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La relation d’aide ou comment aider à définir une priorité…

Interrogeons-nous aujourd’hui sur ce qui se joue dans la relation d’aide entre un travailleur social et une personne dès lors que la rencontre a lieu. La rencontre, est une entrevue, une conversation concertée entre deux ou plusieurs personnes. Elle est aussi une pratique qui fait que le travailleur social et la personne sont centrés ensemble sur un même objectif avec un accord commun. Il s’agit de tenter de  résoudre une difficulté. L’un et l’autre, tout en n’étant pas à la même place, se respectent, ne se jugent pas et ne mettent pas en doute systématique la parole de celui qui parle. Lorsqu’il n’y a pas ce type de « rencontre », il reste difficile d’avancer et de construire quelque chose avec la personne. 

Sans réelle rencontre nous sommes dans un drôle de jeu social. La personne cherche à obtenir ce qu’elle est venue chercher. Une aide financière, un conseil qui va dans son sens, c’est-à-dire entendable pour elle. Elle s’appuie sur ses représentations de ce que peut faire un travailleur social. Elle ne s’inscrit pas du tout dans un processus de changement. Elle attend un service qui doit lui être rendu comme lorsqu’elle va dans un commerce.

Le travailleur social lui, a en poche sa méthodologie, mais aussi certaines capacités : celle qui consiste par exemple à écouter sans juger. Il a aussi appris pendant sa formation ce que peut représenter la complexité des relations humaines. Certains, expérimentés, ne s’étonnent plus de rien ou presque. Mais ceux-là savent aussi écouter une demande, la décrypter, la comprendre et évaluer rapidement ce qui est en jeu.

La relation d’aide est une question de positionnement.

On l’oublie parfois mais si une personne prend rendez-vous pour une aide, c’est qu’elle reconnait au professionnel qu’elle va rencontrer une compétence, un savoir qui peut lui être utile. Elle est en position d’attente face à une parole « d’expert ».  Or nous connaissons nos limites en matière d’expertise. Nous savons aussi que le monde de l’expertise est un chemin parsemé d’embûches et qu’il ne suffit pas d’être considéré comme expert pour savoir aider une personne.

La question pour le professionnel, reste alors son positionnement ou si vous préférez sa façon d’agir : Est-ce qu’il reste derrière son bureau avec son expertise, son ordinateur, les notes de service et les sites spécialisés tels les ASH, Lien Social ou le guide familial ?

Que va faire le travailleur social ?

Est-ce qu’il va chercher à donner la « bonne réponse », celle de cet expert tant attendu et reconnu qui, grâce aux outils puissants qu’il a à sa disposition aurait réponse à tout ou presque ? Ou va-t-il tenter de comprendre l’autre dans son parcours, lui expliquer ce qu’il perçoit de lui et, ensemble c’est-à-dire en changeant de place pour se mettre en côte à côte et essayer d’avancer ?

Ce sera sans doute un peu des 2 à la fois. Mais il me semble que la position d’expertise, celle du sachant est à terme vouée à l’échec. À mon sens elle s’inscrit dans une logique de domination et renvoie la personne aidée à ses propres limites ou pire ses « incompétences » et à ses manques. Or notre travail est aussi de repérer les compétences de la personne, l’aider à avoir confiance en elle et à l’aider prendre conscience de ses propres capacités et les solutions qu’elle peut mettre en œuvre.

Il n’y a pas de réponses préprogrammées

Lorsque que l’on travaille sur une situation, utilisons-nous la bonne « recette » ? Celle qui consiste à choisir les ingrédients indiqués et à suivre une procédure codifiée et normalisée dans nos programmes informatiques ?  Ou travaillons-nous avec une personne dans la proximité et dans la subjectivité ? Ce positionnement de proximité pour un travail social et de recherche de solution avec la personne est une posture que nous revendiquons et qui est notre particularité même si cela n’est pas toujours bien compris.

Cette posture professionnelle est très majoritairement inconnue de nos dirigeants. Pour eux, il s’agit d’apporter les bonnes réponses, voire de contrôler, et de donner la bonne direction.. Ce processus de travail d’aide et d’écoute est masqué, et s’il est masqué, il ne peut pas pris en compte. Il ne donne pas à voir ce que vous mettez en place.

Prenons un exemple

Récemment, j’étais avec une assistante sociale de secteur qui me dit « j’ai complètement changé ma méthode de travail sur le budget. Auparavant, je partais toujours sur la colonne « recettes/dépenses », le truc classique. Aujourd’hui, je pars de la feuille blanche, je mets une feuille vierge devant la personne sans aucune colonne. Elle va d’abord écrire sur la feuille ce qui est important pour elle. Nous partons de là et on construit ensemble un budget à partir de ses priorités» .

Revenir à l’essentiel

La priorité de la personne n’est pas forcément celle du travailleur social. Il s’agit de comprendre comment chacun se situe, ce qui est important, ce qui ne l’est pas. Cela peut être pour certains fumeurs d’acheter ses cigarettes. Sommes-nous là pour dire que « ce n’est pas bien de fumer et donc «n’achetez pas de cigarettes » ou encore « ah oui, vous avez Canal+ mais cet abonnement, il faut l’arrêter ». Est-ce que vous êtes dans cette logique-là certes un peu caricaturale, ou est-ce que vous êtes dans qu’est-ce qui est important pour la personne et comment les aider à se repositionner sur l’essentiel.

Or aujourd’hui de nombreuses personnes perdent le sens de l’essentiel. Comment essayer de revenir sur les questions de l’essentiel tout en respectant les priorités de la personne ou du groupe ? Ces questions là aussi sont masquées, elles ne sont pas explicitées. Elles peuvent être abordées dans l’entre-soi, entre travailleurs sociaux, elles peuvent l’être dans un centre de formation mais malheureusement elles ne vont pas au-delà. Et ça c’est bien dommage

Note ceci est un extrait d’une intervention sur l’évaluation que j’avais faite lors d’une conférence à Canteleu (Caen)

Photo créé par freepik – fr.freepik.com

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2 Responses

  1. « Le travailleur social lui, a en poche sa méthodologie, mais aussi certaines capacités : celle qui consiste par exemple à écouter sans juger. »
    Il me semble cher ami que la réalité est sans doute plus complexe. Le jugement étant une capacité spécifiquement humaine, le jugement hâtif ( la plupart du temps moral) relève quasiment du réflexe. Le travailleur social doit travailler en permanence et toute sa vie professionnelle la (relative) mise à distance de ce type de réaction spontanée. Il le fera individuellement mais mieux encore avec l’équipe dans laquelle il s’inscrit et qui devient un moyen efficient afin de caler collectivementune manière d’être professionnelle à l’autre.

    1. Oui cher ami, tu as raison Gilles, c’est pourquoi j’écris « par exemple » quand je parle de certaines capacités. On ne peut tout dire ni écrire de la complexité notamment sur un blog qui ne remplace pas les articles de fond tels ceux qui sont publiés sur CAIRN. Évidemment le travailleur social se doit de travailler en permanence son positionnement professionnel. Je crois savoir d’ailleurs que nos professions sont souvent très demandeuses de formations continues. Ta réaction m’encourage aussi à préparer un article sur la complexité en travail social parce que là il y a beaucoup à dire… Dès que j’aurais un peu de temps… Amitiés Didier

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