Violences conjugales : 208 000 victimes en 2021 dont 87% de femmes
La rédaction du site vie-publique.fr vient de publier des statistiques plutôt inquiétantes fournies par les services de police et de gendarmerie. On y apprend que les violences commises dans les couples par un(e) des partenaires ou ex-partenaires en 2021, a connu une augmentation de 21% par rapport à 2020. Ce sont ainsi 208.000 personnes qui en ont été victimes. L’évolution du nombre de victimes est en constante hausse depuis 2016 :
Les départements qui dénombrent le plus de femmes victimes pour 1.000 habitantes sont la Guyane, la Seine-Saint-Denis, le Nord, la Réunion, le Pas-de-Calais et le Lot-et-Garonne. Pour éviter tout malentendu et toute récupération, l’enquête précise que la majorité des hommes mis en cause sont des Français. L’étude du service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI), indique aussi que les auteurs mis en cause pour violences conjugales sexuelles sont nettement plus jeunes que les autres profils : 20% ont moins de 25 ans (leurs victimes sont aussi plus jeunes). Les mis en cause pour violences physiques ou pour violences psychologiques ou verbales sont proches : respectivement 13% et 10% ont moins de 25 ans.
Un tiers des victimes ont subi une violence verbale ou psychologique. Les violences sexuelles sont plus rares (4% des victimes). Dans 85% des cas, il s’agit d’un viol ou d’une tentative de viol. Il est à noter aussi que dans le contexte Metoo de libération de la parole et de mobilisation contre les violences faites aux femmes, la part des faits anciens (commis avant leur année d’enregistrement) passe de 18% à 2016 à 28% en 2021 (lire l’article de Vie Publique). (télécharger l’étude de décembre 2022 sur les violences conjugales.)
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L’obligation d’insertion un renversement de l’ordre des responsabilités
La Revue Esprit publie un entretien avec l’économiste Anne Eydoux dans son numéro de décembre. Elle explique que la « solidarité active » remet en cause la solidarité publique, en faisant peser sur les allocataires, notamment les femmes, la responsabilité du retour à l’emploi.
Le concept de solidarité active (RSA) s’est imposé au fil des ans, rappelle Anne Eydoux. Dès 2005, le concept avait été conçu par la commission Famille, vulnérabilités et pauvreté présidée par Martin Hirsch. La présidence de Nicolas Sarkozy a permis son déploiement en 2007 à la place du RMI, mais dans une autre philosophie. « La solidarité active a surtout constitué une remise en cause de la solidarité publique telle qu’on l’entendait jusqu’alors » dit-elle.
La solidarité active a abouti à un renversement de l’ordre des responsabilités : tandis que la réforme RMI affirmait la responsabilité de la collectivité, la réforme RSA affirme la responsabilité des allocataires, qu’il s’agit d’inciter à adopter le comportement attendu : rechercher un emploi et accepter l’emploi qui se présente, y compris précaire et à bas salaire. D’où l’inflation de discours politiques dénonçant l’« assistanat » comme « cancer de la société française » ou encore le « pognon de dingue » dépensé pour les minima sociaux, alors qu’il suffirait de « traverser la rue » pour trouver un emploi…
Il en fut de même pour le passage de l’API (allocation Parent Isolé) au RSA. Ce changement d’allocation est révélateur d’une évolution dans la manière de considérer la place des femmes dans la société, explique l’économiste. Dans les débats parlementaires de 1975, il n’est jamais fait mention du risque que l’allocation les décourage de travailler. Mais ces mères restaient précaires. L’API n’a pas été épargnée par les discours selon lesquels les allocations pouvaient constituer des pièges à pauvreté. Aujourd’hui ce sont ces mères seules qui sont considérées comme reponsables si elles ne s’inscrivent pas dans une démarche d’insertion. C’est ajouter une peine supplémentaire à cette population qui même en travaillant reste enfermée dans la pauvreté. Vous pouvez lire cet article très complet sur la mise en place du RSA en vous abonnant à la newsletter de la revue Esprit (lire l’article)
Métiers de l’humain : « Faudra-t-il des morts pour qu’on nous entende ? »
Le collectif des métiers de l’humain en danger ne sait plus que faire pour être entendu. La journaliste de Lille Actu Anne-Sophie Hourdeaux, a rencontré les membres du collectif. « Dans le social, le monde du handicap, les ehpads : salariés, usagers, direction alertent ». Problème de recrutement, inégalité de salaires, fuite de l’hôpital public… la journaliste fait le point de la situation dans le Nord et le Pas-de-Calais.
Il y a bien sûr la crise de recrutement dans les Ehpad et l’aide à domicile mais le domaine de l’aide à l’enfance est aussi concerné. Fabienne Lemaire, directrice adjointe de la Sauvegarde du Nord, est alarmiste : « Du côté de la protection, des placements d’enfants ne sont pas effectués, faute de structures et d’accompagnement possible. Faudra-t-il des morts pour qu’on nous entende ? » demande-t-elle. Elle pointe « des difficultés importantes de recrutement de professionnels dans tous les secteurs de l’aide à l’enfance. Qui conduit les enfants placés à l’école ? Qui les surveille la nuit ? La situation se dégrade pour les enfants, et nos professionnels sont en souffrance de ne pas pouvoir assurer leurs missions correctement. Quelle ambition on a pour les enfants ? »
Autre réalité, celle de la formation : l’institut régional de travail social) de Loos, qui forme les éducateurs spécialisés, fait un constat amer. L’IRTS a vu ses effectifs fondre depuis 2 ans : « En 2020, on avait 1900 candidats, on est tombé à 1400 en 2021 et à 950 en 2022 ! » Tous promettent de retourner dans la rue si la situation ne s’améliore pas. Des démarches ont été engagées en direction des élus… (lire l’article de Lille Actu)
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Protection de l’enfance : l’assistante sociale, espace de parole essentiel pour les enfants
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