Covid-19 : une hausse de la pauvreté qui ne fait que commencer
La crise sociale est bien là en France, comme conséquence de la crise économique qui sévit. Les mois se suivent et apportent leur lot de statistiques effrayantes explique un reportage de Public Sénat. La semaine dernière, le Secours populaire a annoncé être venu en aide à près de 1,3 million de personnes pendant les deux mois du confinement. Parmi elles, 45 % étaient alors inconnus de l’association. En juillet, les banques alimentaires faisaient état d’une hausse de 20 à 30% de leurs distributions depuis le débat de la crise sanitaire.
L’Assemblée des Départements de France s’inquiète de la Hausse des demandes de RSA. Le versement du revenu de solidarité active (RSA) est à la hausse. L’Assemblée des départements de France (ADF) l’a relevée à partir d’un échantillon d’une quinzaine de départements : leurs dépenses pour le RSA ont augmenté de 9,2% en août 2020, par rapport à août 2019.
Guillaume Jacquot a interrogé Yannick Vaugrenard. Le sénateur socialiste de Loire Atlantique estime que le plan de relance de 100 milliards d’euros, fait l’impasse sur les plus précaires. Il soutient à fond les entreprises avec des allègements d’impôt très imporants (20 milliards d’euros sur deux ans de baisse des impôts de production), et n’accorde que 800 millions d’euros pour lutter contre les exclusion. « Il n’est pas suffisant, il ne va pas assez loin » dit-il.
Un peu partout les exécutifs départementaux s’inquiètent
« Nous nous attendons à un tsunami » a déclaré le président du département de l’Essonne qui constate l’augmentation du nombre d’allocataires. Interrogé par France Info François Durovray prévient que si rien n’est fait, les collectivités départementales risquent de devoir réduire leurs dépenses sur d’autres postes. « Que l’Etat assume vis-à-vis des départements la responsabilité qui est la sienne, de payer ce que nous versons au titre du RSA parce que s’il ne le fait pas, nous nous verrions contraints de couper dans notre budget avec des conséquences sociales et économiques qui seraient encore supérieures », prévient-il.
« les comptes liés aux solidarités sont extrêmement sensibles », souligne le Président du Département du Loir et Cher. Nicolas Perruchot interrogé sur France Info « En 2021, on aura des chômeurs de longue durée qui rentreront au RSA et ils vont sans doute être très nombreux ». Il rappelle que les départements vont perdre la taxe foncière qui entraient de façon importante dans leurs ressources. Il ne sera plus possible plus faire appel à l’impôt pour essayer d’équilibrer les comptes. Or il n’y a pas que le RSA en matière de solidarité. Les Départements gèrent aussi les prestations et allocations liées à l’autonomie, à la dépendance, aux personnes handicapées, et à la protection de l’enfance, « autant de secteurs où, malheureusement, il n’y a pas toujours de capacité à réguler les choses comme on aimerait » dit-il. Avec le Covid-19, le nombre de demandeurs du RSA grimpe aussi en flèche dans le Nord et le Pas-de-Calais.
Les présidents des Départements demandent un soutien significatif de l’État, mais Olivier Richefou président du Département de la Mayenne ne se fait pas d’illusion. « Sur ce dossier l’État, et qu’importe les gouvernements successifs, a toujours été absent. Cela fait 15 ans que les sommes versées par l’État n’ont pas bougé. Ce sont les départements qui ajoutent, ajoutent et ajoutent en permanence » déplore t-il. d’ailleurs, au mois de novembre, le conseil départemental de la Mayenne votera une dotation supplémentaire pour faire face à cette forte augmentation du nombre de bénéficiaires du RSA.
les associations sont face à un gouvernement absent
Déçues et inquiètes elles ont été reçues par le premier ministre vendredi 2 octobre. « Jean Castex a trouvé comme seule réponse de reprendre rendez-vous dans quinze jours, le 17 octobre, journée internationale pour l’élimination de la pauvreté » précise la Gazette des Communes. Certes, il a été à l’écoute et il est reconnu une aide d’urgenve au moment du confinement mais ce n’est pas suffisant loin de là
« Le gouvernement n’augmentera pas le RSA » annonce le journal Libération. » Matignon promet cependant des annonces «d’ici quinze jours» et s’intéresse à l’idée d’un «chèque relance» proposée par la CFDT ». Cela parait toutefois assez limité au regard des besoins exprimés
2 membres du collectif Alerte étaient hier matin invités de France Inter : Véronique Fayet, présidente du Secours Catholique, et Christophe Robert, sociologue, délégué général de la Fondation Abbé Pierre, Ils ont dénoncé une situation alarmante pour les plus précaires, à cause de la crise du Covid mais aussi des décisions depuis trois ans. « Les 5 à 7 % les plus pauvres, dans toutes les mesures sociales et fiscales de ce gouvernement avant la crise du Covid, ont vu leur pouvoir d’achat baisser. Tout le reste de la population a vu son pouvoir d’achat augmenter, mais au fil des 2 ans et demi de quinquennat, celui des 5 à 7 % a baissé. Il y a un recadrage du gouvernement après la crise des gilets jaunes, qui s’est réorienté vers des aides ou des fiscalités en baisse pour les classes moyennes inférieures, les catégories modestes. Mais les 5 à 7 %, les plus pauvres, ce sont les grands oubliés de ce quinquennat. » explique Christophe Robert
De son côté Véronique Fayet apparait aussi amère « Avec le Premier ministre, « j’ai eu le sentiment d’une écoute polie, mais de l’absence de dialogue et ça, ça fait mal quand même ! » « La stratégie de lutte contre la pauvreté est en miettes » « Il ne reste que des miettes pour les plus pauvres… »
Photo : capture d’écran du reportage de Public Sénat
La sélection des articles a été réalisée avec l’aide de Michelle Verrier Flandre
Une réponse
A lire sur le sujet de la pauvreté un article de Serge Paugam (entre autres), « Se sentir pauvre, un indicateur de l’insécurité sociale », dans le dernier numéro de la revue Revue française de sociologie, n° 2 de 2020, disponible sur Cairn