Didier Dubasque
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La précarité énergétique vécue au quotidien : de multiples stratégies pour vivre sans chauffage

La précarité énergétique est présentée comme une difficulté à disposer de la fourniture d’énergie nécessaire à la satisfaction de ses besoins élémentaires en raison de l’inadaptation de ses ressources ou de ses conditions d’habitat. Dans tous les cas, le ménage doit faire des arbitrages : se chauffer au risque d’impayés ou ne plus se chauffer et subir les conséquences du froid sur sa santé, son logement, sa vie sociale.

Cette réalité souvent cachée nous révèle combien parfois les sacrifices se font dans la plus grande discrétion. Chez soi, quand il n’y a personne. Plusieurs médias ont choisi de donner la parole aux personnes qui vivent cette précarité qui survient lorsque le froid arrive

« C’est presque devenu normal d’avoir froid chez moi »

En France, plus de 3,5 millions de ménages sont en situation de précarité énergétique et souffrent du froid à l’approche de l’hiver. C’est le cas de Tom et Élodie qui ont été interrogés par  Julia Mothu pour le magazine Néon. Ils lui ont indiqué leurs combines pour réduire leurs factures d’énergie. Elle en a tiré un article très éclairant.

« La vaisselle se fait à l’eau froide, les légumes sont plutôt consommés crus pour ne pas allumer le gaz, des boudins de porte font barrage aux courants d’air, la chaudière est uniquement allumée pour la douche et les « coups » de chauffage ». C’est une véritable charge mentale précise Élodie qui est interrogée sur ce sujet.

Les étudiants vivent eux-aussi cette précarité énergétique : « Pour se chauffer sans se ruiner, Tom a, lui aussi, ses petites astuces. Il déambule en plaid dans ses 30 mètres carrés, jette un œil à son compteur deux fois par semaine pour contrôler sa consommation en énergie, et se colle aux plaques de cuisson lorsqu’il prépare à manger. Il recharge son ordinateur et son portable dans les locaux de l’école, pour consommer moins d’électricité chez lui.

 

France Inter a aussi diffusé de multiples témoignages très édifiants. Des propos recueillis par la journaliste Juliette Geay. En voici un rapide résumé qui nous montre les stratégies développées de la part de celles et ceux qui ne peuvent se chauffer…

De multiples stratégies pour vivre sans chauffage

Cécile, 39 ans est mère au foyer. Elle est mariée et mère de trois enfants en situation de handicap. « Au quotidien, la précarité énergétique implique de « garder son manteau chez soi, et avoir quand même le nez froid…  » Quand nous mettrons le chauffage, ce sera à 14 degrés la nuit et 16 le jour car pour l’instant il n’est pas allumé et l’a été qu’à 2 occasions (la visite de la famille et amis à la maison)

Lorelei, 35 ans, célibataire avec un enfant chauffe à 16 degrés la nuit et dans les chambres. Pour elle, « la précarité signifie tricoter des pulls plutôt que de tourner le thermostat du chauffage. »

Juliette, 50 ans, travaille dans une mission locale. Elle explique comment elle fait la chasse au gaspi. Elle a par exemple mis des interrupteurs sur tous les appareils qui ont un mode veille. Il vaut mieux s’enrouler dans un plaid le temps de regarder la télévision dit-elle.

Vincent, 35 ans, demandeur d’emploi allocataire du RSA . Il doit régler 1600 euros de régularisation annuelle à son fournisseur d’électricité. Son logement est très mal isolé, sa mensualité va passer de 40 à 140 euros par mois. Il ne voit pas comment il peut s’en sortir.

Les témoignages diffusés par France Inter sont nombreux et variés. (il y en a 12 dont certains sont très documentés). Cela nous montre aussi que la précarité énergétique touche aussi les classes dites moyennes qui travaillent, mais ont des revenus modestes ou ont une situation familiale particulière. Les « recettes » sont nombreuses pour faire des économies. « utiliser sa voiture au minimum », « s’habiller avec plusieurs couches de vêtements », « limiter les douches », ne plus utiliser le four électrique et bien évidemment fermer les radiateurs…

Cette situation inquiète le médiateur national de l’énergie. Il veut instaurer un droit d’accès à une alimentation minimale en électricité toute l’année. 20% des Français déclaraient avoir souffert du froid dans leur logement au cours de l’hiver dernier, dont 36% pour des raisons financières. La forte augmentation des prix de l’énergie constatée récemment fait craindre qu’encore davantage de Français ne soient touchés en 2022.

Les travailleurs sociaux sont régulièrement témoins de situations critiques avec un manque de gaz de fioul ou d’électricité qui conduit toute la famille à avoir froid dès que les températures baissent. Mais ils ont peu de moyens pour remédier à ce qui fait défaut : des ressources suffisantes tout simplement pour pouvoir se chauffer

EDF s’engage de son côté à instaurer un service minimum

Même si cela ne résoudra pas le problème de chauffage et d’impayé, Le fournisseur d’électricité va mettre en place un service minimum toute l’année. Cette  mesure était réclamée depuis longtemps par les associations de solidarité. « Il sera désormais systématiquement appliqué une limitation de puissance minimale garantie à 1 kilovoltampère (kVA, soit l’équivalent de 1000 watts) tout au long de l’année. » Il n’y aura plus de coupure pour les abonnés EDF, mais une réduction significative de leur débit électrique.

Cet abonnement minimum qui évite la coupure doit permettre de conserver les usages essentiels, mais ne permet pas de faire fonctionner un chauffage électrique. L’éclairage, la recharge des téléphones, un chauffe-eau, une machine à laver, Internet ou encore un petit réfrigérateur peuvent par contre continuer de fonctionner. De leur côté, les autres fournisseurs d’énergie n’ont rien annoncé. « Ce qui manque maintenant, c’est l’équivalent pour les autres fournisseurs d’électricité et pour les autres types d’énergies », a déclaré Manuel Domergue, directeur des études chez la Fondation Abbé Pierre. Il faudra sans doute à un moment en arriver à modifier la législation.

Rappelons enfin que pendant la période de trêve hivernale, du 1er novembre au 31 mars, les fournisseurs d’électricité ne peuvent procéder, dans une résidence principale, à l’interruption de la fourniture d’électricité pour non-paiement des factures (article L 115-3 du code de l’action sociale et des familles et décret n° 2014-274 du 27 février 2014 modifiant le décret n° 2008-780 du 13 août 2008).

 

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