La bibliothèque, refuge des personnes en situation de précarité
S’il est des structures qui savent remarquablement bien s’adapter, ce sont les bibliothèques, qui dans les villes savent souvent innover. Bien loin de se limiter aux prêts de documents, ces lieux ont su adapter leurs services aux besoins des SDF, des réfugié·es ne parlant pas français ou aux personnes à très faibles revenus.
Elles innovent aussi pour proposer des accueils numériques et permettent à ceux qui n’ont pas d’ordinateurs de découvrir et d’apprendre à maitriser les méandres de l’internet. Le journaliste Benjamin Monnet est allé à Rennes à la découverte de sa bibliothèque qui dispose d’un espace baptisé « Vie du Citoyen ». «Ce lieu est très identifié par les personnes sans domicile fixe ou en parcours migratoire. Des structures qui les accompagnent leur indiquent qu’ici, il est possible de se connecter à internet ou de recharger son téléphone. Nous voulons également que les gens puissent se retrouver à la bibliothèque: cela passe par l’aménagement de l’espace et du mobilier.» explique Angélique qui y travaille. « le rôle d’une bibliothèque est également de permettre à la population de maîtriser sa citoyenneté et d’améliorer son pouvoir d’agir »
Slate fait aussi référence aux travaux de Serge Paugam, sociologue, directeur d’études à l’EHESS et directeur de recherche au CNRS qui connait bien services sociaux. Il a a co-écrit l’ouvrage Des pauvres à la bibliothèque. Enquête au Centre Pompidou aux Presses Universitaires de France, en 2013. Il analyse: «Les bibliothèques ne sont pas des services sociaux et pourtant elles rendent des services que l’on pourrait qualifier de sociaux. La différence est que les personnes pauvres peuvent s’y sentir plus libres alors que tout leur rappelle leur condition d’assistés quand ils sollicitent l’aide d’un professionnel du social. Ils peuvent échapper dans certains cas, au moins temporairement, à la stigmatisation qu’implique presque inévitablement le contrôle exercé sur leur vie privée dans les institutions d’action sociale.» (lire le reportage très intéressant de slate.fr)
- lire aussi sur slate.fr : « Dans les grandes villes, l’écologie doit mieux comprendre les besoins des quartiers populaires »
La crise du Covid-19 met en lumière la nécessaire remise en cause de l’aide alimentaire
Avec la crise du Covid-19, de nombreux foyers ont été précipités dans une grave situation d’insécurité alimentaire expliquent 3 universitaires dont 2 interviennent à AgroParisTech (Paris Saclay). Grâce à la réactivité des associations et à une multitude d’initiatives locales, citoyennes et bénévoles, l’aide alimentaire a pu être multipliée au moins par 3.
Un casse-tête logistique et un dispositif bureaucratique
« Encadrée par des politiques publiques, l’aide alimentaire est un enchevêtrement de diverses sources de financement (public, privé, bénévolat) croisant différentes formes de distribution par le biais d’une myriade d’associations de tailles et missions différentes. Ces politiques génèrent un énorme dispositif bureaucratique et un véritable casse-tête logistique. »
Nicole Darmon, Catherine Gomy, et Doudja Saïdi-Kabeche expliquent aussi que « sur la base de trois études, il apparaît qu’entre 3 et 8 millions de personnes éprouvent des difficultés financières pour s’alimenter, mais n’ont toutefois pas recours à l’aide alimentaire. Quand à ceux qui en bénéficient, trop souvent, l’aide apportée présente des déséquilibres nutritionnels, liés au manque de produits frais et de certaines familles de denrées (le pain par exemple).
Il faut préciser aussi que la couverture territoriale de l’aide alimentaire est inégale. Les critères d’accès sont parfois spécifiques aux associations et sont mal connus ou mal compris des utilisateurs. Le volontariat rend le système dépendant de la disponibilité des bénévoles.
Pour la mise en place d’une sécurité sociale de l’alimentation.
Il s’agirait selon les auteurs de l’article de passer de l’assistance alimentaire à l’instauration d’un droit à l’alimentation, à savoir un accès autonome de chacun·e à son alimentation. Un budget mensuel de l’ordre de 120 euros par personne serait attribué (soit le montant minimal nécessaire pour accéder à une alimentation équilibrée) pour l’achat d’aliments dans des circuits d’approvisionnement répondant à des critères de santé, d’environnement et d’éthique. (lire l’article des 3 universitaires publié sur le site The Conversation)
« Benni » : un film stupéfiant de réalisme
Voilà un film qui rend hommage aux efforts déployés des travailleurs sociaux, tout en mettant en scène l’impuissance qui les englue parfois. Le site de Lien Social commente le film « Benni » qui met en scène les troubles du comportement d’une enfant de 9 ans aux prises avec les services sociaux mis successivement en échec.
On rencontre bel et bien cette personnalité au travail même si elle n’est pas représentative des publics accompagnés par la protection de l’enfance. Et ce n’est pas faire injure aux professionnels qui tentent de faire au mieux que de constater qu’ils échouent. Non par manque de savoir-faire, mais parce qu’on n’accueille ces problématiques dans de gros internats, avec des encadrements sous équipés, en utilisant des approches traditionnelles.
Beaucoup de bienveillance, de patience et de contrôle de soi, c’est ce qu’il faut déployer pour réussir à accompagner de telles personnes, sans garantir d’y arriver. (lire l’article de Lien Social)
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Une bourse étudiante « automatiquement » pour les sortants de l’ASE (Le Média Social)
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Opinion : Pour un revenu minimum vital face à la crise (Les Echos)
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Qui est Claire Hédon, pressentie comme nouvelle Défenseure des droits ? (Le Figaro)
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Sélection des articles réalisée avec l’aide de Michelle Verrier Flandre
Cette revue de presse a été rédigée en partie par mon collègue Tom Léducspé… Merci à lui pour ce coup de main