Le groupe de travail que j’ai animé au Haut Conseil du Travail Social a produit il y a maintenant 2 ans (déjà !) un document sur l’importance du travail en réseau pour prendre en compte les difficultés que rencontrent nos concitoyens face aux outils numériques.
Cette fiche qui vous est présentée ici part d’un constat : les travailleurs sociaux ne peuvent porter seuls l’aide et le soutien des personnes qui ne peuvent pas pour une raison ou un autre se connecter à internet ou, s’ils le peuvent, ne peuvent pas utiliser les plateformes qui leur sont nécessaires pour accéder à leurs droits.
4 idées structurent ce document qui vous invite à vous saisir de cette question. C’est nécessaire car il n’est pas logique que les travailleurs sociaux passent de plus en plus de temps à expliquer aux personnes en difficulté comment fonctionne un ordinateur, quel usage que l’on peut en faire et en quoi il est utile. Certes, il est important d’aborder ces questions, mais cela ne devrait pas se faire au détriment des autres sujets abordés avec la personne reçue. Alors comment agir ?
Idée 1 : Identifier les différents intervenants concernés par l’accès et l’usage du numérique de nos concitoyens
Il y a bien sûr les travailleurs sociaux, mais aussi les médiateurs sociaux, tous les intervenants en charge de l’accueil, les médiateurs numériques. N’oublions pas non plus les « aidants » notamment les personnes bénévoles… Il s’agit aussi de savoir qui fait quoi sur ce sujet sur votre territoire d’intervention.
Idée 2 : Construire et animer un réseau de solidarité numérique
Tous les intervenants issus de différentes formations et cultures professionnelles ont la nécessité de travailler en réseau à l’échelle d’un territoire défini en y associant les personnes accompagnées dont le savoir est important : leurs connaissances et compétences sont issues de leurs pratiques du quotidien. La reconnaissance de leur expertise contribue au développement de leur autonomie qui est au cœur de l’approche du travail social. Les travailleurs sociaux savent travailler en réseau et construire des partenariats, il est utile de leur permettre de développer le leur.
Idée 3 : Reconnaître les missions spécifiques des acteurs du réseau de solidarité numérique
Tout le monde ne fait pas tout, les compétences sont variées tout comme les approches d’une problématique particulière : Le schéma indicatif ci-dessous peut vous éclairer sur les tâches partagées de celles qui sont spécifiques. Elles découlent des missions de chacun. Il y a des fonctions communes et des fonctions spécifiques à chacun des acteurs
Ces cercles sont indicatifs. Ils ne sont pas exclusifs. Vous noterez que dans le cercle « travail social », les secrétaires médico-sociales ont un rôle actif et contribuent au réseau de solidarité numérique.
Idée 4 : Valoriser la place et l’action des personnes
La place des personnes est essentielle. Il s’agit de les soutenir, les associer et de répondre à leurs demandes. En effet leurs demandes initiales portent rarement sur la maîtrise des outils numériques mais plus souvent sur l’accès aux droits et aux prestations auxquels elles peuvent prétendre. Une réponse consistant uniquement à proposer une formation au numérique est souvent inadaptée et peut provoquer des incompréhensions. Les intervenants ont toujours comme objectif l’autonomie de la personne en respectant son libre arbitre et son expérience personnelle. L’évaluation de son « autonomie numérique » de la reste singulière et permet à chacun des intervenants de savoir comment il peut ajuster sa réponse à la demande exprimée. Il peut la traiter directement avec elle ou l’orienter soit vers des ressources en libre accès, soit vers des ressources d’accompagnement dédié aux personnes non -autonomes.
Un cadre de référence et des recommandations à partager
Enfin la fiche propose une liste de recommandations sur la définition d’un cadre de référence et la façon de travailler ensemble. Ainsi il est proposé de
- Renforcer l’interconnaissance des acteurs pour atténuer les éventuels clivages et construire une vision partagée en créant des passerelles entre les différents métiers (organiser des formations communes et des périodes d’immersion) ;
- Favoriser le partage d’expériences et mettre en place les conditions propices à l’émergence d’une culture commune entre intervenants sociaux et numériques ;
- Promouvoir la rédaction d’une charte de l’aidant numérique délimitant les compétences spécifiques de chaque acteur et les compétences partagées. Rappeler le cadre légal sur le partage d’information et le respect de la vie privée ;
- Articuler les réseaux de l’intervention sociale et de la médiation numérique en développant des outils communs ;
- Disposer d’un centre de ressources pour mutualiser des bases documentaires, partager des référentiels et des outils méthodologiques en réponse aux besoins les plus fréquents (type plateforme nationale)
Vous pouvez télécharger sur le site du HCTS cette fiche intitulée « Quelles articulations entre travail social, médiation sociale et médiation numérique ? ». N’hésitez pas à en prendre connaissance et à la diffuser autour de vous.
