Le ministre des Solidarités et de la Santé a ouvert le webinaire du Haut Conseil du Travail Social qui s’est tenu jeudi dernier. Il a aussi répondu à des questions posées par les participants. Il est utile ici de reprendre point par point ses propos.
Un hommage soutenu
Olivier Véran a d’abord rappelé que les travailleurs sociaux durant cette crise sanitaire sont bien effectivement « en première ligne » dans leurs missions d’accompagnement des personnes les plus vulnérables. Il a reconnu qu’ils ont fait preuve d’une « incroyable capacité d’adaptation ». « Sans les travailleurs sociaux la cohésion sociale est un vain mot »
Il a ensuite rendu hommage à Audrey ADAM, conseillère ESF tragiquement tuée lors d’une visite à domicile d’une personne âgée qu’elle accompagnait. Il a proposé un moment de silence pour « saluer son altruisme et son engagement ». Olivier Véran a précisé à cette occasion qu’il compte venir sur place à Troyes pour lui remettre officiellement de la Légion d’honneur à titre posthume, à la condition que sa famille soit d’accord pour qu’il le fasse.
Le ministre explique avoir constaté, avec cet évènement, le manque de reconnaissance ressenti par les travailleurs sociaux mais, a-t-il ajouté, « ce drame personnel nécessite de la pudeur et de la retenue ». Il s’interroge : quelle explication donner à l’acte commis par son assassin ? Quelle est part de la responsabilité individuelle et collective ? En tout cas, il s’agit de rendre justice à Audrey Adam, en honorant sa mémoire et en parlant du travail social et de l’engagement des professionnels.
Des moyens à mettre en œuvre
Il faut, dit-il, « Valoriser, renforcer l’attractivité, des travailleurs sociaux, mais aussi travailler sur les représentations de leurs métiers. Il regrette le manque de parité en rappelant que trop peu d’hommes investissent les métiers du social. Il a pris un exemple : « en 2019 seuls 17% d’hommes se sont engagés dans cette voie professionnelle ». Pour remédier à cela, il compte sur le développement de l’apprentissage et des contrats de professionnalisation. Il veut aussi s’appuyer sur l’élargissement des métiers du grand âge.
Il a aussi insisté à deux reprises sur la création dès l’automne d’un Centre National de Ressources du Travail Social (qui, à ma connaissance, sera loin d’être opérationnel à la rentrée prochaine si aucun moyen humain supplémentaire n’est apporté). Ce centre visera à faciliter l’accès aux ressources et bonnes pratiques pour les étudiants et les professionnels. Il a pour objectif d’apporter une « meilleure synergie entre théorie et pratique de terrain ».
Olivier Véran, a aussi fait référence au rapport du HCTS sur le travail social au défi de la crise sanitaire piloté par Marie-Paule Cols. Parmi les multiples propositions de ce rapport, il a retenu la nécessité de mettre en œuvre une simplification des pratiques administratives pour l’accès et le maintien des droits sociaux afin de permettre aux professionnels de se recentrer sur l’accompagnement des publics fragiles ou en difficulté.
Le Haut Conseil renouvelé avec un nouveau président
Il a aussi confirmé le renouvellement pour cinq ans du Haut Conseil du Travail Social, (ce qui à l’origine n’était pas acquis : chaque Haut Conseil doit justifier de son utilité s’il veut être renouvelé. Plusieurs d’entre eux sont appelés à disparaître). C’est pour le ministre des Solidarités une « instance indispensable pour le ministère » qui ne doit pas être « hors sol » mais en prise avec les réalités du terrain. Il a aussitôt annoncé la nomination de Mathieu KLEIN ancien président du conseil général puis départemental de Meurthe-et-Moselle et maire de Nancy. (pour la petite histoire, Mathieu Klein étant membre du Parti Socialiste, cette proposition de présidence du HCTS a été validée par l’Elysée).
Mathieu Klein est une personnalité politique qui connait bien le travail social. Il s’est engagé à de multiples reprises : nationalement, il s’était exprimé en faveur d’une prise en charge du financement du revenu de solidarité active par l’État et à l’expérimentation d’un « revenu de base » contre la pauvreté. C’est un homme d’expérience engagé sur la question sociale. (Il est, de l’avis de plusieurs participants, l’homme de la situation pour le HCTS qui a besoin d’un portage politique)
Le futur président du HCTS qui a pris la parole en visioconférence va avoir plusieurs défis à relever. Selon ses propres propos, l’un de ses objectifs est de porter haut la voix du travail social. Il sera aussi confronté à la faiblesse des moyens alloués au Haut Conseil. Celui-ci a besoin d’être soutenu par des professionnels et techniciens disposant d’un réel temps dédié (et non pas un temps s’ajoutant à des missions déjà attribuées).
Il faut en effet rappeler à ce sujet que tous les membres du HCTS agissent « de façon bénévole » sans aucune indemnité hormis les frais de déplacement. Certains le font sur leur temps de travail sans allègement de leurs missions, d’autres dont les représentants des associations professionnelles et des organisations syndicales posent des RTT ou interviennent sur leur temps de congé, car leurs employeurs ne considèrent pas cet engagement comme une priorité. Cette réalité limite les ardeurs notamment lorsqu’il s’agit de produire des écrits ou d’auditionner des intervenants. Le manque de moyens que l’on constate souvent sur le terrain est aussi une réalité au Haut Conseil….
Des orientations pour le Travail Social
Des questions ont été posées à Olivier Véran, notamment sur sa feuille de route idéale pour le Travail Social : « C’est une vaste question ». Pour lui la formation reste une priorité (ce qui n’a pu qu’intéresser Marcel Jaeger élu récemment nouveau président de l’UNAFORIS). Le second axe pour le ministre concerne la question de la mixité. Il se déclare adepte du « Care » qui ne doit pas être porté uniquement par les femmes. Avoir un plus grand équilibrage homme / femmes dans le social pose la question de l’attractivité des métiers, mais aussi des conditions de travail. Enfin le ministre a annoncé qu’il va organiser via la DGCS une consultation sur les difficultés d’accès aux stages pour les étudiants et les solutions à apporter à ce problème récurrent.
Photo : Olivier Véran sur l’écran de contrôle dans les locaux d’IdéalCo
Une réponse
Merci Didier pour ce résumé détaillé, avec plein de choses intéressantes et à suivre. On croise les doigts pour le HCTS.