Travail social en souffrance… par J.P. Rosenczveig / un guide pour aider les « sortant » de l’ASE / L’intérim pour les éducs spé ?

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Travail social en souffrance : dans et par-delà la « revalo »

L’ancien juge des enfants Jean-Pierre Rosenczveig nous propose une analyse intéressante de la « souffrance du travail social ». « Bien plus grave que des journées symboliques de défilés, on peut craindre une déshérence : des chaises vides » écrit-il. D’ores et déjà nombre de travailleurs sociaux quittent le champ pour se reconvertir ; les centres de formation ne débordent pas de candidatures. Très concrètement il est difficile de pourvoir les dizaines de milliers de postes vacants : nombre de services sont en mode fonctionnement réduit, certains devront fermer à bref délai…

JPRosen (comme il aime s’appeler) interroge les causes de ce « désamour » pour le travail social. Outre « l’oubli » du Ségur de la Santé, « il y a la charge de travail, mais surtout de responsabilisation est de plus en plus lourde pour une rémunération qui demeure loin du compte au regard de bien d’autres fonctions sociales. On assiste au même processus dans l’éducation nationale, dans l’hôpital, dans les services de police, et bien évidemment dans la justice, » écrit-il.

Il faut réagir et dépasser les constats. Jean-Pierre Rosenczveig estime qu’une mise à plat avec un diagnostic partagé s’impose d’urgence. « Des mandats clairs doivent être donnés et bien évidemment les moyens (personnels, matériel, budgets) dégagés. C’est ici comme ailleurs un vrai plan de rattrapage qu’il faut adopter et décliner ». En vérité, conclut-il « l’action sociale souffre d’un mal profond : elle n’est pas crédible. Ses résultats sont minorés donc négligés. Il lui revient déjà de tenter d’inverser cette image en rendant compte de ce qu’elle entreprend et de qu’elle réussit ». D’où une attente forte du rapport que doit remettre au printemps Mathieu Klein vice-président du Haut Conseil du Travail Social pour « revaloriser les métiers du social » (lire l’article de Jean-Pierre Rosenczveig)

 


Un guide pour « l’autonomisation des jeunes » sortant de l’ASE

Ce document est issu d’un groupe de travail de la Stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté.  Il apporte une méthodologie permettant aux professionnels, dans et hors Aide Sociale à l’Enfance, de cheminer avec le jeune en se posant une série de questions sur les domaines de la vie en autonomie. Il apporte également des pistes et des ressources pour bâtir une sortie positive du dispositif de prise en charge.

Cette méthode d’intervention a été construite en interrogeant jeunes issus de l’ASE (ADEPAPE et Repairs) . Le groupe a été piloté par Anne-Laure Minery, directrice adjointe des missions éducatives à la direction interrégionale Île-de-France et Outre-mer de la Protection judiciaire de la jeunesse et Jérôme Cacciaguera, directeur de l’URHAJ Île-de-France.

Un accent mis sur trois dimensions à travailler avec le jeune.  Le premier vise à lui permettre d’être acteur, de faire des choix et de pouvoir décider. Le second a pour objectif de le soutenir dans le développement de ses compétences, ses habiletés et ses connaissances. Le dernier axe cherche à identifier avec lui les appuis et soutiens que le jeune pourra mobiliser.

Si ce guide est en soi intéressant, il ne dit pas de quels moyens l’éducateur et le jeune disposent. Il invite le professionnel à se poser des questions que, normalement, il se pose déjà. Il ne dit rien sur ce qu’il faut faire pour que les jeunes sortant de l’ASE soient finalement plus autonomes que beaucoup de jeunes adultes qui restent après leur majorité chez leurs parents. Il fait porter sur le jeune la responsabilité de son autonomie…  Mais son intérêt porte sur la méthode qui permet de repérer des leviers (télécharger le guide)

 


L’intérim en éducation spécialisée : relation consommée ou impliquée ?

Sylvain Beck, éducateur spécialisé, sociologue et formateur (pour le collectif Avenir Éduc) constate dans Lien Social que l’intérim se développe dans le secteur. « La crise sanitaire a accentué un phénomène qui avait déjà pris une ampleur inédite puisqu’à la fin du 4e trimestre 2018, on comptait 9 665 intérimaires, soit près de 8 fois plus en 18 ans et près de 3 fois plus en 8 ans. Un récent rapport de la Chambre régionale des comptes (CRC) d’Ile-de-France a constaté au sein d’une Maison départementale de l’enfance (MDE) 1 500 025 € de dépenses intérimaires en 2019 contre 0,00 € en 2017

Pour Sylvain Beck cette liberté que représente l’intérim est un leurre qui favorise l’indifférence et la défection. « Malgré les valeurs d’ouverture et de curiosité que comporte cette mobilité, on peut souligner les limites de cet état d’esprit dans le travail social. « La relation à l’autre demande du temps et auprès de personnes vulnérables, une certaine loyauté. Car ce sentiment de liberté est basé sur la défection : lorsque les difficultés s’accumulent, le départ devient une solution, parfois la seule. Mais ce départ est-il vraiment un choix ? ».

« La question que les managers du social doivent impérativement se poser est donc celle-ci : comment anticiper les absences et les départs au sein des équipes pour permettre une continuité réelle dans l’accompagnement ? (lire l’article de Lien Social)

 


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Vous êtes allé(e) au bout de cette revue de presse ? Bravo et merci !

Merci aussi à Michelle Flandre qui m’a aidé à la réaliser

photo: pexels

 

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2 réponses

  1. Bonjour Didier,
    Si l’intérim massif tel qu’il fonctionne actuellement n’est pas une fausse bonne idée, c’est que c’est une vraie mauvaise idée…
    Dans les MECS et foyers d’accueil d’urgence il fait des dégâts importants tant pour les professionnels qui se trouvent parachutés pour une courte mission dans un monde qui leur est inconnu, que pour les enfants qui se retrouvent accompagnés par des personnes qu’ils ne connaissent pas et surtout qui ne les connaissent pas. De nouvelles têtes qui resteront une semaine, parfois moins. Dans l’accueil d’urgence les éducateurs tournent plus vite que les enfants qui peinent à être réorientés.
    Au-delà, il est évoqué la nécessité pour les « managers » de préparer, d’anticiper les absences, les remplacements, mais – dans les conditions actuelles – comment le pourraient-ils ? Recruter un travailleur social relève du défi, de la mission impossible ; le garder dans son service, le fidéliser, est devenu quasi-impossible. Il y a un tel turn-over dans les équipes que le management est devenu un exercice d’équilibriste.
    Le constat est aujourd’hui accablant, il participe du malaise profond actuel de la profession, mais ce n’est qu’un constat, les causes sont multiples, elles partent du recrutement des élèves, de leur formation, de leurs aspirations, de la manière d’appréhender le premier poste, l’évolution de carrière, les aspirations de chacun, de la prévention de l’épuisement professionnel, des désillusions, bref de tout ce qui fait les métiers du « social ».

    1. Merci Nicolas pour votre contribution très éclairante.
      Cette pratique d’intérim est antinomique avec l’idée même d’un accompagnement. Votre témoignage laisse entrevoir les dégâts que cela peut produire
      Bien Cordialement
      DD

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