« La crise du travail social, c’est une crise de sens, de reconnaissance et de confiance »
Pierre Stecker, ex-directeur enfance et famille du conseil départemental de Seine-Saint-Denis, administrateur de l’association nationale des directeurs de l’action sociale et santé (andass), est interrogé par Solange de Fréminville qui œuvre à la Gazette des Communes. Il a été chargé en juin dernier du pilotage d’une mission de préfiguration du groupement d’intérêt public France Enfance Protégée. Cet article apporte son point de vue sur la crise actuelle au sein du travail social.
Il rappelle d’abord que c’est une crise de sens qui frappe tous les métiers de la relation à l’autre. L’idéal professionnel « est blessé, empêché, par le manque de moyens, le manque de solutions, alors que les différents publics qu’accompagnent les travailleurs sociaux, en particulier les enfants, sont dans des situations difficiles » dit-il. « La reconnaissance passe par une revalorisation des salaires des travailleurs sociaux. « Mais malgré les annonces dans un contexte d’inflation à 6 % environ, ces gestes forts se trouvent malheureusement dilués ».
Pierre Stecker parle aussi d’une crise de confiance dans l’encadrement, l’institution, et les réponses qu’ils peuvent apporter. Il y a été lui-même confronté. « Par exemple, un enfant est suivi par la Maison départementale pour les personnes handicapées (MDPH), mais il n’y a pas de place en institut médico-éducatif, ce qui empêche de traiter les problèmes qui relèvent du handicap. Cela entraîne une perte de confiance dans l’institution, la capacité à agir du professionnel, en le renvoyant à une forme d’impuissance ». (lire l’article de la Gazette)
Educateurs : primordiaux mais oubliés
Notez dans votre agenda ce rendez-vous qui vous est donné par LCP la chaîne parlementaire. Ce sera le mercredi 28 septembre à 20h30. Vous pourrez découvrir « Mes premiers pas d’éducateur » un documentaire signé Ketty Rios Palma. Elle a filmé le quotidien de Hannah, Halima, Laure et Adrien, quatre moniteurs-éducateurs en formation à l’Institut Régional du Travail Social de Paris Île-de-France.
Pourquoi ont-ils choisi ce métier ? Comment l’envisagent-ils ? Qu’en attendent-ils ? Chacun revient sur sa motivation et son choix de « venir en aide à ceux qui souffrent et dont personne ne veut s’occuper ». Ces futurs jeunes professionnels « confrontent leurs idéaux à la réalité du terrain » à travers les cours et les stages dans différentes structures d’accueil. Bien évidemment, ce n’est pas triste et plutôt instructif. « Pendant un an, des bancs de l’école aux stages sur le terrain, la caméra accompagne leurs premiers pas auprès de jeunes autistes, mineurs migrants, enfants placés ou SDF. Entre la quête d’un métier qui a du sens et l’envie d’être utile, ils se feront l’écho d’une société qui apprend à prendre soin des autres »
Il sera tout autant intéressant de suivre le débat qui suivra la diffusion de ce documentaire. Jean-Pierre Gratien recevra Ketty Rios Palma, la réalisatrice du film, mais aussi Hakan Marty, ancien enfant placé. Il est aujourd’hui éducateur spécialisé et auteur de : »Enfant mal placé » – Max Milo. Vous noterez aussi la participation d’Olivier Bonnin, (Super Olivier !), journaliste spécialisé au Média Social qu’on ne présente plus. (lire l’article sur LCP)
« Je suis assistante sociale et l’équilibre dans la relation avec la personne accompagnée est parfois difficile »
Voilà un témoignage intéressant publié par le Huffington Post. C’est celui de Mélany Vallès. Elle est assistante de service social à l’hôpital Sainte-Anne, GHU Paris. Elle parle de sa pratique professionnelle : « Nous mettons parfois tellement d’espoir dans la réussite d’un projet que la personne accompagnée, voulant nous faire plaisir, y adhère dans un premier temps. Mais elle ne tiendra pas » explique la jeune femme.
Nous dire qu’il ne peut réaliser ce projet commun serait trop compliqué. Alors elle fraude ! Elle le dit sans mot. Parce qu’elle a bien senti que nous n’étions pas prêts à entendre. Ou que nous ne le voulions pas. Car parfois, malgré toute notre bonne volonté, nous sommes persuadés que nous avons compris ce qui était bon pour l’autre. Nous avons trouvé la bonne marche à suivre, et nous ne lâchons pas.
Mine de rien, la professionnelle revient aux fondements du travail qu’elle semble avoir par moment oublié : « il faut savoir détricoter ce qui se cache derrière la demande initiale. De qui émane-t-elle ? De la personne elle-même ? Ou de sa famille, de la société, du travailleur social ? demande-t-elle. Il arrive que les usagers mettent en avant les demandes qu’ils pensent nécessaires (trouver du travail par exemple) pour atteindre l’idée qu’ils se font de la normalité. Il arrive aussi que ces demandes n’aient a priori aucun sens. Ou que l’usager les mette systématiquement en échec. Et à ce moment, ne pas lui en vouloir peut être une gageure ! Cela nous met face à notre impuissance.
Notre parcours est jalonné de ces remises en questions souvent instaurées par tel ou tel accompagnement, de ces faillites, de ces succès. Et quelque part, le mythe du bon usager est en corrélation avec celui du bon travailleur social. Eh oui, c’est bien comme ça que cela se passe trop souvent… (lire l’article du Huffington Post)
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Vous êtes allé(e) au bout de cette revue de presse ? Bravo et merci ! Merci aussi à Michelle Flandre qui m’a aidé à la réaliser