Rita Ségato est anthropologue. Elle est aussi une intellectuelle essentielle du féminisme latino-américain. Elle vit en Argentine et a conduit des travaux sur les violences sexuelles. Elle nous propose une liste de 10 points clés en vue d’aider à mieux se positionner face à ces violences.
Or les travailleurs sociaux sont régulièrement confrontés à des témoignages de victimes de ces violences spécifiques assez fréquentes notamment dans les relations de couple (mais pas que). Cet article vous propose de prendre connaissance des 10 points à prendre en considération. C’est un apport assez essentiel à mon avis sur ce sujet. Rita Ségato considère la violence sexuelle comme un problème davantage lié à la dynamique du pouvoir qu’à la morale.
- « C’est une bonne nouvelle : la société est désormais alertée sur le sujet des violences sexuelles et devient de plus en plus sensible face à l’agression, au harcèlement, aux différentes formes d’abus sexuel »
- « Il est nécessaire que ce sujet soit abordé dans une convention (nationale et internationale) convention qui associe les professionnels de la communication et de l’information. (professeurs de communication, les rédacteurs en chef de journalistes et les rédacteurs en chef de médias…) car le traitement de ce sujet dans les médias est à revoir.
- « L’homme violent est puissant : Même si les média montrent la violence de l’agresseur, cette « monstruosité » pour les autres hommes est une figure qui peut être tentante. Ce type d’homme veut pouvoir toujours montrer ce qu’il peut être, parce que c’est sa façon de montrer qu’il est puissant. C’est un personnage prédateur, en tant que sujet masculin inscrit par le mandat de la masculinité. »
- « Il faut pas masquer ni ignorer les aspects sociaux et politiques de cette violence. Cette dimension est souvent occultée par les média. Ils traitent trop souvent ces situations en s’attachant uniquement à la douleur morale de la victime pour ce qui lui est arrivé »
- « La victime n’a pas besoin d’être « bonne et pure » pour être comprise en tant que victime , elle doit seulement être reconnue en tant que personne ».
- « Nous demandons aux hommes de fuir, de se désengager et de déconstruire le mandat relatif à la masculinité. Beaucoup le font, car ils s’aperçoivent que ce mandat est mortifère, les rend malades en premier. Ils sont aussi des victimes pauvres et sans méfiance d’un ordre corporatif autoritaire et cruel qui règne au sein même de la corporation masculine ».
- La violence sexuelle est un problème politique et non moral : il ne s’agit pas seulement réconforter une victime qui pleure, mais d’intervenir dans le champs social pour que tous comprennent qu’il est nécessaire de déconstruire l’ordre patriarcal, qui est un ordre politique caché derrière une morale. »
- « Le féminisme ne peut et ne doit pas considérer les hommes comme leurs ennemis « naturels », l’ennemi est l’ordre patriarcal, qui est parfois incarné par les femmes. »
- « Méfiez-vous des lynchages médiatiques, car nous défendons depuis longtemps le droit à un procès équitable , qui n’est autre que le droit à la contradiction, au contre-argument et à la défense devant les tribunaux. »
- « Que la femme du futur ne soit pas l’homme que nous laissons derrière nous » : je partage cette phrase extraordinaire qu’un chef de police du Salvador m’a dite, sur laquelle j’ai travaillé pendant une grande partie de cette année »
photo : Wikipédia