J’ai particulièrement apprécié le récent ouvrage de Saül Karsz « affaires sociales questions intimes » qui, en quelques chapitres, nous conduit à réfléchir sur ce que nous pensons des questions de société qui « percutent » notre façon de penser. J’aime aussi la façon qu’a cet auteur, parfois dérangeant, de déconstruire ces sujets sociaux. Il nous oblige à réfléchir sur des questions qui nous concernent tous, en tout cas sur des questions que je peux me poser sur des thèmes aussi divers que la vieillesse, l’innovation sociale, l’objectivité ou encore le suicide et la folie. Saül Karsz ne mâche pas ses mots, il ne va pas chercher ses idées dans le politiquement correct et ce qui fait consensus. Cet aussi cela qui rend son ouvrage intéressant et rend l’auteur si « attachant » ou « agaçant » selon chacun..
J’entends déjà certains de ses détracteur dire « Saül fait du Saül, il déconstruit et nous laisse devant une page blanche ! Il nous a déjà fait le coup dans ses précédents ouvrages, donc rien de neuf ! « . Et bien je ne suis pas d’accord avec cette analyse un peu radicale et à l’emporte pièce. En effet contrairement à d’autres auteurs qui nous délivrent doctement la bonne parole, Saül Karsz nous interpelle et alimente notre réflexion. Son apport est utile pour le travail social mais aussi pour toute personne qui aime réfléchir par elle même sans aller chercher de maître à penser. Il pose des jalons, aiguise notre attention et à nous ensuite de continuer le travail ou si vous préférez la discussion.
8 sujets sociaux sont abordés, 8 thèmes de réflexions qui pourraient chacun faire l’objet d’un ouvrage plus conséquent. Je n’irais pas jusqu’à dire que vous achèteriez 8 livres pour le prix d’un mais un peu quand même. Chaque question intéressera les travailleurs sociaux. Pourquoi ? J’ai toujours pensé que la théorie et l’analyse n’ont de sens que si elle sont articulées au réel, au quotidien de ce que vivent les personnes que nous rencontrons. Les témoignages individuels parfois intimes des personnes que nous rencontrons nous en apprennent beaucoup sur le genre humain. Une collègue me disait : « le travail m’a appris à ne plus m’étonner de rien ». Entendez par là que l’humain est tellement surprenant et si inventif. Il pose des actes parfois si déroutants qu’il faut quand même être solide pour ne pas tomber dans les travers faciles du jugement. Notre travail nous permet de d’articuler les hypothèses et théories avec cette connaissance des questions intimes que nous percevons dans la relation d’aide. Or c’est bien de cela qu’il s’agit dans cet ouvrage : articuler ce qui fait sens dans le système social de ce qui se passe dans le réel de nos vies.
Ce livre est assez foisonnant. J’imagine l’auteur s’amusant à repérer les paradoxes des questions abordées, Se délectant des contradictions de la société qui n’ose se dire à elle même ce qui, dans l’intimité de chacun, est bien su et connu pour peu que l’on accepte de se regarder et de ne pas se raconter d’histoires.
Rappelons les 8 thèmes abordés : La vieillesse (déconstruire la vieillesse), la victimologie (Ponctuations sur « l’idéologie victimaire »), la folie (Cachez cette folie que je ne saurais voir) , le suicide (Penser le suicide) , la santé (nécessaire, souhaitable, impossible : la santé et ses paradoxes), le projet (3 dimensions, 2 coordonnées, une logique), l’innovation sociale (c’est à dire ?) , l’objectivité et la non-neutralité ( Objectivité indispensable, neutralité impossible). Il aurait pu y avoir d’autres sujets, certains sont dérangeants d’autres moins mais bon, c’et comme ça.
Autre intérêt, il vous est possible une fois avoir pris connaissance de la préface présentée sous forme de mode d’emploi, d’aller vers le chapitre qui vous intéresse plus particulièrement et de réserver les autres pour plus tard (ou jamais si vraiment vous ne souhaitez pas du tout aborder un sujet particulier !… 😉
Bref, vous l’avez compris, pour moi affaire sociale est une livre utile, vivifiant et foisonnant que tout travailleur social qui se respecte devrait avoir envie de lire.
voici un lien sur la présentation d’une fiche qui vous permet de repérer les principales thèses abordées et analyses par chapitre ainsi qu’un autre lien pour vous procurer ce livre.
C’est aussi l’occasion d’aller visiter le site « pratiques sociales ». Vous y trouverez de multiples articles et analyses fort intéressants.