Services publics : le côté obscur de la dématérialisation
Isabelle Raynaud et Laura Fernandez Rodriguez dans la Gazette des Communes nous rappellent le contexte actuel de la dématérialisation massive des procédures administratives. « Il est crucial d’apporter des solutions et des alternatives pérennes aux 13 millions de personnes aujourd’hui éloignées du numérique » écrivent-elles. Mais cet article va un peu plus loin et c’est ce qui fait son intérêt.
Les journalistes reprennent les propos de Pascal Plantard professeur d’anthropologie des usages des technologies numériques à l’université Rennes 2 : « Le fantasme derrière la dématérialisation est que la technologie peut tout résoudre. Mais il aurait fallu faire les choses dans l’ordre : simplifier l’administration, faciliter les démarches en version papier, accompagnées par des agents, avant de faire une dématérialisation rapide et forcée ». Une analyse claire et sensée qui nous rappelle aussi que la technologie ne peut avoir réponse à tout. C’est particulièrement vrai dans le champ du travail social et plus largement dans les métiers de l’aide.
Pascal Plantard rappelle aussi que « De façon systémique, la dématérialisation très rapide s’est traduite dans les territoires par un report de charges sur les épaules des collectivités, des travailleurs sociaux et des acteurs locaux. Avec des conséquences très concrètes sur leur travail. Une situation aggravée par l’irruption de la crise sanitaire et la fermeture de points d’accueil des services de l’État pendant les confinements, qui s’est par exemple directement répercutée sur les CCAS. Cette répercussion a aussi concerné les travailleurs sociaux des Départements notamment en polyvalence de secteur.
« Le risque est que l’administration se “bunkerise” et s’isole de la relation usager », estime de son côté Johan Theuret, directeur général adjoint (DGA) « ressources » de la ville et de la métropole de Rennes. Il est cofondateur du collectif Le Sens du service public. En tout cas, l’implantation des maisons France Service sur le territoire est nécessaire, mais ne peut suffire actuellement à répondre au désarroi des 13 millions de Français éloignés d’Internet. (lire l’article de la Gazette)
Assistante sociale et victime de violences conjugales, dans l’Allier, elle témoigne : « J’ai vraiment cru que j’allais mourir »
Les violences conjugales touchent toutes les catégories socioprofessionnelles, rappelle le journal La Montagne. « Même les plus formées à les déceler. Cet article est le témoignage d’une assistante sociale dont le compagnon vient d’être condamné à du sursis pour 15 ans de violences. Son intérêt porte sur le fait que le processus de déni des violences et de sidération est finement expliqué. « Mes sœurs m’alertaient en me disant que ce n’était pas normal. Mais j’étais amoureuse. L’impression d’être seule contre tous » dira l’assistante sociale qui garde l’anonymat.
« Ce qu’elle n’oubliera jamais, c’est la sensation d’eau glacée qui lui goutte dans le dos quand elle a peur. Ça et la solitude. Au quotidien, elle organise beaucoup d’activités extrascolaires pour ses filles, pour les éloigner et pour leur montrer d’autres figures d’autorité. Elle se renseigne beaucoup sur les violences conjugales, regarde des documentaires. Lui en fait regarder : « Il ne se sentait pas du tout concerné ».
Comment sortir d’une telle emprise et violence ? Cela passera par d’abord la prise de conscience de son risque de mourir, mais aussi du signalement d’un tiers connaissant sa situation : ici celui de sa psychiatre qui fera un signalement au procureur. (car encore une fois, c’est la victime qui voit un psy et qui se soigne. Ce n’est pas l’agresseur qui, avec du sursis, s’en tire plutôt bien.) (lire l’article de La Montagne)
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