Près de 300.000 mineurs protégés (+1,4%) en France mais la protection de l’enfance manque de moyens.

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Près de 300.000 mineurs font l’objet d’une mesure de protection de l’enfance, en hausse de 1,4%. C’est ce que nous annonce l’Observatoire National de la Protection de l’Enfance dans son 12ème rapport annuel. Les résultats sont garantis par un conseil scientifique. L’ONPE s’applique également à recenser et faire connaître les pratiques de prévention, de dépistage, de prise en charge médico-sociale et judiciaire dont les résultats ont sont jugés concluants. La période 2016-2017 est marquée par l’instauration d’une nouvelle instance de gouvernance, le Conseil national de la protection de l’enfance dont la première réunion s’est tenue lundi dernier. Vous avez ici le rapport ONPE 2017 et sa synthèse (qui est à mon sens trop succincte)

Vous trouverez ici l’intervention de Lyes Louffok éducateur spécialisé et ancien enfant placé lors de la première réunion 2018 du conseil national de protection de l’enfance. Il parle en connaissance de cause. Lyes Louffok a pris la parole lors de cette réunion, en interrogeant Agnès Buzyn ministre des solidarités. Une longue intervention « carrée » précise et documentée mais aussi assez forte en symbole : « Madame la Ministre »,  a-t-il précisé, « on dit qu’un pays qui maltraite ses vieux condamne son avenir, mais qu’en est-il alors d’un pays qui maltraite ses enfants ? Ce n’est pas son passé, déjà mort, qu’il met en péril mais son âme ». Et il ajoute : « En France, deux enfants décèdent tous les jours sous les coups de leurs parents, selon l’INSERM, 31.000 sont sans domicile fixe, 324 560 sont placés. Près de 40% des sans domicile fixe de 18 à 24 ans sont des enfants placés. 140 000 enfants sont exposés à des violences conjugales. 86,8% des maltraitances ont lieu dans la sphère familiale et 45% des Français suspectent au moins un cas de maltraitance dans leur environnement ». Le tableau est assez sombre effectivement. Notre collègue a terminé son intervention en posant  directement 2 questions à Agnès Buzyn :

  • Qu’envisagez-vous pour que les enfants soient traités de façon égale et digne sur l’ensemble du territoire, pour que soit évalué le danger qu’ils courent ou pour leur assurer un avenir une fois adulte ?
  • Comment envisagez-vous, enfin, de donner au CNPE les moyens nécessaires à sa mission, qui est de faire exister un vrai pilotage national de la politique de protection de l’enfance ? »

Bref vous l’avez compris la question que pose Lyes Louffok est celle des moyens qui manquent

De son coté La ministre des Solidarités et de la Santé, a rappelé qu’elle présentera en mai une « stratégie nationale de protection de l’enfance et adolescence » pour 2018-2022. Agnès Buzyn veut prioriser son action sur la lutte contre les violences faites aux enfants avec un meilleur repérage de ces violences. Elle souhaite prévenir des difficultés et ruptures dans la vie des enfants et familles concernées ; Elle s’intéresse aussi à l’accompagnement des jeunes adultes à la sortie de l’aide sociale à l’enfance (ASE) et à l’accès aux soins des enfants pris en charge.

Toujours sur le même sujet le Guide Familial nous rappelle une maltraitance familiale en Seine-Saint-Denis en 2014. Elle a conduit le Défenseur des droits à mener une enquête sur les responsabilités des services sociaux et des autres intervenants. vous avez ici le rapport. L’absence de coordination entre les professionnels est mise en cause mais pas que. Il semblerait que les différents services n’aient pas communiqué entre eux leurs inquiétudes comme c’est habituellement le cas. Mais il y a plusieurs points qui me « chiffonnent » dans les recommandations de Jacques Toubon :

  • Le Défenseur des droits recommande  «d’accorder une attention particulière aux familles multipliant les demandes financières en procédant à une évaluation sociale globale, notamment de la situation des enfants». Je suis un partisan de l’évaluation globale, qui est rappelons le une compétence spécifique des assistants de service social. Mais ce lien direct entre pauvreté financière et évaluation d’un risque de maltraitance m’interroge. Allons nous demain évaluer toute famille qui multiplie les demandes financière ? Si déjà les services sont engorgés alors là cela risque d’exploser. Qu’en pensent le CCPA ou ATD quart monde ? Il y a intérêt d’en débattre.
  • « Une assistante sociale a aussi reconnu que son service était «peu avancé sur le plan informatique». C‘est surprenant. Le Défenseur des droits en tire ce conseil à la Seine-Saint-Denis : «Informatiser les demandes d’aides financières au département, dans un logiciel unique et partagé.» OK  mais n’y a-t-il pas un risque de détournement de finalité au sens de la CNIL entre gestion des aides financières et protection d’enfants en danger et en risque ? Il faut être précis car même si les aides financières sont bien inscrites au chapitre de la prévention des risques pour l’enfant, le croisement systématique des données est à interroger.

Il semble bien que le manque de partage d’informations dans un objectif de protection se soit posé de façon institutionnelle ce qui « fait dire à la Cnape, (Fédération d’associations de protection de l’enfance) qu’elle apprécie que soient ainsi interpellés «tous les acteurs institutionnels qui interviennent auprès de l’enfant», et pas uniquement les travailleurs sociaux précise Olivier Bonnin  qui conclut en indiquant que « le Défenseur des droits, malheureusement, s’est depuis engagé dans une autre enquête, cette fois pour des actes de torture sur une fillette cachée, pendant des mois, de la police et des services sociaux »

En tout cas il n’y a rien à cacher du coté des services sociaux et la transparence sur ces enquêtes s’impose.

 

Photo : Pixabay 

 

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