Ce qui se passe en Grèce ne peut qu’intéresser les travailleurs sociaux, car au delà la crise économique et financière, c’est bien la population la plus fragile de ce pays qui a le plus subi la déliquescence de l’Etat providence, c’est à dire l’Etat qui protège et permet d’assurer l’essentiel des droits fondamentaux dont ceux de se loger, se nourrir et de se soigner…
Le gouvernement grec s’est engagé sur plusieurs mesures sociales très importantes, le tout est désormais de savoir si le système financier international le permettra, mais en tout cas, c’est un véritable bras de fer qui s’engage au prix de la renégociation d’une dette qui s’est amplifiée au rythme des intérêts des préteurs.
Le premier des 4 piliers de cette reprise en main de la situation est social : il s’agit de faire face à la crise humanitaire. La première déclaration d’Alexis Tsipras « Aucun de nos concitoyens à partir de maintenant ne doit être seul, sans défense face à la crise », a t-il précisé, fixant en priorité l’assistance à ceux qui sont privés des produits et des services de première nécessité comme la nourriture, le chauffage et les soins médicaux. «Notre premier affrontement sera avec cette intolérable réalité, et nous ferons tout notre possible pour la changer».
La Grèce est dans une situation sociale extrêmement difficile. Avant le début de la crise financière, ce pays avait le taux de suicide le plus bas en Europe. Mais le ministère de la Santé grec indique que le nombre de personnes qui ont mis fin à leur vie a augmenté de 40% au premier semestre 2011. Un article du Washington Post avait décrit ce phénomène pour la Grèce dès aout 2012
Le détail des actions sociales est le suivant. Problème, il est d’un coût estimé à environ 2 milliards d’euros. Il correspond à une grille détaillée d’interventions de première urgence, qui cherche à instaurer un filet de protection en faveur de la population la plus vulnérable :
• Électricité gratuite pour 300.000 foyers, qui vivent à l’heure actuelle sous le seuil de pauvreté ; jusqu’à 300 kWh par mois et par famille, soit 3600 kWh par an. Coût total 59,4 millions d’euros.
• Programme de repas subventionnés pour 300.000 familles sans aucun revenu. La mise en place se fera par l’intermédiaire d’une agence publique de coordination, en coopération avec les autorités locales, l’Église, et les organisations en charge de la solidarité. Coût total 756 millions d’euros.
• Programme d’accès au logement. L’objectif à atteindre est la fourniture de 30.000 appartements, dans un premier temps (30, 50, 70 m²), grâce à un système de loyers subventionnés, à 3 euros le m². Coût total : 54 millions d’euros.
• Restitution de la prime de Noël, en tant que treizième mois, à 1.262.920 retraités dont la pension est inférieure ou égale à 700 euros par mois. Coût total 543,06 millions d’euros.
• Soins médicaux, et pharmaceutiques gratuits, pour les chômeurs sans assurance. Coût total 350 millions d’euros.
• Carte spéciale, donnant accès aux transports publics pour les chômeurs de longue durée, et pour les personnes vivant en-dessous du seuil de pauvreté.
• Annulation du nivellement de l’impôt spécial à la consommation, sur le gazole domestique et automobile. Ramener pour les foyers le prix de base du chauffage au fuel à 0,90 euros par litre, au lieu des 1,20 en vigueur actuellement. Un bénéfice est attendu.
par ailleurs un « impôt injuste » est abrogé et sera remplacé par un autre qui mettra à contribution les classes aisées : il s’agit de l’abrogation immédiate de la nouvelle taxe foncière (ENFIA) car elle est le symbole de d’une forme d’injustice sociale. Au service des grands patrimoines, les dirigeants précédents ont créé une taxe sans l’addition globale de la valeur de toutes les propriétés, sans l’établissement d’un barème de taux progressif, ou d’un seuil d’ exonération, c’est une taxe prélevée au détriment des personnes pauvres et des couples à faibles revenus avec des enfants qui ont comme patrimoine unique leur résidence principale.
les mesures pour le redémarrage de l’économie sont tout aussi « sociales » sur le fond : « Le deuxième pilier est centré sur des mesures destinées à redémarrer l’économie. La priorité est donnée au soutien à l’économie réelle par la suppression d’impôts, au soulagement les citoyens qui plient sous le fardeau de la finance, à l’injection de liquidités, ainsi qu’à l’accroissement de la demande. Les impôts trop élevés, que paient la classe moyenne et ceux qui ne pratiquent pas l’évasion fiscale, prennent une partie importante des citoyens au piège d’une situation qui menace directement leur statut face à l’emploi, leurs biens privés, aussi modestes soient-ils, et jusqu’à leur existence physique, ainsi que le prouve le nombre sans précédent de suicides. »
Le mystère est aujourd’hui de savoir comment tant de gens réussissent à survivre sans emploi ou des prestations de chômage. La réponse est qu’ils doivent compter sur leurs familles. « La famille est ce qui compte ici – ce est ce qui nous sauve. Si nous suivions le modèle anglais, la moitié des gens seraient dans la rue ». « L’Etat grec se est montrée largement incapable de faire face aux besoins de 26% de la population sans travail dont les trois millions de personnes qui vivent en dessous du seuil de pauvreté.
Mais voilà, Pour certains commentateurs et non des moindres « Le programme de Syriza ne vaut même pas le papier sur lequel il a été écrit ! ». Au regard de telles réactions, il y a lieu de suivre de prêt la suite des événements sociaux et économiques dans ce pays.
photo : annalisa ceolin NO new Flickr « Tsipras, Syriza !!! ..Thank you Grecia! » mis en ligne le 25 janvier 2015 Certains droits réservés