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Quand les cabinets de conseils privés s’intéressent à l’action sociale… (1)

« Les conseilleurs ne sont pas les payeurs ! » mais ils savent se faire payer. La tendance générale dans les Institutions de l’État, mais aussi les collectivités territoriales, consiste désormais à faire appel à des cabinets externes pour traiter des questions internes qui relèvent des missions de service public. Tout cela coute fort cher, on le sait désormais. Mais ces coûts ne sont pas intégrés dans les charges fixes. Ils peuvent facilement être externalisés et noyés dans des chapitres comptables auxquels il n’est pas prêté beaucoup d’attention.

Matthieu Aron et Caroline Michel-Aguirre, grands reporters, ont récemment publié « Les infiltrés », un livre enquête sur l’influence des cabinets de conseil au plus haut niveau de l’État. Ils nous apprennent que cette « mode », venue du monde anglo-saxon a pris en France à partir de 2007, au moment où s’est ouvert le quinquennat de Nicolas Sarkozy. Les deux auteurs estiment que facture globale, tous cabinets confondus s’élève entre « 1,5 et 3 milliards d’euros par an, actuellement ». Or ces cabinets développent des positionnements très libéraux. C’est l’essence même de leur travail.

L’épidémie de Covid à l’image de ces excès

Il a été dénombré 47 commandes auprès de sept cabinets différents au plus fort de la crise par le Ministère des Solidarités et de la Santé. Certes, l’heure était grave, mais quand même : le plus connu, le cabinet McKinsey, a ainsi empoché 10 millions d’euros pour lancer la campagne de vaccination. Un autre, Citwell, avait été interrogé pour connaître l’état des stocks de masques en France, pour 6,7 millions d’euros. Finalement, l’État aurait versé 24,6 millions d’euros aux cabinets privés en 18 mois de crise sanitaire.

Un autre marché a intéressé les cabinets de conseil : La démocratie participative. La démocratie est semble-t-il un marché comme les autres, et il peut rapporter gros. C’est aussi « la belle découverte qu’ont pu faire Roland Berger et Eurogroup Consulting au cours des dernières années. Ces deux cabinets de conseil privé ont en effet réalisé plusieurs millions d’euros de chiffre d’affaires en appuyant le gouvernement dans l’organisation des nombreuses « consultations citoyennes » qui ont émaillé le quinquennat »  explique un pool de 4 journalistes du journal Le Monde qui a enquêté sur ce sujet. Des missions au coût élevé pour l’État : au moins 24 millions d’euros pour une trentaine de consultations menées entre 2018 et 2022, selon les calculs du journal.

Trois grands types de travaux de conseil sont mis en avant :

  • L’informatique : ces missions de conception et développement représentent de loin les marchés publics les plus coûteux.
  • Le management : il s’agit de revoir l’organisation interne des services du client. Souvent, la commande préconise un résultat attendu : réaliser des économies de gestion.  Il est cité en exemple la commande, en 2015, de la CAF de Bobigny pour une mission d’accompagnement par Capgemini d’un coût de 55.000 euros, afin de gérer plus efficacement les dossiers traités par les agents.
  • La stratégie : ce sont des analyses au long cours qui doivent permettre au décideur de penser l’évolution de ses services en fonction de l’évolution de la demande social.

et ont quant à eux enquêté sur les pratiques du cabinet de conseil McKinsey, missionné dès 2018 par la CNAF pour remédier à des difficultés informatiques. Ce cabinet a touché près de 4 millions d’euros en plus de deux ans. Le résultat, sur le terrain, du projet de « contemporanéisation », des aides au logement est loin d’être satisfaisant. Les conseillers CAF sont bien placés pour le savoir. Les journalistes précisent même que « les objectifs sont certes atteints, mais dans la douleur et au détriment des allocataires car, malgré les 3,88 millions d’euros d’honoraires versés au cabinet de conseil McKinsey pour piloter le projet, l’opération a plutôt provoqué un crash informatique dont les conséquences empoisonnent encore aujourd’hui la vie des allocataires et le travail des agents des caisses d’allocations familiales (CAF) de la France entière ».

Les journalistes donnent la parole au syndicat national Force ouvrière des cadres des organismes sociaux (SNFOCOS). Il dénonce, dans une lettre datée du 4 mars, adressée au nouveau directeur général de la CNAF « des difficultés qui perdurent, une réforme qui retarde le processus de liquidation [le paiement de l’allocation logement] par la persistance des anomalies de droits, par la déficience du système d’information (…) et surtout l’incompréhension des allocataires en accueil physique et téléphonique (…) La situation dans les CAF est explosive. La branche famille continue sa lente descente aux enfers ! ».

Mais que font les cabinets de conseil pour régler cela ?

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Photo créée par pressfoto – fr.freepik.com

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