Psychiatrie : une lettre ouverte pour ne plus subir
L’équipe du secteur de psychiatrie d’Asnières sur Seine à Moisselles (95) vient de publier une longue lettre fort instructive sur les conditions dans lesquelles elle intervient. Elle est en ce sens révélatrice de l’état du secteur. « La spirale infernale du sous-effectif, de l’épuisement, des arrêts maladies, de l’ambiance sous tension de l’unité aggravant la tension interne des patients s’accroît ». « Dans cette spécialité, demander des lits supplémentaires est toujours suspect d’hospitalo-centrisme et de pratiques asilaires ».
Il est fait aussi état dans ce courrier de la situation dans lesquelles se trouvent les assistantes sociales de ce service : « L’activisme de nos assistantes sociale et de notre réseau connaît des limites qui ne dépendent pas de nous ». « Courant de demandes en demandes, …/… certaines d’entre elles sont, comme souvent, restées sans réponse »…/… « Des patients sortent car « il faut faire des sorties », d’autres ne peuvent pas car ils n’ont plus de lieu de vie, sont en attente de maison de retraite, n’ont plus d’hébergements. Plus aucun hôtel social ne veut d’eux, le 115 est saturé, le SIAO (la plateforme d’orientation pour les personnes sans domicile) n’a rien à proposer. Pour certains patients, ceux qui ne sont pas encore hospitalisés par le préfet, nous devons nous résigner à les renvoyer à la rue en attendant qu’ils se remettent suffisamment en danger pour retournés contraints à l’hôpital ».
Cette lettre aborde aussi pourquoi et comment l’agressivité et la violence est arrivée un soir dans ce service. C’est la goute d’eau qui a fait déborder le vase déjà trop plein. « Après avoir encaissé la folie et l’absurdité du système voilà qu’il nous faut encaisser les coups, l’étranglement, la violence d’une personne en visite mécontente d’on ne sait quoi ».
« La pièce est recouverte de sang. L’agresseur s’enfuit ».
La lettre raconte l’agression subie par un soignant de la part d’un un visiteur : « Le sang coule. Il faut attendre l’aide de patients de l’unité alertés par les cris pour séparer l’agresseur de sa victime. Les deux autres soignantes sont à l’autre bout du service, dans une chambre en train de gérer la crise convulsive d’une autre patiente. Après cet événement grave, tout le monde est sidéré. La pièce est recouverte de sang. L’agresseur s’enfuit. Il faut porter secours au collègue, rassurer les personnes présentes alors que l’on est soi-même dans un état de choc et que l’on a cru voir mourir la personne avec qui nous travaillons tous les jours… » Depuis vendredi 15 novembre, un droit d’alerte du CHSCT a été fait avec un droit de retrait de l’équipe de l’unité d’hospitalisation. La sécurité des patients et des soignants n’est plus assurée. Mais là aussi, le droit de retrait n’est qu’une fiction qui se heurte à notre conscience professionnelle.
Vraiment je vous invite à lire en détail cette lettre dont vous n’avez eu ici que quelques extraits. Il serait utile aussi que le Défenseur des Droits en ait connaissance, lui qui parle des maltraitances institutionnelles sur les enfants aurait aussi fort à faire sur d’autres formes de maltraitances. Notamment celles qui abiment nos services publics et ceux qui y travaillent.
Handicap : le prix de l’amour et l’AAH selon Nicole Ferroni
Respirons un peu avec l’humoriste de France Inter qui nous explique avec des mots simples et des gestes en moulinets combien l’Allocation Adulte Handicapé (AAH) reste nécessaire même pour les personnes qui vivent en couple. Sa démonstration est implacable et son humour ravageur. En tout bien tout honneur j’aime cette femme ! Je me plais à imaginer ce que peut donner avec elle une discussion à table ! Comment la contredire avec une telle faconde et de tels arguments ? Je l’imagine aussi animer une synthèse ASE ou encore participer à une commission locale d’insertion. Ça dégagerait, je vous le dis ! Ecoutez la. Elle nous fait rire en disant des choses très sérieuses…
Son billet sur la protection de l’enfance mercredi ne manque pas non plus d’arguments : il est intitulé : « Enfance : réduire le budget n’est pas une économie ». Elle « tacle » à cette occasion plusieurs Départements… Mais où va-t-elle chercher tout cela ?
Les billets de Nicole Ferroni sur France Inter
Selon le Défenseur des droits, les institutions françaises sont violentes à l’égard des enfants
Il avait annoncé son rapport à paraitre en décembre. Finalement, il est arrivé plus tôt. Le Défenseur des Droits fait un constat sévère sur les manquements du respect des droits des enfants au sein des institutions. Ce rapport s’est penché sur les institutions publiques au sens large : « Le système éducatif, judiciaire, social, médical et médico-social organisant l’accueil, l’accompagnement et la prise en charge des enfants. » Les violences sont, elles, définies sous l’angle de « toute action ou absence d’action qui contrevient à la sécurité de l’enfant ou à son bon développement, donne prééminence aux intérêts de l’institution publique sur les intérêts de l’enfant, lui cause une souffrance physique ou psychologique inutile et/ou entrave son évolution ultérieure. »
Le secteur en crise de la protection de l’enfance est pointé du doigt précise le journal Le Monde : « Environ 340 000 enfants font l’objet de mesures de protection, dont plus de la moitié sont placés en institution ou en familles d’accueil. Or, ces mineurs sont victimes, entre autres, de carences affectives importantes qui sont aggravées par le fonctionnement même de l’aide sociale à l’enfance, pointe le rapport, dénonçant les délais de mise en œuvre des droits de visite accordés aux parents par le juge des enfants, ou la séparation des fratries ».
3 870 faits de violences entre mineurs ont été signalés dans les services de la protection de l’enfance et de la protection judiciaire de la jeunesse dans une étude de février 2019. Dans l’Éducation nationale, 10% des lycéens estiment qu’il y a beaucoup de violences dans leur établissement. Jacques Toubon se déclare par ailleurs tout autant inquiet de la montée des phénomènes de harcèlement notamment scolaire. 22 recommandations sont faites pour améliorer la situation car les institutions publiques considèrent « encore souvent l’enfant comme un objet de leur intervention » et les violences commises « à l’encontre des enfants par des professionnels, continuent à être banalisées ou minimisées ». (lire l’article du Monde et celui publié par le site vie-publique.fr)
(télécharger le rapport du Défenseur des Droits et des enfants) (télécharger la synthèse) (télécharger le dossier de presse)
Revue de presse réalisée avec le concours de Michelle Verrier Flandre
et puis….
2 Responses
Bonjour,
Je suis chaque jour vos articles et je vous remercie pour le travail que vous faites.
C’est pour moi une bulle d’air et de prise de recul dans un quotidien d’assistante sociale spécialisée bien chargé.
J’ai voulu lire la lettre de l’équipe de psychiatrie d’Asnières mais ce n’est pas le bon lien. J’avais envie de le transférer à une amie travaillant dans ce secteur sur Lorient et dont l’équipe a dû également faire face dernièrement à de la violence après avoir interpeller et alerter depuis des années sur le manque de moyens.
Merci à vous et bonne journée
Sophie LT
Bonjour et merci de votre message : le lien est réparé cela va maintenant dans la bonne direction !
https://printempsdelapsychiatrie.org/2019/11/19/lettre-ouverte-pour-ne-plus-subir/
en vous souhaitant une bonne journée
DD