Jean-Christophe Combe est dorénavant ministre « des Solidarités, de l’Autonomie et des Personnes Handicapées ». C’est un ministère de plein exercice, ce qui est mieux que d’être rattaché à celui de la Santé. Il sera secondé par Geneviève Darrieussecq, qui a été nommée ministre déléguée aux personnes handicapées. Cette membre du MoDem était ancienne ministre des Anciens combattants lors du premier quinquennat. Jean-Christophe Combe est quant à lui considéré comme la troisième grande figure de la société civile au sein du gouvernement Borne II.
La culture de la performance et de la rentabilité
Diplômé de Sciences Po Paris, le nouveau ministre a commencé sa carrière en tant que conseiller technique au Sénat. Il fut ensuite directeur de cabinet de deux maires UMP et divers droite, (à Châlons-en-Champagne dans la Marne puis à Saint-Germain-en-Laye (dans les Yvelines). Mais il est surtout connu en tant que directeur général de la Croix Rouge Française, structure dont il connait depuis longtemps les rouages. Il en avait pris la direction générale il y a cinq ans. Avec un défi, précisait à l’époque le Figaro dans un article : « changer le modèle économique, avec désormais une culture de la performance et de la rentabilité ».
En 2019, deux journalistes du Figaro avaient épinglé les méthodes du président de la Croix Rouge Française dans un livre au vitriol intitulé « Charité bien ordonnée ». Yohan Blavignat, journaliste au Figaro et Bénédicte Poirier, journaliste reporter d’images, avaient ainsi révélé des méthodes contestables de gestion des ressources humaines et pour résumer assez calamiteuses. « Il y a un climat de méfiance et de peur qui s’est installé. Ce qui est symptomatique, c’est que les syndicats ne veulent même pas parler en leur nom. C’est assez rare. Ils ont peur des représailles » disait en 2019 le journaliste qui avait enquêté sur l’association. Il est même question dans ce livre « d’un « management par la terreur ». Problème, cela concerne aussi l’époque où Jean-Christophe Combe était en responsabilité.
Faire reculer les souffrances humaines sans avoir l’ambition de les faire disparaitre
Il faut espérer que ce temps est révolu pour l’ancien collaborateur du Président de la Croix Rouge. Pour autant, ses idées sont particulièrement compatibles avec le social business qu’il défend dans un livre qu’il a publié en 2019 intitulé « L’humanité ne se négocie pas ». Avec des termes dynamiques et très positifs, il explique que « le XXIe siècle doit voir advenir un autre rapport au monde, en partant de ses fragilités, et un modèle de société alternatif qui permette non pas de faire disparaître les souffrances humaines (et la Croix-Rouge) mais, avec la solidarité comme boussole et l’énergie du terrain comme moteur, de les faire reculer ».
« C’est à chacun de reprendre son destin en main » dit-il alors qu’il est interrogé en février dernier par le Laboratoire de la Mobilité Inclusive. Il « invite également les Français à décider du rôle qu’ils souhaitent jouer dans la construction d’un nouveau futur pour les générations à venir et à agir au présent avec volonté et détermination ». Dans cet interview, il développe trois propositions pour mieux affronter les crises :
- Première proposition, la préparation. Il faut que l’on soit préparé à faire face, dit-il. Il propose donc de créer une journée de préparation aux crises qui mobiliserait les écoles, les entreprises et les administrations…
- Deuxième proposition, valoriser l’engagement pour donner davantage encore envie aux jeunes de s’engager dans des actions de solidarité. Il est important pour lui d’initier les jeunes aux valeurs du droit international humanitaire en faisant entrer dans les écoles des cours de solidarité.
- Troisième proposition : développer la société du « prendre soin » et de la place des aidants, avec la nécessité de valoriser les carrières dans les secteurs du soin et de l’accompagnement, mais également de renforcer l’attention aux autres.
Lors de sa prise de fonction, il a notamment déclaré : « On est ici au ministère des vulnérabilités, je crois pour ma part que ces vulnérabilités sont une chance pour notre société. » Le journal Le Monde qui a relayé ses propos indique aussi que pour lui « Rien ne pourra se faire sans s’appuyer sur les personnes concernées ». Il a formulé une promesse d’écoute et de dialogue avec tous les acteurs du secteur, après avoir listé les « défis à relever ».
- Mieux concilier vie familiale et professionnelle,
- soutenir les parents isolés,
- lutter contre la pauvreté des enfants,
- permettre aux personnes âgées de mieux vieillir et de rester le plus longtemps possible chez elles. »
Il souhaite aussi que s’ouvrent de nouveaux lieux coopératifs associant les citoyens autour d’activités de l’économie sociale et solidaire répondant aux spécificités locales. Il faut pour lui « investir dans le lien social, cultiver la résilience et prendre soin les uns des autres. On ne peut qu’être d’accord avec cette proposition avec quelques réserves. Cette façon de voir la solidarité ne suffit pas. Elle reste parfaitement compatible avec une forme de désengagement de l’État fort peu pris en considération dans ses propos.
Pour l’instant, il n’y a pas de quoi susciter un espoir d’évolution de la politique sociale. Quant à la crise que connait le secteur professionnel, ce sera sans doute pour plus tard. Il n’est pas certain non plus que le nouveau ministre soit au fait de la perte d’attractivité des métiers du travail social, notamment de ceux qui sont au plus près de la population qui a besoin d’aide. C’est un sujet qu’il n’a, à ma connaissance, jamais abordé.
Photo : (capture d’écran) Le Cinquième Elément // Jean-Christophe Combe – Directeur Général @ la Croix-Rouge française s’exprime en 2020 sur les migrations, sécurité alimentaire, épidémies, catastrophes naturelles… Quelles conséquences le changement climatique va-t-il avoir sur nos sociétés ?