C’est un drôle de magasin à la vitrine vieillotte mais tellement signifiante. Les 3 citations sur la boutique des rêves fous telle que vous pouvez les découvrir sur cette photographie convient particulièrement bien au travail de l’assistante sociale mais aussi de l’éducateur… Reprenons les une à une…
Cette boutique vous propose de rencontrer le « réparateur de rêves brisés (même depuis l’enfance) ». Rêve d’une vie réussie et harmonieuse avec des parents qui s’aiment et restent ensemble… Rêve d’un avenir personnel et professionnel sans violences ni stress ou peur de manquer (d’argent, de reconnaissance, de travail, de santé… et j’en passe). De nombreuses personnes ont eu des rêves brisés. Certaines s’en remettent, parfois grâce à leur résilience, certaines n’y parviennent pas et doivent être aidées et soutenues.
Or que fait l’éducateur ou l’assistante sociale ? Chacun à sa manière tente de réparer ce qui a été abîmé souvent pendant l’enfance. Combien de jeunes, d’adultes ont une image d’eux mêmes dégradée. Leurs rêves et leurs espoirs ont bien été brisés sur l’autel des conflits conjugaux, des maltraitances avérées, des abandons successifs ou des échecs répétés. Je pense à ces jeunes qui ont écumé successivement les foyers, ont épuisé les familles d’accueil, puis sont retournés en famille et qui à leur majorité finissent à la rue et se rendent compte que leur famille est aussi le service qui les a accompagné depuis tant d’années. Ils se rappellent alors tel éducateur ou telle famille d’accueil qui les a soutenu sans parfois vraiment y parvenir tellement la faille qu’ils avaient en eux était immense. Et puis il y a aussi tous ces jeunes dont on ne parle pas, tous ceux qui se sont « réparés » grâce au travail éducatif, tous ceux qui s’en sont sorti et qui ne souhaitent pas en parler… Oui les travailleurs sociaux sont en quelque sorte des réparateurs de rêves brisés…
Ils sont aussi « des fournisseurs de graines de liberté ». Comme le proclame cette boutique. Il ne s’agit pas de regarder sans cesse en arrière. Les personnes qui s’en sortent font le choix de rompre avec un passé souvent douloureux. Je pense alors à toutes ces femmes qui ont eu le courage de refuser la violence qu’elle subissaient parfois depuis longtemps. Certaines ont eu la force de venir au centre médico social pour chercher une solution à laquelle elle ne croit pas forcément et, à ce moment là précisément, il y a une personne qui les a écouté et leur a apporté cette graine de liberté. Des assistantes sociales leur ont permis de percevoir qu’une autre voie que celle de la soumission était possible. Elles leur ont permis d’entrevoir ce que pouvait être une vie future sans violences. Elles les ont orienté vers des centres spécialisés ou encore des associations suffisamment solides pour des prises en charge parfois difficiles. Car s’en sortir, ne pas retourner vers celui que l’on a aimé dans un cycle de violences parfois partagé es est bien plus difficile qu’il n’y parait. Certaines, et elle sont nombreuses, sont parvenues à ne pas s’installer dans une forme de victimisation permanente qui empêchent de s’en sortir… Bon je déborde un peu du sujet mais il est vrai que le travailleur social doit vraiment être en capacité de fournir ces graines de liberté, au bon moment, c’est à dire quand la personne est prête à la recevoir. C’est cette fois là précisément que la personne s’en saisit alors qu’elle était passée de multiples fois à coté.
Enfin il y a « l’enthousiasme de qualité artistique (Production locale) » (évidemment). Je suis souvent surpris de voir comment certaines collègues gardent un moral à toute épreuve. Elles m’impressionnent. Elles ont un enthousiasme qui se communique et se partage. En mettant de l’énergie dans votre propre bonne humeur, vous la communiquez à celui ou celle qui est en face de vous. C’est bien une production locale. Artistique, je ne sais pas, mais en tout cas authentique. Car face à la personne qui va mal et qui fait appel à vous, il n’y a pas d’histoires à se raconter. La personne sait bien si votre réaction est authentique et si elle ne l’est pas, la défiance s’installe vite. Il s’agit donc d’être avec l’autre en toute simplicité mais avec un moral d’acier qui donne à voir des perspectives positives. Le sourire, l’attention à l’autre et la bienveillance sont des moteurs puissants pour aider et accompagner.
L’enthousiasme mesuré c’est à dire de qualité rend espoir, fait du bien à celui qui vient sans perspective. Certes, c’est fatiguant notamment en fin de journée. Mais vous êtes comme dans une arène. Votre mission est de redonner à voir des solutions, des issues positives, des perspectives agréables, c’est comme cela aussi que les personnes bougent. Elles ont envie d’y croire, font parfois semblant puis finalement se laissent convaincre qu’elles aussi elles peuvent s’en sortir et avoir leur part de bonheur. Oui finalement l’enthousiasme de qualité artistique me plaît bien comme définition de ce qu’il faut avoir pour exercer sa profession d’assistant social ou d’éducateur. Je pense aussi aux conseillères qui apportent elles aussi des possibilités de sortie de crises. Elles aident à sortir de l’angoisse de l’expulsion ou encore de la venue de l’huissier. Elles ont elles aussi besoin d’un certain enthousiasme face à certaines situations budgétaires parfois très délabrées…
Alors cette boutique des rêves fous a-t-elle un intérêt ? J’ai la faiblesse de le croire quand je pense aux interventions quotidiennes des travailleurs sociaux.
PS : Je ne suis pas parvenu à retrouver l’origine de cette photo issue à l’origine d’un cordonnerie située à Bourges. Son auteur a modifié en janvier 2015 la devanture en l’appelant la boutique de rêves fous…
Note : pendant mes congés, je vous propose une rediffusion de certains articles « réactualisés »: celui-ci avait été initialement publié le 31 mai 2016
Une réponse
Ou se trouve réellement cette boutique?