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Le populisme, moteur des formes silencieuses de violence et de la culture du viol à l’encontre des femmes

« Comment se fait-il que ceux qui ont le pouvoir d’infliger le plus des violences soient aveugles aux conséquences de leurs actes ? » Tout le monde reconnaît la violence quand il la voit, mais les formes de violence les plus répandues et insidieuses sont celles qu’on ne peut pas voir nous explique Jacqueline Rose co-directrice du Birkbeck Institute for the Humanities au Royaume-Uni. Dans son livre publié par The Gardian, L’auteure prend d’abord pour exemple ce qui s’est passé aux États Unis sous la présidence de Donald Trump pour expliquer son propos. Ce président si controversé a signé un décret interdisant le financement par l’État américain  des groupes qui partout dans le monde apportaient des conseils en matière d’avortement et de protection des femmes. 

La décision signifiait une augmentation des décès par avortement illégal pour des milliers de femmes à travers le monde notamment  dans les pays en voie développement. Ses effets ont été aussi cruels que précis. Aucune organisation non gouvernementale (ONG) recevant des fonds américains ne pouvait désormais accepter un soutien non américain, ni faire pression sur les gouvernements du monde entier, au nom du droit à l’avortement.

Une série d’interdictions d’avortements a suivi dans les États américains conservateurs détenus par les républicains. En novembre 2019, l’Ohio a présenté à la législature de l’État un projet de loi qui comprenait l’exigence qu’en cas de grossesse extra-utérine, les médecins devaient réimplanter l’embryon dans l’utérus de la femme ou faire face à une accusation de «meurtre par avortement».  C’est énorme, mais on en est là dans le pays de l’oncle Sam même si depuis Joe Biden a tenté de limiter certaines décisions.

La « violence régnante » une réalité alimentée par le populisme

La résurgence du populisme alimenté par les fausses informations est devenue une réalité du 21e siècle. Mais il faut aussi comprendre que la haine extrémiste, notamment contre les femmes, est désormais une réalité en Occident. Des pays dirigés par des régimes autoritaires sont porteurs d’une violence institutionnelle majoritairement masculine – Il s’agit selon l’expression consacrée d’une « violence régnante »,  car elle est portée par l’appareil d’État.  – Elle se présente toujours comme défendant les droits des innocents. « Ces hommes sont des tueurs qui s’ignorent, car le caractère meurtrier de leurs décisions est invisible » pour le monde et le grand public. Les avortements illégaux font partie des faits sociaux qui sont cachés malgré les dégâts qu’ils provoquent. Il ne vient pas à l’esprit de ces dirigeants que leurs décisions narcissiques peuvent faire du mal. Ils ne s’inquiètent pas de la nature ni des conséquences de leurs décisions.

Une telle violence à notre époque se nourrit d’une forme de cécité mentale. Telle une plante de serre, elle s’épanouit sous la vapeur enivrante de la propre conviction de chacun d’être dans le bien, sans discussion possible ni contradiction. Sûrs d’eux, ces hommes au pouvoir infligent à la population qu’ils dirigent des violences invisibles, car portées par la loi et son appareil d’État. Les populistes qu’ils sont se nourrissent de leurs convictions sans tenir le moindre compte de la réalité sociale et humaine. Ils appliquent à la lettre leurs idées qu’ils considèrent comme la vérité.

Dans les pays civilisés tels l’Angleterre, des « actes de guerre » contre les pauvres.

En janvier 2019, les ministres conservateurs du Royaume-Uni ont recommandé que les allocations de subventions aux autorités locales ne soient plus pondérées en fonction de la pauvreté, de sorte que l’argent pourrait être redirigé vers les comtés conservateurs les plus aisés (Cette décision a été décrite comme une «brutalité politique» et «un acte de guerre» contre les pauvres).

Ces moments de violence évoluent en silence. Les femmes d’aujourd’hui qui sont  souvent les plus touchées, car elles sont menacées par le Brexit avec la perte de l’égalité et de la protection, y compris les droits au travail et le financement des services pour la protection des femmes. C’est une inquiétude réelle dans ce pays.

Le mouvement était engagé avant le Brexit : le nombre de viols signalés à la police en Angleterre et au Pays de Galles a doublé entre 2013 et 2018, tandis que les poursuites ont diminué.  La prostitution liée à la pauvreté, autre forme de violence s’est développée. Un comité de députés au Royaume Uni  a constaté que les femmes sont de plus en plus obligées de se livrer au commerce du sexe pour obtenir de l’argent pour la nourriture et le loyer après avoir désespérément fait face à des difficultés financières depuis la réforme sociale du crédit universel.

Au Brésil c’est pire encore

Dans ce pays, le président Jair Bolsonaro avait dit à Maria do Rosário, une  membre du Congrès, qu’il ne la violerait jamais parce que «vous ne le méritez pas ». L’insulte est  l’exemple par excellence du langage offensant que Bolsonaro  utilise contre les femmes, les homosexuels, les Afro-Brésiliens et les peuples autochtones. Cette violence là n’est pas non plus condamnée par les tribunaux.

Un autre élément sans doute le plus révélateur de tous, il a plaisanté  sur le fait que seul un «moment de faiblesse» peut expliquer pourquoi l’un de ses cinq enfants «est sorti femme». Ses paroles résonnent avec une violence sexuelle potentielle, pas seulement parce qu’il tient clairement toutes les femmes dans un mépris effronté. Il s’agit de faire en sorte que les femmes soient des femmes et rien d’autre, les considérer de telle sorte peut être compris comme l’un des principaux motifs du viol.  ( Au Brésil, une femme est victime de violence physique toutes les 7,2 secondes.)

En Espagne l’extrême droite est en embuscade

Le parti d’extrême droite Vox a réalisé d’énormes gains dans ce pays lors des élections nationales de 2019, entrant au Congrès pour la première fois.  Ce parti publiait cette année-là un dépliant, qui ciblait spécifiquement ce qu’il nommait le «féminisme suprémaciste», les «militants radicaux des droits des animaux» et le lobby LGBTQ. Le «féminisme suprémaciste» est le terme sœur de « féminazis », inventé par l’animateur de radio de droite américaine Rush Limbaugh pour décrire les féministes radicales – qui, selon lui, «veulent voir autant d’avortements que cela est possible». Vox milite désormais pour l’abrogation des lois contre la violence sexiste, pour la suppression de toutes les procédures de changement de sexe et d’avortement des services de santé publique et pour la dissolution de toutes les organisations féministes financées par le gouvernement fédéral.

Jusqu’où cela peut-il aller ?

Ce texte fait appel à des articles du Guardian notamment « Damage: the silent forms of violence against women » rédigé par Jacqueline Rose auteure de »On Violence and On Violence Against Women »

 

photo : PRO Gage Skidmore  Donald Trump parlant à ses supporters lors de sa campagne au mémorial Veterans Coliseum at the Arizona State Fairgrounds à Phoenix, Arizona.

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