Nouveau gouvernement Attal : la solidarité déclassée.

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Le nouveau gouvernement présenté par Gabriel Attal se veut « resserré ». Une façon de mieux cadrer l’action publique et sa communication au sein de ministères régaliens, quitte à ne plus avoir certaines politiques clairement portées par l’exécutif. La disparition du ministère des Solidarités et de la Famille est un signal qui nous montre que ces sujets ne font pas partie de ses priorités.

Certes, on peut encore espérer la nomination d’un secrétaire d’État en charge des Solidarités. Mais cela veut dire que l’influence des futurs nommés sera moindre que celle des ministères de plein exercice.  La composition du gouvernement complet, incluant les ministres délégués et les secrétaires d’État, n’est pas encore dévoilée. On devrait en savoir plus dans le courant de cette semaine.

La valse des ministres

Depuis son premier quinquennat en 2017, le Président de la République a nommé successivement quatre premiers ministres. Ce sont pas moins de 110 ministres et secrétaires d’État qui se sont succédé dans ces différents gouvernements. Un record sous la 5ᵉ République.

Emmanuel Macron a voulu cette fois-ci une équipe de 15 membres autour de lui. Il leur demande, tel un manager à son encadrement, « des résultats », « de la solidarité (entre eux) et de la vitesse ». Quitte à ce que plusieurs ministères de plein droit disparaissent. Logement, Fonction publique, Transports, Éducation nationale, Solidarité, Santé… Autant de ministères incontournables sur des chantiers en crise qui ont été mis au second plan, qui ont perdu leur autonomie, ou qui ont tout simplement disparu, tel celui de la Transition énergétique.

Aurore Bergé a été une ministre éclair, qui aura quitté son poste au bout de six mois. Elle en prend un autre situé au dernier rang de l’ordre protocolaire. L’Égalité entre les hommes et les femmes et la lutte contre la discrimination sont des thèmes importants certes, mais fallait-il pour autant supprimer celui met en œuvre les solidarités et la cohésion sociale ?

Nous avons désormais à faire avec une « super ministre » en charge du Travail, de la Santé et de la Solidarité. Déjà les journalistes présentent Catherine Vautrin comme la ministre du Travail, oubliant au passage ses deux autres champs de compétence. Son portefeuille est tentaculaire, car il regroupe à lui seul, trois ministères dont celui, très stratégique, de la Santé. Avec la Solidarité, cela lui vaut d’occuper le quatrième rang dans la hiérarchie protocolaire.

Qui est Catherine Vautrin ?

Cette ministre n’est pas une novice : bien marquée à droite, elle fut porte-parole de Nicolas Sarkozy, lors de la primaire de la droite en 2016. Elle fut aussi trésorière nationale de l’UMP nommée par Jean-François Copé. Manifestant contre le mariage pour tous, auquel elle s’oppose en 2013, elle reste une bête noire pour les minorités sexuelles pour qui l’entrée de figures ouvertement hostiles aux droits LGBT fait l’effet d’une douche froide.

Catherine Vautrin est titulaire d’une maîtrise de droit des affaires, elle a notamment travaillé de 1986 à 1999, comme directrice marketing dans le groupe d’assurance santé américain Cigna, en France et à la direction Europe.

En 2004, elle entame une carrière ministérielle. Elle est nommée secrétaire d’État à l’Intégration et à l’Égalité des Chances dans le troisième gouvernement Jean-Pierre Raffarin sous la présidence de Jacques Chirac. Elle y restera six mois pour devenir ensuite Secrétaire d’État aux Personnes âgées. Là aussi, ce sera un passage éclair (sept mois et trois jours). Son plus long mandat en tant que ministre sera lorsqu’elle est nommée Ministre déléguée à la Cohésion sociale et à la Parité entre 2005 et 2007.

La solidarité désormais sous la coupe du ministère du Travail

Sous la présidence d’Emmanuel Macron, le ministère de la Santé, est passé du septième au quatorzième rang avant de disparaître en tant que ministère indépendant.  Ce n’est guère mieux pour la Solidarité. Elle était initialement un ministère de plein droit avant même la Santé. Il se nommait « Ministère des Solidarités et de la Santé » (depuis 2017 d’abord avec Agnès Buzyn puis Olivier Véran). Il est ensuite devenu en 2022 le ministère des Solidarités, de l’Autonomie et des Personnes Handicapées (avec Damien Abad puis Jean-Christophe Combe). Nous avons eu ensuite Aurore Bergé nommée le 20 juillet 2023 sous l’intitulé « ministère des Solidarités et des Familles ». Aujourd’hui, il n’y a plus de ministère des Solidarités. Il a été inclus dans ce « superministère » qui est d’abord celui du Travail. De son côté, le Logement ne dispose plus d’un ministère de plein exercice. Les ministères à dimensions sociales sont relégués.

Vous l’avez compris, la Solidarité n’a pas le vent en poupe au sein du nouveau Gouvernement.  À l’inverse, les ministères régaliens ou mettant en avant la « valeur travail », comme l’Économie, le Travail et l’Agriculture, sont tous montés en grade.

C’était déjà le ministère du Travail qui avait en charge la réforme du RSA inscrite dans la loi dite « pour le plein emploi ». Il ne s’agit plus d’être à proprement parler « solidaire » mais de promettre toujours plus de rigueur et d’obligations pour celles et ceux qui ont avant tout besoin de protections et que leurs droits soient respectés.

Une question demeure : qui va piloter politiquement la Direction Générale de la Cohésion Sociale ? La réponse devrait arriver prochainement. En attendant, on peut légitimement penser que certains au sein de cette Direction soient un peu esseulés et désabusés. On peut facilement comprendre leur désarroi.

Quant à l’avenir du Livre Blanc du Travail Social avec ses préconisations pour l’avenir des professions, qui va le porter au sein du nouveau Gouvernement ?

 

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Photo : Catherine Vautrin nouvelle ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités G.GaritanTravail personnel CC BY-SA 4.0

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