborde à mon sens un sujet essentiel : l’importance d’une approche interculturelle dans l’accompagnement des migrants. Les professionnels doivent naviguer entre différentes cultures sans imposer leurs propres modèles culturels. Il s’agit de comprendre et respecter les univers de représentation des personnes accompagnées tout en facilitant leur intégration dans le pays d’accueil. Cette démarche interculturelle est essentielle pour éviter les malentendus et permettre une collaboration fructueuse. (lire le numéro 3320 du mag des ASH – abonnés)
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Protection de l’enfance :
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Vous êtes allé(e) au bout de cette revue de presse ? Bravo et merci ! Merci aussi à Michelle Flandre qui m’a aidé à la réaliser
Photo d’illustration NewAfrica sur DepositPhotos