Les conditions de la réussite de la participation des "usagers" dans les politiques sociales…

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Le groupe de travail du Haut Conseil du Travail Social qui traite la participation des personnes accompagnées a auditionné vendredi dernier plusieurs intervenants sur ce sujet. Cyprien Avenel  adjoint au chef de la mission analyse stratégique, synthèses et prospective à la DGCS nous a ainsi fait part d’une étude publiée en septembre 2016 sur la participation des « usagers » dans les politiques sociales.  Cette étude vise à donner des clés de compréhension du processus de participation des usagers. Elle a été réalisée par 6 élèves administrateurs et administratrices territoriaux de l’INET  (Promotion Hannah Arendt). En voici l’essentiel

Vous pouvez télécharger le rapport complet ici et, pour les plus pressé(e)s sa synthèse ici. Que nous a présenté Cyprien Avenel ? D’abord le cadre de cette étude :  Quatre terrains  ont été retenus : le département du Nord, la ville de Lille, le département du Val-de-Marne et la ville de Créteil. En effet, les communes et les départements sont les collectivités territoriales qui participent le plus à la conduite des politiques sociales territorialisées. 45 entretiens ont été réalisés (4 élus, 9 directeurs généraux et directeurs généraux adjoints, 19 directeurs ou chefs de service et chefs de projet, 3 chargés de mission, 5 intervenants d’action sociale, 6 usagers/bénéficiaires et 2 partenaires. Pour que l’échantillon soit représentatif, la parité a été respectée entre décideurs publics et acteurs de terrain ). Le point de vue des usagers est resté limité à ces 6 personnes. Les cadres sociaux et administratifs étaient majoritaires.

Il s’agissait aussi de tenter de mesurer l’écart qui existe entre les intentions, les textes qui invitent ou demandent que les personnes accompagnées par les services sociaux participent aux instances de réflexions et aux pilotages des politiques publiques. Ce n’est pas vraiment acquis. Et travailler sur la conception même de ces politiques nécessite un minimum de préparation. « Ce n’est pas évident »

Il a été noté 3 aspects positifs pour les personnes qui  participent et sont associées aux travaux des collectivités territoriales :

Le premier effet de la participation pour les personnes concernées est celui d’ obliger en quelque sorte l’usage d’un vocabulaire davantage accessible à tous, facilitant information et visant à la simplifier la « complexité administrative » que nous connaissons bien.

Le deuxième effet pour  les personnes est une forme de renforcement d’un sentiment de valorisation citoyenne, au-delà du statut assigné de « bénéficiaire des aides sociales ». Ce sentiment peut cependant entraîner un effet pervers : le fait de participer  serait « en soi » suffisant et ne donnerait pas toujours  le désir d’aller au-delà. 

La troisième conséquence de cette participation se traduit par une diminution de ce que l’on nomme le non-recours. Mieux informée, avec un langage clair et explicite, la personne hésite moins à faire valoir ses droits car ceux-ci lui paraissent plus accessibles.

En fait, qu regard des expériences étudiées, l’information et la participation sont relativement aisées à mettre en place mais il reste beaucoup plus difficile de s’engager dans une véritable co-construction. Le passage à une forme de  co-conception d’une politique sociale ou un dispositif local est encore plus compliqué à mettre en oeuvre.

Cette participation des personnes a aussi des effets positifs du coté des élus locaux. En participant aux échanges avec les « usagers » les représentations que certains élus peuvent en avoir sont modifiées. Au final, certains d’entre eux ne souhaitaient pas « partager le pouvoir » au nom de la démocratie représentative. Mais ils ont pu constater qu’ils restaient gagnants en partageant leur pouvoir de décision ou du moins en modifiant leurs choix initiaux pour tenir compte des préconisations apportées par les personnes concernées.

Qu’en est-il du coté des travailleurs sociaux ??? Certains renouent avec une forme de « joie professionnelle » précisera Cyprien Avenel. Leur participation et le soutien qu’ils assurent aux groupes de personnes à travers les actions collectives ne sont  pas vécus comme une charge même si cela est assez prenant et engageant. Certains disent même qu’ils renouent à la source du travail social. Cette forme d’engagement est vécue positivement. C’est « stimulant » disent certains.

Pour favoriser l’effectivité de la participation, il est par ailleurs important de se placer encore plus près du point de vue des participants visés : information, accessibilité (lieux, horaires, langage utilisé) adaptée à la diversité, voire l’hétérogénéité des publics, notamment les plus fragiles, dans une perspective d’inclusion large de toutes les personnes concernées dans les démarches et dispositifs de participation

Cyprien Avenel a conclu son intervention en indiquant les éléments de la réussite de la participation des personnes accompagnées aux politiques publiques : 

La démarche gagne très nettement à être impulsée et défendue au plus haut niveau décisionnel de la collectivité (politique et administratif). Il est par ailleurs nécessaire que les élus puissent envisager la participation sous l’angle d’un appui renforçant la pertinence et la légitimité de leurs décisions, plutôt que comme une menace pesant sur l’étendue de leurs prérogatives.

« les intervenants sociaux ont besoin que l’encadrement mette à leur disposition les moyens de mise en œuvre de la participation : du temps dédié, des moyens d’organisation et un outillage méthodologique, apporté notamment via la formation continue ».

Certains penseront que tout cela est évident. Malheureusement force est de constater que dans certains Départements et Agglomérations, ces conditions de la réussite pour une participation effective de la population ne sont pas vraiment réunies, d’où l’importance de les rappeler car elles restent à mettre en oeuvre dans de nombreux endroits.

Photo : Cyprien Avenel lors de son audition

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