Je profite également de ce post pour rappeler quels sont les membres du groupe numérique qui ont contribué à ce travail. Peut être en connaissez vous certain(e)s. N’hésitez pas alors à en reparler avec eux. Ils peuvent aussi intervenir sur ce sujet au sein de vos instances de réflexion :
Les membres du groupe de travail numérique du HCTS :
Maryse BASTIN-JOUBARD Fédération des acteurs de la solidarité
Brigitte BOUQUET Experte
Coralie BOUVET ANCASD – département du Calvados
Brigitte DANIEL ANCASD
Diane DALVARD anciennement ANSA
Caroline DURIER ANDASS
Anita FRICONNET Ministère de l’Intérieur
Maud GALLAY CGET
Stéphanie GAONAC’H Direction de la protection judiciaire de la jeunesse
Olivier GERARD UNAF
Laurent GIRAUD France Médiation
Camille GREMEZ France Médiation
Olivier GRIFFITH UNAFORIS
Anne-Gaëlle GUEGANIC UNIOPSS
Nathalie HENNEQUIN-ANDRIEUX FSU
Chantal HERISSE Conseil départemental de Loire-Atlantique
Véronique HUBER Ville de Paris
Marine JOUAN Agence du numérique
Michel LECLERC CFDT Fédération Interco
Sarah LECOUFFE UNCASS
Jeannine LE COURTOIS conseil départemental 56
Oriane LEDROIT Agence du numérique
Carole LEFLOCH CDPA
Joran LEGALL ANAS
Yvette MOLINA CRTS Bretagne/Askoria
Isabelle NEAU Conseil départemental de Loire-Atlantique
Ophélie PERICHON France ESF
Claire PERRAULT FNAAFP/CSF
Thierry RENAUT CDPA
Isabelle REUX conseil départemental du Calvados
Amandine ROBIN CNFPT
Simon ROUSSEY ANSA
Evelyne ROSSIGNOL CGT
Véronique ROUSSIN DGCS
Lauriane SOCHON UNAF
François SORIN CRTS de Bretagne/Askoria
Corole VEZARD CNAF
Note ; j’avais initialement publié cet article en décembre 2018 (d’où les commentaires déjà présents) j’ai modifié l’introduction en vue de le réactualiser…
Photo : rawpixel.com freepik
3 réponses
Très intéressant dossier. Une ou 2 remarques: les fonctions de « médiateurs numériques « sont peu identifiées.Les lieux d’appropriation et/ou d’accès n’ont pas non plus d’identité claire ,foisonnent en matiére de « statut » .Au même titre qu’on peut regretter l’absence d’accompagnement dans la transition écologique,il en est de même dans la transition « numérique « ,qui aurait d’ailleurs méritée d’être ainsi qualifiée .Lorsque on nomme les choses,le diagnostic s’en trouve facilité.D’autant plus (quelque soit la com)c’est une obligation que l’état impose au citoyen mais sans donner les moyens.Les Maisons de services au public (initiée déjà sous Sarkosy) ne sont pas une norme et encore rares.Ou parfois habillées de ce terme mais honteusement ramenée à un placard…
L’enjeu porte aussi la question des institutions citoyennes Comme mentionné je pense que le département reste une identification assez claire pour les citoyens Alors que la désertification des services publics est au coeur des mouvements actuels,une vraie mission de service public sur tout le territoire doit être une priorité.
Dernier point :il ne me semble pas avoir lu un mot sur l’illettrisme. Or l’apprentissage de la lecture est indispensable dans la médiation numérique.
Bref cette approche vue du TS,mérite une vraie traduction « politique ».Sous peine qu’avec la politique libérale actuelle,la médiation numérique ne soit qu’une prestation de service « onreuse »comme on l’a vu avec le service public des « cartes grises » abandonnée au bénéfices de ‘startups »(ou garages)chères à la Macronie!
Didier tu ne figures pas dans la liste des participants au groupe numérique ? Amitiés
Cristina
Bonjour Cristina
C’est une erreur de la DGCS qui a oublié de mettre l’animateur du groupe dans la liste des membres du groupe numérique. Je vais les relancer pour qu’ils mettent mon nom dans la liste…
amitiés
Didier