Le plan pauvreté reporté à septembre alors qu’il devait être annoncé la semaine prochaine « La stratégie gouvernementale de lutte contre la pauvreté, dont la présentation était initialement prévue le 9 juillet lors du discours devant le Congrès du président de la République, sera finalement dévoilée à la rentrée de septembre en raison d’arbitrages encore en cours». C’est ce qu’a fait savoir hier mercredi l’Elysée à la suite de l’information révélée par France Inter. Ce report peut surprendre tant ce plan était attendu. C’est une grande déception pour les associations, qui rappellent que « la misère n’attend pas ».
À quoi devait ressembler ce « plan anti-pauvreté » prévu par Emmanuel Macron ? Travail, accompagnement des adolescents et jeunes adultes, famille et petite-enfance, réforme des minimas sociaux… la radio RTL indiquait hier que l’Élysée en peaufinait les dernières lignes. Or les décisions finales n’ont pas été prises. La « stratégie pour lutter contre la pauvreté » devait se déployer progressivement, à partir de cet automne. Une dizaine de territoires volontaires devaient être désignés pour des expérimentations. Parmi eux, le Nord-Pas-de-Calais ou encore la métropole de Lyon.
Les principales mesures initialement prévues portaient sur « du travail pour les 16-24 ans », « la simplification des aides » (la fusion du RSA et de l’ASS sont en cours d’étude), « l’augmentation du nombre de places pour l’accueil des jeunes enfants », « des aides financières pour les familles monoparentales », « des petits-déjeuners à l’école »… Si les associations d’aide aux plus démunis ont salué la qualité des concertations menées jusqu’à présent par le délégué interministériel Olivier Noblecourt, elles craignent également que le budget du plan pauvreté soit limité et largement insuffisant.
A ce sujet, Olivier Noblecourt était l’invité du Haut Conseil du Travail Social lundi dernier lors de son assemblée plénière. Il nous a présenté les grandes lignes des mesures qu’il propose. Mais, rappelons-le ce n’est pas lui qui décide. Il a présenté en introduction son point de vue sur notre modèle social : « il fonctionne et nous avons un filet de sécurité qui est efficace » a-t-il indiqué mais il y a 2 limites majeures importantes. Notre modèle « peine à endiguer la pauvreté » et les mécanismes de reproduction montre « la panne de l’ascenseur social ». Les accompagnements à l’insertion professionnelle devaient être encouragés et financés. L’insertion par l’économique devait être valorisée, notamment les entreprises de l’économie sociale et solidaire. Le Fond d’aide à l’insertion (le FAPI) devait être abondé par l’Etat avec des attentes en terme de résultats. Olivier Noblecourt était apparu convainquant et assez sûr de lui. Mais il n’a pas toutes les cartes en main. On le voit avec l’annonce de ce report.
Les travailleurs sociaux seront sans doute eux aussi mobilisés. Il semble nécessaire de considérer l’accompagnement dans sa globalité et non plus en séparant l’insertion sociale de l’insertion professionnelle (enfin!). Le gros problème a-t-il indiqué, est que l’on ne sait pas suffisamment comment les Départements agissent, s’ils se mobilisent et pour quels résultats. Il y a des Départements qui s’engagent mais d’autres qui ne font pas assez ou trop peu en matière d’insertion des allocataires du RSA. Des conventions d’objectifs pourraient être passées. Mais les relations actuelles sont entre l’Etat et les Départements sont conflictuelles : les associations de régions, départements et maires ont boycotté la Conférence des Territoires lundi dernier pour dénoncer un recul de la décentralisation et l’absence de véritable dialogue avec l’Etat. C’est aussi peut être pour cela qu’un report d’annonce a été rendu nécessaire car rappelons-le les Départements restent chefs de file de l’action sociale et l’on voit mal l’Etat s’engager sans eux.
Olivier Noblecourt a aussi travaillé avec un conseil scientifique pour valider des futurs indicateurs de suivi de la stratégie qu’il comptait mettre en oeuvre.
En tout cas ce report est un mauvais signal et l’on peut craindre que ce qui semblait acquis ne le soit plus en septembre. Il ne faurait pas qu’Olivier Noblecourt vive la même mésaventure que Jean Louis Borloo…
De son coté Louis Gallois a prévenu : « Si on touche aux aides sociales, on va faire exploser le taux de pauvreté ». Le président de la Fédération des Acteurs de la Solidarité, est revenu notamment sur les propos d’Emmanuel Macron sur les aides sociales dans le journal La Croix. L’ancien patron de la SNCF a réagi aux propos du président de la République sur les prestations sociales qui coûtent selon lui « un pognon de dingue ». Louis Gallois précise : « Il ajoute qu’elles ne sont pas efficaces. Je conteste cela dit-il. Ce pourrait être plus efficace, on peut y travailler. Mais si on n’avait pas les minimas sociaux, le taux de pauvreté serait en France de 24%. La prime d’activité a à elle seule fait baisser le taux de pauvreté de 0,4% en 2016. Je dis faisons très attention. Si on touche aux aides sociales, on va faire exploser le taux de pauvreté. »
Bref il va falloir suivre de près les annonces et les engagements mais ce ne sera pas avant la rentrée prochaine. Les associations tels la FAS suivent ce dossier de près . Elles ont là quelques raisons d’être inquiètes.
Photo : Olivier Noblecourt lors de son audition par Brigitte Bourguignon ( photo issue de leurs comptes twitter )