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Pourquoi les assistantes sociales de polyvalence de secteur ont tant de travail ? 

Il faut le reconnaitre : être assistant(e) social(e) en polyvalence de secteur n’est pas une sinécure. Ce sont elles qui reçoivent les allocataires du RSA et doivent signer avec eux des contrats d’insertion ou des contrats d’engagements réciproques. Mais il n’y a pas que cela. Même si parfois des personnes accompagnées se plaignent de ne pas être assez ou correctement aidées, on ne compte plus le nombre de dispositifs, notes de services et consignes qu’il leur faut appliquer. Dans certains départements ce sont entre 30 et 40 procédures différentes qu’un(e) seul(e) et même assistant(e) social(e) doit être en capacité de mettre en œuvre. Parfois cela va au-delà.

Si l’on doit parler du travail en polyvalence de secteur qui reste une belle mission, il faut vous imaginer ce qu’est une voiture balai. L’assistante sociale de secteur accueille toutes les situations dont personne d’autre ne veut. Elle a une fonction de voiture balai qui reçoit toutes celles et tous ceux qui passent entre les mailles du filet de la protection et de l’aide sociale.

Il leur est demandé de trouver des réponses là où souvent il n’y en a pas.  Par exemple l’accès à un logement alors que les travailleurs sociaux ne sont pas décisionnaires. Où encore tenter de faire baisser une dette auprès d’un huissier. Elles peuvent tout au plus négocier, mais elles sont souvent « prises de haut » et il est facile de leur raccrocher au nez. Pourtant nombreuses sont celles qui résistent et utilisent des détours pour obtenir des réponses.

Des dispositifs en veux-tu ? En voilà !

À force de lui demander d’être partout, l’assistante sociale peut en arriver à être nulle part ou du moins dans un espace indéterminé où sa place et sont rôle fluctuent selon les attentes de chacun. C’est pourquoi il est bien plus simple de la critiquer plutôt que de regarder pourquoi tel ou tel problème demeure.

Tenons de lister les domaines et les dispositifs qu’il leur faut savoir maîtriser  :

  • Le Logement : SIAO, DALO, DAHO, FSL (accès, maintien, énergie ), contingent préfectoral, demande de logement HLM, CCAPEX, enquêtes préfecture pour la prévention des expulsions
  • L’insertion : L’accès au droit RSA- orientation, le contrat d’insertion, les Aides individuelles à l’insertion (AII, AIF, AIPC) activation des références et correspondances, demande d’accès à un emploi aidé…
  • La protection de l’enfance :  enquêtes sur demandes du JE ou rapport de signalement, les « soit transmis » du procureur, les informations préoccupantes, les MAESF, les aides financières enfances familles (aides aux projets, aides subsistance…)
  • Les adultes vulnérables :  MASP, demandes de curatelles, tutelles, coordination PA-PH, liens avec le CLIC…
  • Les jeunes : demandes de FAJ, CSAJ, Permis jeunes, emplois avenir, activation dispositif mission locale…

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Je crains en oublier car cette liste un peu ancienne est établie de mémoire sans aller regarder du côté des référentiels qui eux aussi se multiplient. À ces dispositifs il faut ajouter les usages des logiciels en ligne car bien évidemment chaque administration développe sa propre plateforme  numérique qu’il leur faut maîtriser correctement sinon gare à la prestation qui peut ne pas être versée.

L’inflation législative de ces dernières années fait porter sur les professionnels et notamment les assistants sociaux la responsabilité de la mise en œuvre de ces politiques sociales qui ne s’attaquent pas sur le fond aux problèmes. Et pour couronner le tout nous avons des politiques sociale :

  • Généralistes : qui s’adressent à tous quels que soient les âges et types d’aides allouées…
  • Catégorielles de population : qui s’adressent à une partie du public généraliste : jeunes, personnes âgées, familles monoparentales…  étrangers en situation régulière (rien pour ceux qui ne le sont pas… )
  • Catégorielle de dispositif : femmes victimes de violences, allocataires du RSA,  protection de l’enfance…
  • De territoires : familles vivant en ZUS, Collègiens relevant d’établissement  classés  en zone prioritaire, instances liées aux politiques de la ville (conseils de quartiers…), etc.

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Comment voulez-vous que le travailleur social  s’y retrouve ?

Ainsi une politique sociale de dispositif va croiser une autre politique sociale plus généraliste. Par exemple une femme victime de violences sera hébergée plus rapidement que si elle ne l’est pas, même si elle se retrouve à la rue mais pour cela il faut qu’il y ait dépôt de plainte et faits reconnus…  Un étranger en situation irrégulière pourra être aidé s’il a avec lui des enfants mineurs, cela au titre de la protection de l’enfance. Et bien sûr les règles administratives d’accès à ces dispositifs sont fluctuantes et évoluent au rythme des circulaires et des décrets. Il existe des dizaines de croisements de dispositifs qui obligent à jongler en permanence alors que les personnes demandent simplement à être aidées…

Les assistants sociaux de secteur sont inscrits dans une injonction paradoxale quant à leurs fonctions : ce sont des professionnels généralistes à qui il est demandé l’activation de dispositifs qui ne font que gérer les priorités (l’ordre de passage) sans s’attaquer aux questions de fond.

Cette tendance à la spécialisation des actes professionnels et à une forme de bureaucratisation de la gestion pose bien des difficultés. Elle interroge la fonction généraliste de la pratique professionnelle telle qu’elle est enseignée. Comment être à la fois spécialiste de l’accès au logement, « enquêteur » avisé et pertinent dans le cadre de la protection de l’enfance, spécialiste des questions de surendettement et de gestion de budget des ménages, capable de substituer une mesure de tutelle par un accompagnement personnalisé au budget tout en n’oubliant pas la mission d’accompagnement spécifique imposée dans le cadre du RSA ? Comment maitriser le dispositif de l’offre de placement des personnes âgées dépendantes ou agir efficacement face à des carences de soins ou à la maltraitance lorsqu’elles sont à domicile ?

C’est pourtant bien tout cela qui est simultanément demandé aux généralistes qui interviennent dans le cadre de la polyvalence. Je ne peux que leur tirer mon chapeau et reconnaître la complexité des tâches qu’elles ont à accomplir

 

 

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2 Responses

  1. Je savais pas qu’il n’y avait que des femmes dans ce métier. Je dois être une anomalie…

  2. Après avoir lu toutes ces choses que les assistantes sociales doivent faire et diriger dans le cadre de leur travail je ne peux que les féliciter. Je suis admirative pour tout cela.
    Je leur souhaite bien du courage, surtout en ce moment, où la situation est bien compliquée.
    Je souhaite dire toute ma fierté à ma fille qui est aussi assistante sociale et qui a bien du travail. Bravo à toi et à tes collègues ainsi qu’à toutes celles qui nous aident si bien tous les jours. J’ai eu besoin de l’aide d’une d’entre elles et je sais leur gentillesse et leur efficacité pour tout ce qu’elles font pour nous, pour notre bien-être, régler nos soucis, obtenir une allocation, bref, nous aider quand on est perdus dans tous nos papiers administratifs. Un grand merci et tous mes meilleurs voeux de bonheur et de courage pour cette nouvelle année.

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