Migrants : une France solidaire en marche. La FAS fait face aux demandes d’évaluation administratives dans les CHRS

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Un peu partout, sur le territoire, des initiatives sont lancées en faveur des migrants, du réseau Sursaut, qui recense 1.000 initiatives locales, à SOS Alpes Solidaire, en passant par France Bénévolat, le réseau d’éducation sans frontière (RESF) ou encore les Réveillons de solidarité. Il existe bien une France généreuse qui met en pratique les principes de Solidarité et de Fraternité tels qu’ils sont inscrits dans la Constitution et la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Des citoyens se regroupent et sans toujours faire du tapage tentent d’apporter un réconfort ou plus simplement de quoi manger, dormir ou se réchauffer à celles et ceux qui ne sont pas accueillies dignement avec humanité sur notre territoire.

Face à cela, la machine administrative se met en marche. Elle programme une multiplication des contrôles qui ne peuvent que se traduire par de nombreuses expulsions comme s’il n’existait pas d’autres réponses possible que la reconduite à des frontières plus ou moins proches ce qui ne règle rien sur le fond.

La circulaire qui vise à évaluer la situation des personnes qui sont dans les centres d’hébergements et de réinsertion sociale (CHRS) provoque de fortes réactions. La FAS (Fédération des Acteurs Sociaux), à laquelle adhère une très grande majorité de  CHRS, vient de publier une note conséquente qui analyse le contenu des circulaires des 4 et 12 décembre derniers.

C’est sur ce sujet que trois anciens ministres et secrétaire d’Etat ont écrit à Emmanuel Macron pour dénoncer un « tri inadmissible » des étrangers avec le recensement prévu dans les centres d’hébergement d’urgence, qui selon eux «attente au respect des droits fondamentaux». «Imagine-t-on un centre humanitaire géré par une ONG laisser un gouvernement faire le tri des personnes à son entrée pour déterminer les catégories de personnes pouvant ou non avoir accès à des soins médicaux d’urgence?» s’interrogent Marie-Arlette Carlotti, actuellement présidente du Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées, et ses prédécesseurs à ce poste Xavier Emmanuelli et Louis Besson. Il rappellent dans un courrier daté de mercredi dernier, que l’accueil inconditionnel est « un marqueur fort des valeurs de solidarité et républicaines de notre pays »

Alors qu’en est-il de ces demandes administratives émanant pour l’essentiel du ministère de l’Intérieur ?

La première circulaire, datée du 4 décembre, concerne « l’évolution du parc d’hébergement des demandeurs d’asile et des réfugiés ». Cette circulaire prévoit d’orienter les personnes de nationalité étrangère vers des dispositifs au regard de leur statut administratif.

La seconde circulaire, datée du 12 décembre, organise « l’examen des situations administratives dans l’hébergement d’urgence » par des « équipes mobiles » composées d’un ou plusieurs agents de l’OFII et d’agents de la préfecture compétent en droit des étrangers : Après recensement et évaluation, ces «équipes mobiles» préconiseront « toute mesure utile pour assurer orientation individuelle adaptée chaque fois que c’est possible ».

La note de la FAS répond à plusieurs questions dont celle-ci : le centre d’hébergement a-t-il le droit de communiquer la liste des personnes de nationalité étrangère à l’équipe mobile OFII/service étrangers de la préfecture pour le recensement de ces personnes ? NON indique-t-elle.  « Vous ne pouvez pas participer au recensement des personnes de nationalité étrangère qui sollicitent un hébergement ou qui sont accueillies dans votre centre d’hébergement et transmettre ces informations à l’équipe mobile. Dans le cas contraire, vous engagez votre responsabilité pénale. »

Suivent ensuite des recommandations dès lors que ces équipes mobiles prennent rendez-vous pour « visiter » le centre d’hébergement.  « A la réception de cette annonce, la FAS invite les responsables du CHRS à adresser un courrier type demandant le fondement légal de cette intervention ».

La FAS rappelle que « le dispositif d’hébergement d’urgence a pour unique finalité d’apporter une aide et une protection aux personnes qui sont à la rue ou en difficulté et de les accompagner dans leur insertion sociale. Il n’est pas destiné à l’examen des situations administratives des ressortissants étrangers. Il n’appartient ni aux agents de l’OFII, ni aux agents du service étrangers d’intervenir dans les décisions d’admission ou des sorties des centres d’hébergement relevant du dispositif d’hébergement d’urgence ».

Dans le cadre de leur demande dans les centres qui les accueillent, les personnes ne peuvent pas être «identifiées» en vue de faire l’objet d’une «évaluation de leur situation administrative» par des agents de l’OFII et de la préfecture. La FAS rappelle à ce sujet que  le code de procédure pénale et le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile définissent déjà ces procédures. S’ensuit les différentes modalités prévues par les textes.

Il est aussi recommandé par la FAS d’alerter la Commission Nationale Informatique et Libertés (CNIL)  dont les coordonnées sont communiquées. En effet un recensement administratif tel qu’il est demandé oblige à créer un fichier. Celui-ci doit répondre à des règles très strictes de déclaration et de validation par la CNIL qui est, rappelons le, une autorité indépendante. Les CHRS ne sont pas autorisés à créer des fichiers de ce type même à la demande des autorités préfectorales. « En tant que responsable du traitement des données, vous devez vous assurer de la légalité des demandes de transmission d’informations à caractère personnel et demander systématiquement aux personnes qui vous en font la demande le texte légal qui les autorise à accéder aux informations demandées ainsi que les raisons pour lesquelles cette transmission d’informations est demandée (finalité).Vous pouvez à cette fin utiliser un courrier type et, le cas échéant, contacter la CNIL qui pourra vous informer sur vos obligations et vous conseiller »

La note de la FAS est particulièrement détaillée. Elle apporte les références juridiques à utiliser pour chaque situation.

Enfin elle recommande d’informer au mieux les personnes hébergées et de leur communiquer les instructions ministérielles tels qu’elles se mettent en place en  leur présentant l’objet de « l’examen de la situation administrative » afin qu’elles soient parfaitement informées. Elle suggère aussi l’importance  d’expliquer aux personnes concernées le cadre légal des vérifications du droit au séjour, et des procédures légalement définies par la loi pour déposer une demande d’asile ou de titre de séjour ainsi qu’à les accompagner dans le cadre de ces démarches.

Que croyez-vous qu’elles vont faire après cela ? Pensez-vous qu’elles vont attendre tranquillement que l’on viennent les recenser ? Notamment celles qui sont déjà déboutées du droit d’asile ?

 

La photo est de Ernest Morales Occupation de la Bourse du travail par les sans-papiers le 7 mai 2008. (Nuit d’occupation de la Bourse de travail par les sans-papiers du CSP 75). Certains droits réservés

 

article rédigé avec l’aide de Michelle Verrier Flandre

 

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