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Protection de l’Enfance : de nouvelles concertations à venir malgré l’urgence d’agir

« La feuille de route sur la protection de l’enfance a été finalement présentée  lundi 28 janvier par Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la santé, et Adrien Taquet, tout nouveau secrétaire d’Etat à la protection de l’enfance. Cette feuille de route ouvre une période de concertation qui mènera à une Stratégie nationale pour la protection de l’enfance et de l’adolescence qui sera présentée en juillet. Cette stratégie s’annonce être un exercice à moyens constants nous précise la Gazette des Communes. « De quoi décevoir les Départements ».

Plusieurs axes stratégiques

1. Renforcer la prévention :  « Il faut accompagner en amont les parents les plus fragiles pour prévenir les placements d’enfants » : Il est clair que la prévention est le parent pauvre de la protection de l’enfance : combien de parents demandent à être soutenus et n’obtiennent pas  de réponses ou alors avec des délais très long car la situation est considérée comme non prioritaire ?. Il est aussi prévu  de mettre en place « des parcours de périnatalité pour les parents » dès le 4e mois de grossesse. Il s’agit d’une mission de la PMI qui assumait ce travail de prévention à l’époque où elle disposait de moyens. Dans certains Départements, la PMI continue de le faire, dans d’autres c’est assez aléatoire.

2. Remettre à plat les modes d’accueil et revoir les délais : ces délais sont rédhibitoires, magistrats et travailleurs sociaux dénoncent cet état de fait depuis longtemps.

3. Remettre « au goût du jour  » l’adoption simple.

4. Un parcours de santé  adapté : Les enfants bénéficiant de mesures se verront proposer un parcours de santé coordonné, pris en charge à 100% par la sécurité sociale.  Agnès Buzyn a indiqué que les enfants ayant « des difficultés pour accéder à la santé » pourront consulter « un psychologue remboursé à 100% ». C’est important : le non remboursement des consultations des psychologues était un véritable frein alors que des besoins importants existent et ne peuvent être pris en charge uniquement par le service public

5. Vers une nouvelle gouvernance de la protection de l’enfance.  « une concertation sera engagée avec les départements, les associations, le Défenseurs de droits, les ministères, les travailleurs sociaux, le CNPE. » C’est vraiment nécessaire, les différences de traitement dans les Départements peuvent nous interroger sur cette nécessité de disposer de normes claires et partagées par tous.

Mais il y a aussi des affirmations qui interrogent.

Personnellement je ne vois pas  où Adrien Taquet est allé chercher l’idée que seulement un quart des personnes qui ont un soupçon de maltraitance donnent l’alerte ». Le secrétaire d’Etat entend mobiliser contre les violences faites aux enfants,  en encourageant à signaler les cas de mauvais traitements. Mais lorsqu’il y a signalement, on ne sait pas si la maltraitance est avérée. Dans une majorité des situations, elle ne l’est pas.  Quand on comptabilise le nombre d’informations préoccupantes dans tous les Départements, que l’on constate qu’une majorité des signalements ne sont pas avérés ou sont considérés comme mineurs, on voit mal comment les Cellules de Recueil d’Informations Préoccupantes pourront faire face si on multiplie par quatre le nombre d’informations transmises. Cette logique de signalement systématique a des limites ne serait-ce qu’en terme de moyens. En outre personne ne mesure les dégâts que provoquent au sein des familles les évaluations qui finalement ne sont pas justifiées : ces enquêtes contribuent à signifier aux  enfants que leurs parents sont suspects même lorsqu’ils ne le sont pas. C’est une atteinte à leur parentalité.

Pour lutter contre la crise révélée par une émission de télévision, sur les cas de maltraitance au sein même du dispositif  d’accueil des enfants, le gouvernement entend renforcer la formation des professionnels et réfléchir à leurs conditions de recrutement. Evidemment : mais pourquoi accepte-t-on dans certaines institutions de recruter des professionnels non-diplômés ? N’est-ce pas lié à la pénurie des moyens et aux budgets contraints ?

Autre sujet d’inquiétude : « le nombre de familles d’accueil est en baisse. Il y a une réflexion pour rendre plus attractif l’accueil en famille des enfants ». Je ne vois pas là aussi sur ce sujet comment il sera possible de faire l’économie d’une réflexion sur les moyens financiers nécessaires alors que tous se plaignent d’un coût excessif des prises en charge. (En 2016, les dépenses brutes des départements pour l’aide sociale à l’enfance se sont élevées  à 7,825 milliards d’euros pour la France métropolitaine et les départements et régions d’outremer (Drom), hors Mayotte. (Note de la DRESS et de l’ONPE)

Enfin faut-il rappeler le nombre croissant des mesures  de protection ? Le tableau qui suit est révélateur. Serions nous dans une société qui maltraite de plus en plus les enfants ? Ou plus simplement est-ce que la protection de l’enfance en étant plus efficace protège plus que par le passé ?

Evolution du suivi des mineurs 2007 2016

Les procès à charge des services  ASE dans les Départements sont démoralisants quand on sait combien les professionnels sont attachés à la protection. Ils  font très souvent preuve d’un engagement sans faille. Si les écarts et les abus doivent être sanctionnés, il faut aussi savoir saluer le travail extrêmement difficile des travailleurs sociaux et des assistants familiaux qui donnent énormément pour trop peu de reconnaissance.

 

Photo : Pixabay

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Une réponse

  1. Bonjour, Psychologue, je travaille dans un foyer d’accueil d’urgence, depuis 1993, dans le service de la pouponnière depuis 2002. J’assiste avec un grand désarroi à la perte de sens, à la confusion des places et des rôles, qui nous éloignent de notre mission première : accueil, observation, accompagnement et orientation. Les budgets sont plus importants à réduire, à trouver toutes les occasions d’économie, au prix d’une prise en charge adaptée. La formation des directeurs d’établissement est à mon sens à revoir : le comptable prédomine bien loin des préoccupations du terrain, et laisse à la dérive éducateurs. La pansement d’obligation à des formations intellectuelles ne répondant absolument pas au contexte. Il est urgent de s’y pencher

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