J’ai été invité à intervenir récemment à Lamballe à l’invitation de la Fédération des Centres sociaux et socio-culturels de Bretagne (FCSB). La fédération regroupe 73 structures sur les 4 départements bretons. 1700 salariés et 3700 bénévoles s’investissent dans ces centres sociaux pour qui « le pouvoir d’agir » des habitants et les transformations sociales sont mises en avant.
J’ai eu l’occasion de rencontrer à cette journée des professionnels motivés portés par des valeurs et des pratiques originales pour « aller-vers » des publics parfois difficiles à atteindre. Pourquoi et comment s’y prennent-ils ? Ce fut l’objet de la présentation d’un guide pratique du « Aller vers » réalisé par la Fédération.
Ce guide, présenté par Olivier Pétillon (photo), a été distribué aux quelques 150 participants à cette journée régionale, (dont des élus de la Région et de plusieurs communes). On y trouve des expériences intéressantes, mais aussi une foule de conseils dont voici quelques extraits…
Mais au fait, pourquoi « Aller vers » ?
Les témoignages et les échanges montrent que de nombreuses familles n’accèdent pas ou ne bénéficient pas des actions de soutien à la parentalité menées par les centres sociaux. Ceci par méconnaissance, par crainte ou… par fierté. Ceci oblige les animateurs sociaux à se questionner et à modifier de façon dont ils travaillent, à « s’outiller » pour mieux aller à la rencontre des invisibles, des familles les plus fragiles. Il est nécessaire afin d’écouter ce qu’elles peuvent avoir à dire, d’entendre leurs points de vue, d’établir un lien, et finalement répondre à leurs besoins.
Le matin, 4 ateliers différents ont réuni les participants afin que chacun puisse s’exprimer sur les différentes facettes de l’Aller-vers » : (le partenariat, la posture d’écoute, le recueil de la parole, y a-t-il de nouvelles conceptions du métier à appréhender…) La photo qui suit présente un des ateliers.
Cette manière d’agir trouve son ancrage dans des convictions profondes des différents acteurs des centres sociaux, qu’ils soient professionnels ou bénévoles. Cette posture est d’ailleurs affirmée dans la charte des centres sociaux : le respect de la dignité de chacun et la solidarité… Le premier objectif visé concerne l’écoute et le recueil de la parole des habitants. Ce sont souvent les mêmes qui s’expriment et il est toujours utile de rencontrer des personnes « éloignées de la vie sociale », même si ce qu’elles nous disent n’est pas toujours évident à entendre.
Trois grands objectifs sont définis
- écouter et recueillir la parole de l’ensemble des habitants
- faire vivre l’éducation populaire auprès des habitants
- renforcer l’utilité sociale du Centre social
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Les centres sociaux nous invitent ainsi à réfléchir sur la façon d’aller vers celles et ceux que l’on rencontre peu et qui pourtant font face à d’importantes difficultés. Il s’agit en milieu rural de se rendre visible au cœur des communes et des villages. Le guide présente une véritable méthodologie de l’action avec d’abord quelques questions à se poser comme le montre la page 7 du guide :
Viennent ensuite des recommandations qui portent sur l’organisation des équipes et des actions ainsi que sur le territoire d’intervention (le périmètre). Un pré-requis incontournable est de se poser la question : Qui souhaitons-nous rencontrer ? Visons-nous un public particulier, si oui où se trouve-t-il selon les moments de la journée ?
Le guide présente huit expérimentations (2 par département breton). Comme il n’est pas possible de toutes les présenter dans cet article, j’en ai retenu 3 qui m’ont bien plu.
Le « Porteur de Parole » en triporteur à Saint Brieuc
C’est le centre social « La puce à l’Oreille » qui en est à l’initiative. Lors de sorties instituées auprès des habitants, les agents de
développement en lien avec une équipe de bénévoles se sont mobilisés sur les espaces publics des quartiers Sud de Saint Brieuc afin de permettre aux habitants de s’exprimer sur leur quotidien, leurs attentes et leurs besoins. L’occasion a été donnée d’échanger, de partager et de créer du lien social sur le territoire. Avec le triporteur, ils se sont déplacés pour proposer un temps de convivialité et une animation via l’outil « porteur de parole ».
L’ensemble des propos recueillis a fait l’objet d’une exposition au centre social et ont été exploités dans le cadre du renouvellement de projet social. Les partenaires se sont aussi mobilisés autour de cet outil pour proposer des animations de proximité telle qu’une « bibliothèque buissonnière ». (contact : Centre social « La puce à l’Oreille » – rue Guillaume Apollinaire – 22800 Saint-Brandan – 02.96.78.32.91)
Des « cafés nomades » devenus « Les vadrouilles » à Paimpol
Ce sont d’abord des tables et chaises pliantes, thermos ou boissons fraîches, parasol, parapluies, le kangoo du Centre et aussi un triporteur. L’équipe fait attention pour ne pas donner « l’impression » d’avoir quelque chose à vendre. Des tournées sont planifiées pour visiter les quartiers : au moins 1 fois tous les 15 jours, voire plus en fonction des demandes et ou des sujets abordés par thèmes (ex : nouveau quartier en construction, on ne se connait pas entre voisins…)
Cette action a permis de nouvelles rencontres, des personnes qui nous suivent sur le site internet, des habitants qui viennent s’essayer dans les propositions d’activités du centre social, des remontées d’informations qui éclairent les partenaires, les élus sur le climat social, des situations individuelles prises en compte par les travailleurs sociaux. Cette action a aussi permis la création d’un collectif d’habitants qui veille à créer du lien entre les habitants pour lutter contre l’isolement. (contact : Centre social le Chatô 02 96 55 31 74 – lechato@ville-paimpol.fr)
La Caravane des villages sur 11 communes rurales
La caravane est un outil d’animation itinérant et modulable. Chaque semaine (1 à 2 fois) cette équipe se déplace sur les différentes communes, dans les bourgs, sur les places de villages. Elle installe un espace convivial avec tables, chaises, café, et propose des crêpes (Nous sommes bien en Bretagne !) Des animations, des jeux, prétextes à la rencontre peuvent également être proposés. Une communication est faite en amont pour indiquer la présence des professionnels et des bénévoles sur la commune.
Résultats : de nouvelles rencontres avec des habitants qui viennent plus facilement pousser les portes du centre par la suite ou que l’on
voit sur d’autres actions, des relations renforcées avec les municipalités et les partenaires, une meilleure connaissance du territoire et de ses réalités, et surtout de nouveaux projets qui émergent (contact : Charline et Nicolas : 02 99 45 86 31 – charline.toutirais@afel.fr)
J’aurais tout autant pu vous parler… Du Carré d’as à Morlaix, du centre social de l’Astérie à Plougastel-Daoulas, des déambulations du centre Confluence à Redon, des animations de rue du Polygone à Lorient ou du centre social l’Éveil de Limerzel… Tous agissent au quotidien avec les travailleurs sociaux, les habitants, mais aussi les élus pour tisser ce lien social si propice aux échanges et à la solidarité.
Note : Un grand merci à l’équipe de la Fédération des centres sociaux et socioculturel de Bretagne pour la qualité de son accueil.
(contact FCSB : 3 rue de la Volga à Rennes courriel : contact@centres-sociaux-bretagne.fr)
la première page du guide :
photos dd