Dans un monde de plus en plus numérisé, la technologie joue un rôle croissant dans de nombreux aspects de notre vie quotidienne. Cependant, elle a également ouvert de nouvelles voies pour des activités criminelles, y compris la traite des êtres humains. Un rapport du Conseil de l’Europe piloté par Paolo Campana, professeur agrégé de l’université de Cambridge explore cette problématique complexe et propose des stratégies pour lutter contre ce fléau.
Intitulé « La traite des êtres humains facilitée par la technologie », il met en lumière les questions que pose les outils numériques dans ce contexte particulier. Il souligne les difficultés rencontrées dans la détection, les enquêtes et les poursuites qui la concernent. Ces limites sont liées à la nature transnationale de la criminalité en ligne, l’anonymat offert par Internet et les technologies de cryptage, ainsi que la rapidité avec laquelle les informations peuvent être partagées et supprimées.
Par exemple, le rapport cite des cas où les trafiquants ont utilisé des jeux vidéo pour entrer en contact avec des victimes potentielles. Il note également que les technologies de l’information et de la communication (TIC) sont utilisées pour maintenir le contact avec les victimes de la traite, même lorsqu’elles ne sont plus en situation d’être exploitées. Il s’agit alors de les empêcher de porter plainte et de se tourner vers la justice en faisant pression sur eux et leurs familles.
La technologie dans la traite des migrants
Parmi les plus vulnérables à ces abus se trouvent les migrants, fréquemment pris au piège dans des réseaux de traite d’êtres humains. Les réseaux sociaux sont utilisés par les trafiquants pour recruter des victimes. Des promesses d’emploi et de meilleures conditions de vie leur sont faites. Ils se retrouvent ensuite exploités dans des conditions inhumaines, notamment pour payer leur passage en Europe. Les plateformes comme Facebook et WhatsApp sont devenues des outils de choix pour les mafieux qui organisent ce trafic humain.
La géolocalisation peut aider les migrants à trouver leur chemin, mais elle est aussi utilisée par les trafiquants pour suivre leurs mouvements. Des applications mobiles malveillantes sont aussi installés sur leurs smartphones, permettant aux responsables des passeurs de suivre leur emplacement en temps réel et de les retrouver à l’arrivée pour continuer à leur soustraire de l’argent. Un autre exemple pourrait être donné sur l’usage de ces applications pour recruter des femmes en vue de les prostituer. Là aussi leur surveillance via leurs smartphones est redoutable.
Le numérique pour la lutte contre l’exploitation
Malgré ces réalités, le rapport souligne aussi que la technologie peut être un outil puissant pour lutter contre la traite des êtres humains. Il propose une série de stratégies et de bonnes pratiques pour utiliser la technologie de manière efficace et éthique. Cela comprend l’utilisation de l’intelligence artificielle et l’analyse de données pour identifier les réseaux de traite. La surveillance et le repérages des pratiques via les médias sociaux et d’autres plateformes en ligne peuvent aussi sensibiliser le public à cette question.
Le rapport mentionne des initiatives technologiques développées par des ONG pour encourager les victimes à se signaler en ligne. Ces structures peuvent établir des contacts avec les populations à risque, sensibiliser les groupes vulnérables et à risque, et rechercher de l’aide, au moyen d’applications et de sites web conçus à cet effet.
Il met également en évidence l’importance de la formation et des instruments juridiques appropriés pour lutter contre ce fléau. Il souligne que les forces de l’ordre et les autres parties prenantes doivent être formées aux dernières tendances et technologies utilisées par les trafiquants. De plus, il appelle à des lois et des réglementations plus strictes pour réguler l’utilisation de l’Internet dans ce contexte.
Enfin, le rapport souligne l’importance de la protection des données et des droits humains dans cette lutte. Il met aussi en garde contre la suppression de l’accès à la technologie pour les victimes, car cela pourrait augmenter leur dépendance et les exclure un peu plus. Au lieu de cela, il préconise de promouvoir un accès sécurisé à la technologie, en plaçant toujours l’intérêt supérieur de la victime au centre de toute action.
Un sujet trop peu exploré : la technologie qui oppresse
Ce rapport du Conseil de l’Europe mérite d’être lu et connu. Il nous alerte sur ce sujet délicat. Il suggère des recommandations pour lutter contre cette nouvelle forme d’oppression via la technologie. Il souligne que, bien que celle-ci puisse présenter des défis, elle peut également être un outil pour lutter contre ce fléau.
Il est essentiel que les gouvernements, les entreprises technologiques et les autres parties prenantes travaillent ensemble. Il s’agit de mettre en ouvre des outils pour utiliser la technologie de manière éthique et efficace dans cette lutte sans fin de l’exploitation des hommes et des femmes par leurs semblables. On en est encore loin malheureusement.
Source : Rapport du Conseil de l’Europe