Vous l’avez sans doute remarqué, en matière de travail social tout le monde ou presque fait de l’accompagnement. C’est un « terme valise » où tout et son contraire est dit ou écrit. Il y a l’accompagnement social, puis médico-social, mais aussi socio-administratif ou encore le socio-professionnel. Seul lien commun à ces termes, le social est partout ! Mais il n’y a pas que le social.
Dans d’autres domaines, il a aussi été inventorié de multiples pratiques se déclarant relever de l’accompagnement : counselling, coaching, sponsoring, mentoring… Elles coexistent avec tutorat, conseil, parrainage ou encore compagnonnage. Bien que toutes tendent à se déclarer spécifiques (et elles le sont au regard de leurs contextes), toutes ces pratiques sont des formes d’accompagnement, d’où une certaine ressemblance quand il s’agit de les décrire. Il semble qu’à fonctionner sans reconnaître comment toutes ces formes font système, on ne parvient plus à rendre compte de la complexité dont elles témoignent : l’idée d’accompagnement s’émiette, le sens de l’acte d’accompagner se dilue. C’est ce que nous indique entre autre le N° 62 de la revue « recherche et formation » ENS Lyon « autour du mot accompagnement »
Alors qu’est-ce que l’accompagnement exactement ? Retenons une définition qui me plaît bien : « Accompagner », c’est se joindre à quelqu’un pour aller où il va, en même temps que lui. Quand on se positionne dans l’action avec ou sous ce terme, on indique une façon de faire spécifique. : Le positionnement ouvre une possibilité de création qui est autre que le prêt à penser modélisable dans le prêt à agir modélisé (bonnes pratiques, fiches actions, procédures, protocoles…). Cette définition est celle de l’accompagnement social du mouvement pour l’accompagnement et l’insertion sociale.
Maela Paul qui a beaucoup écrit sur ce sujet nous précise qu’accompagner c’est « être avec » et « aller vers » et des principes au nombre de trois.
- Le premier est que de la mise en relation dépend la mise en chemin,
- le deuxième qu’il s’agit moins d’atteindre un résultat que de s’orienter « vers » c’est-à-dire de choisir une direction
- le troisième est que l’action (la marche, le pas, le cheminement) se règle sur autrui soit aller où « il » va et « en même temps » que lui ce qui suppose de s’accorder à celui que l’on accompagne.
L’une des particularités de la situation d’accompagnement est d’être liée aux singularités des accompagné(e)s. Dans ce sens, elle ne peut être standardisée. Son existence, bien qu’elle soit déterminée par une autorité administrative, car il s’agit d’une situation professionnelle, reste, du moins dans sa dynamique, étroitement liée à la volonté et à l’implication de l’accompagné et de l’accompagnateur. Aucun des deux acteurs ne peut, à lui seul et indépendamment du dessein de l’autre, faire exister la situation d’accompagnement.
Ce mot « accompagnement » est d’utilisation récente en Travail Social. Comme nous l’a précisé Cristina De Robertis, sa racine latine est : ad – mouvement cum panis – avec pain, c’est-à-dire, « celui qui mange le pain avec ». Ce vocable renvoie également aux termes de compagnon et copain, qui sont utilisés pour signifier les liens de proximité entre des personnes. En espagnol, dérive aussi de cette racine le mot «compartir» qui veut dire partager. Accompagnant et accompagné partagent le pain, font côte à côte, ensemble, un bout de chemin…
L’émergence de ce terme peut être située dans le rapport WRESINSKI sur la grande pauvreté en 1987. L’accompagnement a aussi été utilisé dès les années 1980 par le secteur handicap (certains Centres d’Aide par le Travail se dotent de « services d’accompagnement et de suivi ») . Il sera pérennisé dans les dispositifs d’insertion (RMI 1989), de lutte contre le surendettement (loi NEIERTZ 1989), de logement (Loi BESSON 1990). Mais pourquoi ce terme apparaît-il alors dans les différents textes de politique sociale ? L’accompagnement est porté très fort par le milieu associatif, luttant contre l’exclusion, pour signifier l’action des bénévoles auprès de personnes en grande difficulté.
Pour conclure « accompagner » c’est aussi parfois accepter de prendre le risque d’aller avec l’autre sur des chemins pouvant être inconnus ou incertains. A l’heure ou tout se référence, se normalise, se met en grille et doit répondre à des critères de « bonnes pratiques » finalement faire appel à l’accompagnement est aussi une façon de résister aux tout ce qui est normalisé et standardisé. C’est aussi cela qui rend la pratique de l’accompagnement si sympathique !…